Le mois d’avril fut comme chaque année très éprouvant.
J’ai lu dans le journal de ma naissance qu’il sévit pour la circonstance sans doute, une canicule qualifiée de record du siècle. Les autres événements tragiques de ce jour-là n’ont guère d’importance car tous, hormis ma mère et les béliers de l’année, les ont oubliés.
Notre quatrième mois de l’an dix est à marquer d’une pierre blanche.
Il y eut un nuage. Une bouffée de cendres voyageuses qui abolit pour un temps l’ère de l’aviation. La SNCF marqua le pas et devant la menace fit valoir son droit de retrait. Sédentarisé par contrainte au fond de mon transat, j’en fus réduit à contempler les pâles pâquerettes de la pelouse et recenser les éclosions de fleurs de pissenlits. Je broyais du noir sous un soleil gris ; parfois j’observais le triste présage du vol en rase-motte des hannetons … La gourmandise finalement eut raison de ma paresse : les pistils qui se cachent au cœur des pétales de glycine sont délicieusement sucrés … Mais pas cette année ! La fleur avait un goût de cendres, une saveur de brûlé : la poussière du volcan islandais s’était redéposée dans le Perche.
Fichu mois qui fut aussi celui du fichu de Nantes.
Conduire la face voilée est prohibé. C’est comme rouler à Solex sans casque. Pour sanctionner la contrevenante le délicat ministre de l’intérieur lui apprend qu’elle est doublement cocue. Son mari de boucher barbu se rebiffe et tient conférence. Il passe en boucle à la télé. C’est un ogre. Il fait peur aux petits enfants. Toute la France frissonne de trouille avant d’en rire. C’était caméra cachée ! Le script était parfait, les décors et les costumes éblouissants, les acteurs (de la ligue d’improvisation ?) époustouflants. Attendons la sortie du dvd.
En bon citoyen j’ai acheté douze euros le best-seller de la législature : un pavé de plus de six cents pages « rapport d’information parlementaire sur le voile intégral ». C’est un bon rapport qualité/prix. La lecture est édifiante, surtout celle des auditions de « personnalités qualifiées ». Il y a des âneries grossières amusantes mais aussi des flots de pertinences. Celles d’Elisabeth Badinter qui invoque le principe de fraternité « porter le voile c’est refuser absolument d’entrer en contact avec autrui » celles de Tariq Ramadan qui conclut « vos citoyens français de confession musulmane sont français ; il faut que vous l’entendiez. »
Je pose le livre ouvert et m’introspecte.
Ma position n’a pas changé je suis contre tout contre.
La radio m’informe de la chute de la bourse, de l’Euro et de l’Europe. Tous nos malheurs viendraient de la Grèce qui a vécu au dessus de ses moyens. La mauvaise graisse s’est accumulée, personne n’avait diagnostiqué le mal. Le mourant avait dissimulé son état. Socrate nous avait pourtant prévenu « tous les Grecs sont menteurs ! » Oui mais comme Socrate est Grec il se peut qu’il ait menti ?
Je reste philosophe mais songe à constituer un fonds de pension pour assurer la retraite de la belle Héllène.
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