mardi 31 décembre 2013

Le voyage sidérant de Hollande en Arabie


Vers l'Arabie compliquée, François Hollande s'en est allé avec une idée simple : engranger la récompense de son allégeance. Au terme de vingt quatre heures passées à Riyad, il rentre bredouille avec l'amer sentiment de s'être fait rouler dans la farine.
Cette visite officielle, scrupuleusement encadrée par des attachés de presse dévoués, laissera la trace de non dits révélateurs de la légèreté française.

La première exclusion sémantique de ce voyage est l'islam. 
Il est extraordinaire que le chef de l'Etat français ait omis toute référence à la vocation religieuse du Royaume wahhabite d'accueillir -au moins une fois dans la vie- un milliard et demi de pèlerins. Plus regrettable, dans aucun de ses discours il n'a mentionné la communauté musulmane de France pourtant la première en nombre des pays occidentaux.
Quel contraste avec sa visite en Israël où il y a un mois il déclarait : « ...la France sait ce qu'elle doit aux juifs de France, en matière scientifique, culturelle, intellectuelle, économique. » Passons.

Le Président du pays de la déclaration des droits de l'homme n'a pas davantage évoqué l'orgueil oublié de la France. Il a complaisamment accepté la danse du sabre. L'Arabie a décidément les moyens de faire taire les bonnes consciences.

En Orient l'absence de mots a un sens.

Francois Hollande a doctement évoqué l'Iran, l'Egypte, la Syrie, le Liban donnant l'impression que son bref aparté avec le roi dominait l'Europe et la piétaille du G20. Pas une fois il n'a parlé des Etats Unis ou de son Président. Pire, la diplomatie française a crânement fait savoir qu'elle allait profiter des opportunités offertes par le refroidissement passager des relations entre Washington et Riyad.
Certes, les deux capitales se boudent. Mais c'est une querelle entre deux familles consanguines. Sans l'assistance américaine, la poignée de millions de saoudiens retourneraient vite au désert. Tous les secteurs vitaux du pays sont dominés par les experts et les consultants US : pétrole, eau, armée, police, transports aériens, communications...La quasi totalité des élites est formée dans des universités américaines. Bref, il n'existe aucune alternative crédible à l'hégémonie US en Arabie.
L'entrisme de Hollande était d'avance voué à l'échec dès lors qu'il avait ignoré le portier. L'impression qui domine est qu'à Riyad, le Président grenouille a voulu se faire plus grosse que le bœuf.

Conséquences : les frégates et les sous-marins tombent à l'eau. Plusieurs méga-contrats sont différés. Même le milliardaire marché de missiles sol-air paraphé il y a trois mois est remis à plat. Alors, le Président s'est consolé en allant agrafer la Légion d'honneur à un homme d'affaires saoudien qui a eu la riche idée d'aller le mois dernier sauver les poulets Doux d'une faillite bretonne certaine.
A croire que le Quai d'Orsay n'a pas échographié correctement les arcanes de la monarchie saoudienne et qu'il a sous estimé l'autonomie du puissant ministère de la défense, le MODA qui échappe depuis toujours au clan du très vieux roi.

Pourtant, la visite de François Hollande a révélé que le pouvoir des Saoud n'était ni vacant ni déliquescent. En coulisse une subtile partie de mistigri s'est jouée à ses dépens. Ainsi, le Français s'est vu offrir un formidable cadeau empoisonné : Abdallah d'Arabie lui a donné trois milliards en bons d'achats d'armement à livrer au Liban ! C'est extravagant. Le Président du Liban en est tombé de l'armoire. Au même moment, les intermédiaires de toutes obédiences sautaient de joie ! 
Décryptage : incapable d'imposer des acquisitions à son propre Royaume, le souverain habilement inspiré a décidé en contrepartie de puiser dans sa cassette une somme équivalente, offrant à Hollande d'aller les dépenser en armement au Liban.
Cette magistrale embrouille va désigner la France comme premier fournisseur d'huile sur le feu au Levant. Paris est piégé, l'Europe et la communauté internationale vont se faire un malin plaisir de l'empêtrer davantage. 
L'année diplomatique 2014 s'annonce périlleuse. A moins que Hollande s'en aille très vite vers d'autres capitales demander l'indulgence pour avoir si maladroitement piétiné les plates bandes des grands.

samedi 21 décembre 2013

François d'Arabie




Le Président de la République François Hollande terminera l'année par une visite de deux jours en Arabie Saoudite. Il y percevra les dividendes de la diplomatie du plus offrant. Les étrennes seront généreuses. Elle permettront à quelques industriels d'assurer un plan de charge de plusieurs décennies et conforteront la place de la France au troisième rang mondial de l'armement.
Ce n'est pas rien.

Cette rencontre au sommet marquera aussi une prodigieuse évolution de la doctrine du parti socialiste.
Que de chemin parcouru depuis l'élection du premier Président de gauche de la cinquième république François Mitterrand, exigeant le désarmement des avions exposés au salon du Bourget !
En trente ans, la rue de Solférino a mangé son chapeau. Anti militarisme primaire et pacifisme naïf ont fait long feu. L'ultime étape est franchie.

Avant Hollande, les relations militaires franco-saoudiennes étaient exclusivement gérées par des hommes politiques de droite. Tous les ministres de gauche qui faisaient le voyage de Riyadh étaient reçus comme des diablotins dans un jeu de quilles. Récemment, Le Drian a cassé le plafond de verre en gagnant l'exploit d'être invité par le roi en personne. Cette performance est d'autant plus étonnante qu'elle s'appuie sur des fidèles de Sarkozy. L'ambassadeur de France à Riyad est l'ancien conseiller d'Alliot-Marie, le pilotage des ventes de matériels sensibles est assuré par une équipe de caciques de l'ancien régime, enfin, on cherchera avec difficulté des encartés à la rose dans le cénacle des industriels de l'armement.
En un rien de temps, le gouvernement Ayrault aura converti les plus conservateurs du très fermé cercle militaro-industriel.

La doctrine de Hollande : « l'emploi par la relance à n'importe quel prix » » marque avec ce voyage les limites du supportable pour les pachydermes socialistes qui eussent préféré que l'on se serra la ceinture pour marcher tête haute.
Car le rapprochement avec l'Arabie n'est pas seulement une opération de remplacement d'un client -le Qatar – par un autre, c'est le virage idéologique d'une alliance stratégique surprenante qui marquera l'histoire de la gauche.
L'Arabie Saoudite est-elle fréquentable ?
Non. Mais la question est incongrue car Paris n'a plus les moyens de chipoter la vente de frégates, centrales nucléaires et poulets de Bretagne. Tout au plus, les bonnes consciences pourront-elles espérer que le Président – ira-t-il avec sa compagne ? - osera chuchoter à l'oreille du roi quelques paroles étrangères: « liberté, égalité, fraternité, justice.... pour les femmes... »
On se consolera pareillement en songeant que François Hollande n'allait tout de même pas refuser les généreux retours sur investissement de sa posture levantine, ni bouder son plaisir d'être l'artisan du spectaculaire dialogue israélo-saoudien sur fond de crise persique.
Finalement, tout cela n'est pas si navrant.
L'indécence est ailleurs, elle est collatérale à ce voyage.

Car pour marquer la lune de miel franco-saoudienne, le Centre Pompidou a prêté au musée de Dahran des œuvres de Picasso.
Oui Picasso.
Picasso exhibé en Arabie.
En Arabie Saoudite, le pays Guernica des Droits de l'Homme !

vendredi 20 décembre 2013

Tunisie, Mehdi Jomaâ est arrivé




La désignation d'un nouveau premier ministre est une délivrance que tout le pays accueille avec soulagement.
Au terme d'une interminable chikaya, les partis politiques se sont finalement réconciliés autour du nom d'un inconnu. Sous la pression conjuguée de la rue, des milieux d'affaires, des syndicats et des diplomates étrangers Mehdi Jomaâ a été appelé à former un nouveau gouvernement.
Personne ne connaît les opinions de ce technocrate qui occupait jusqu'à présent le ministère de l'industrie. Est-il homme d'argent ? De conviction ? De religion ? Nul ne sait. Il n'est pas partisan c'est le plus important. Il est supposé compétent et pour l'heure, c'est bien suffisant !

Son casting correspond parfaitement au souhait de la population.

C'est un natif du juste milieu : ni Sud, ni Nord, un peu Sahel, mais pas trop. Mahdia, petit port de pêche est la plus belle des cartes postales de Tunisie. La cité est prospère mais elle n'aime pas s'exhiber. Ses habitants, descendants d'immigrés andalous ont conservé de leurs ancêtres les talents de négociants patients. Mahdia, c'est la Tunisie apaisante. Le nouveau chef du gouvernement qui aura pour lointaine et dernière demeure le plus beau des cimetières marins du monde ne peut-être méchant ! D'évidence, ce jour funeste n'est pas pour demain car il est jeune. Pensez, cinquante ans seulement ! C'est un gamin par rapport aux nombreux postulants septua, octo, et même nonagénaires qui se bousculaient au portillon et voulaient imposer à la juvénile Tunisie révoltée une gérontocratie de bavards.

Mehdi Jomaâ est un besogneux, un gagneur de pain, un khobsiste au parcours banal. Il est à l'image de milliers de Tunisiens. Etudes à l'école publique, diplôme d'ingénieur à Tunis. Immigré à l'étranger. Carrière de cadre en France. Jusque là tout est normal. Mais ce père de famille nombreuse parvient à crever le plafond de verre. Il bouscule les X-Ponts de Neuilly et les centraliens de Passy, s'impose à la direction générale du groupe Total et prend les commandes de la division internationale aéronautique et défense. Ce n'est pas rien ! Manager compétent et pragmatique c'est certain.
Nationaliste et ambitieux c'est évident, car il y a neuf mois il abandonne sa carrière dorée pour le poste de ministre sous payé de l'industrie de son pays délabré. Il y a fait son boulot, ne s'est pas trop poussé du col, mais surtout, il a su se faire reconnaître comme le plus capable d'une équipe qui ne l'était pas.
Ses détracteurs l'accusent d'être une taupe des cartels industriels qui convoitent les réservoirs de gaz de schistes et les ressources solaires du pays. On lui reproche aussi sa virginité politique et son absence d'expérience des affaires publiques. Qu'importe, dans la difficile période électorale qui s'annonce et qui mettra les ambitions en ébullition, il est important que le locataire de la Kasbah consacre tous ses efforts à endiguer l'effondrement de l'économie tunisienne.
Ce sera le challenge de Si Mehdi qui présente les stigmates du sauveur d'une Tunisie égarée. Déjà, il porte en son prénom la baraka de son destin : Mehdi, c'est l'envoyé divinement inspiré qui marque la fin des vaches maigres. Jomaâ évoque le rassemblement du vendredi, jour de ferveur. Le peuple inspiré le suivra. Inch'Allah !

Bonne chance à Mehdi Jomaâ nouveau guide provisoire de révolution tunisienne !

samedi 14 décembre 2013

Lama d'Arabie Saoudite



Vous vous rappelez l'histoire de ce lama du Pérou que des jeunes gens avaient distrait de son cirque pour amuser les passagers d'un tramway à Bordeaux. Serge le lama, devenu vedette des réseaux sociaux a monopolisé la une des journaux. Toute la France a ri.

Les Saoudiens aussi se souviennent de Lama. Un fait divers pas du tout drôle celui là.

Âmes sensibles zappez ce post.

Il était une fois un prédicateur barbu qui par trois fois a répété qu'il répudiait son épousée. Alors le divorce a été prononcé au motif que la femme avait enfanté d'une funeste créature prénommée Lama.
La fillette de cinq ans était une diablesse possédée par le démon. Son géniteur gardien de la foi a multiplié les sermons, les invocations. En vain. La gamine sanglotait avec concupiscence, gémissait comme une femelle chaude, « Satan sort de ce corps » hurlait la bête. Battue à briser les os, sodomisée, brulée, l'enfant est transportée par sa mère à l'hôpital. Les larmes aux yeux les médecins se mobilisent. Sept mois de soins pour tenter de conserver le petit corps en enfer. Finalement, un ange est passé qui a emporté Lama au paradis.

Justice,

Policiers, magistrats ont fait leur travail. Les faits ont été minutieusement rapportés et vérifiés. Constats, témoignages, photos, vidéo...L'accusé a reconnu les sévices.
Délibéré, verdict...

L'Arabie Saoudite pratique la peine de mort par la décapitation en public. Pour l'exemple.
Souvent, le vendredi à l'heure de la prière du soir, la police encercle la place des exécutions. Les badauds pris dans la nasse sont poussés à la pointe du bâton. Les étrangers égarés sont placés aux premières loges. Un billot, une incantation, une silhouette blanche que l'on renverse. Tchac ! Déjà le bourreau lave son sabre. Chacun retourne vaquer à ses occupations.
« Bien fait ! » Pensez-vous.
Vous n'y êtes pas !
L'ignoble papa de Lama a été condamné à huit années de prison et six cents coups de fouets. Les juges lui ont sans doute déniché quelques circonstances atténuantes.

Justice et morale,

Récemment un autre fait divers a désorienté le fléau de la balance jurisprudentielle saoudienne.
Une fine équipée de quatre joyeux lurons probablement un peu éméchés, ont dansé nus sur le toit de leur voiture. Un comparse a filmé et facebooké.
Arrestation, inquisition, procès.
Verdict : dix ans de prison, deux mille coups de fouet.

En Arabie Saoudite, il est moins risqué de torturer son gosse que de rigoler entre copains.

lundi 9 décembre 2013

Marzouki et le Livre Noir des pousse-mégots de la presse française




Dans les écoles de journalisme, le nom de Marzouki sera désormais cité comme le référent d'un événement singulier dans l'histoire de l'information. Le Président de la République tunisienne vient en effet de publier les archives commentées des services de la propagande de Ben Ali.

Le dictateur et son détestable ministre de l'information avaient mis en place une machine à bâillonner la presse. Pour le régime policier, il importait que les nouvelles fussent bonnes exclusivement. Le journaliste n'avait de choix qu'entre l'enveloppe ou la prison, le pain ou la faim. Alors, ceux qui ne pouvaient changer de métier palpaient la rançon de leurs petites lâchetés. Ils finissaient par s'en accommoder.
Les quelques résistants ne tenaient pas longtemps. Un seul tint tête. Il faillit la perdre. N'est pas Ben Brik qui veut. Respect.
Les moins téméraires tergiversèrent. Quelques uns firent semblant de se taire, d'autres enfin, pensant à tort que la tyrannie n'avait qu'un temps choisirent l'exil.

El kitab el assoued, le Livre Noir est un volume indigeste de 350 pages qui détaille les rapports tarifés du pouvoir avec la presse. Un billet pour une info, une liasse pour un papier. Y figurent aussi des listes de malheureux bénéficiaires. Bien entendu, les nominés s'insurgent et protestent. Pourtant qui pourrait vraiment les blâmer d'avoir choisi la vie tête baissée à l'honneur tête coupée.
En quelques jours le livre a été téléchargé trois cent mille fois. A l'échelle de onze millions de Tunisiens, c'est tout à fait considérable ! Ceci montre l'appétit de vérité d'un peuple qui veut exorciser les décennies du mensonge institutionnalisé.
Le neurologue Président de la République pense que la révolution ne peut pas se passer ni de la Glasnost ni de Nuremberg. La mise au grand jour des crimes et turpitudes est une nécessité pour rompre définitivement avec l'asservissement généralisé qui perdure insidieusement.
En révélant le peu qu'il peut, Marzouki prend le risque d'initier le grand déballage et de le payer chèrement car il s'est aliéné toute une profession.
Dans un pays aux pouvoirs absents hors celui de l'argent, on verra si la presse vertueuse se réveille.
Déjà, les dénoncés exhibent leurs brevets de bonne conduite de la dernière heure et fustigent l'intempestif et sélectif kitab présidentiel. Ils menacent même de livrer au public les archives de la police politique. Yallah, chiche ?
Curieusement, aucun chroniqueur n'a fait son auto critique, nul n'est venu demander pardon. C'est dommage, car tous seraient pardonnés y compris les inénarrables éditorialistes de « La Presse », « l'Action », « Al Amal » et même « Essabah » le relativement moins servile ; car les lecteurs amusés par tant de bassesses savaient bien qu'ils écrivaient sous l'épaule de la cravache.
Je me souviens des tombereaux de boue déversés sur mon père coupable de fidélité à Bourguiba. Le ministre était à la manœuvre, rectifiant la une des journaux tunisiens, stigmatisant les envoyés spéciaux. "Le Monde" de Jacques Amalric ne fut pas dupe, "le canard" de Claude Angeli non plus. A "Libé" un jeune -qui deviendra grand- se laissa prendre mais aussitôt Serge July par la voix de son avocat me présenta ses regrets. L'hebdomadaire « Minute » fut condamné à une lourde amende pour diffamation. La somme a-t-elle été remboursée par Carthage ? Probablement … !

Fermons cette parenthèse. L'important est ailleurs.Tous les écoliers en journalisme vous le diront.

Le Livre Noir de Carthage permet de mesurer la complaisance de la presse française et son degré de corruption. Car l'agence gouvernementale de la propagande tunisienne avait aussi pour mission de soudoyer les journalistes étrangers. L'argent, le sexe, le chantage, la violence...tous les moyens étaient bons. L'administration de Ben Ali a méthodiquement consigné les faits. La publication de Marzouki ne dévoile qu'une partie de l'iceberg. On attend impatiemment le dépouillement des archives saisies à Paris rue Botzaris au lendemain de la Révolution tunisienne.

En attendant, Marzouki apporte le témoignage que Jeune-à-fric et fric-Asie ont marchandé grassement des reportages laudateurs. Bof, ce n'est pas une surprise, seulement la désolante confirmation de fortes suspicions !
Au surplus, quelques moutons noirs sont épinglés, dont le fameux directeur des Cahiers de brouillon de l'Orient, un thuriféraire patenté gonflé d'importance. Il y a aussi quelques autres plumitifs et des va-de-la-gueule du paysage audiovisuel, éphémères abonnés aux vacances « tout gratuit » de Zarzis et Hammamet. Pas de quoi casser trois pattes à un canard.
Finalement, au bilan du dernier recensement des corrompus de la presse française les archivistes de Carthage n'ont pour le moment, trouvé qu'une poignée de pousse-mégots.
Cocorico !
La profession d'Albert Londres aura bien résisté aux liasses de dinars et d'euros. Mieux, beaucoup ont payé leur indépendance d'une interdiction de séjour, d'une raclée ou d'un coup de couteau comme Christophe Boltanski. Il conviendrait de s'en souvenir !

Holà Marzouki, c'est une chose de dénoncer les ripoux, mais il faudrait peut-être d'abord rendre hommage aux glorieux !

lundi 2 décembre 2013

De Genève 2 à Sawari 3 le fabuleux destin de Hollande en Arabie



« Je veux aider Hollande et les Français ! » 
Cette petite phrase du puissant roi Abdallah d'Arabie pourrait bien valoir à la France des dizaines de milliards d'euros de contrats.
Le doyen des monarques du monde est totalement tombé en amour. Il faut dire que depuis son arrivée à l'Elysée, le Président français a inconditionnellement aligné sa politique arabe sur celle du souverain wahhabite. De Damas à Téhéran, Hollande est plus royaliste qu'Abdallah.

Boudant ostensiblement son allié historique étatsunien, le souverain des deux saintes mosquées encense avec ferveur son nouvel ami européen qu'il entend récompenser avec grandeur. La cour propage qu'il faut désormais traiter les frankaouis avec égard et amabilité. Attentif à sa relation avec le Président français, le roi a récemment missionné à Paris son médecin personnel - qui est aussi son ministre de la santé - pour faire taire les vilaines rumeurs que propageait la petite presse sur son agonie.

Las, Paris n'a pas encore pris toute la mesure de la faveur royale.

Certes, gouvernement et patronat ont sonné la mobilisation. Mais en dehors des 40 groupes du CAC, les industriels marquent peu d'appétence pour une destination dénuée de charme. Nul n'aime vraiment séjourner à Riyad où le temps n'a pas la même horloge qu'ailleurs. La minute dure une heure. Ce n'est pas Dubaï ou Las Vegas ! Alors pour éviter les découchés, ministres, hauts fonctionnaires et PDG multiplient les aller-retour mais en jet privés.
Les exportateurs français négligent leur chance inespérée d'avoir un HEC à l'Elysée. Ils anticipent mal les dividendes de la diplomatie économique hollandeuse.

Pourtant, de gigantesques opportunités se présentent dans tous les domaines. Ainsi la France devrait consolider sa position dans le pétrole et l'eau mais surtout prendre une sérieuse option sur le programme de seize réacteurs nucléaires dont le royaume souhaite se doter dans les quinze prochaines années pour un budget de cent milliards de dollars !

Dans cette perspective, les cranes d'oeuf de la finance gambergent fébrilement un projet d'accord cadre portant sur un mécanisme de compensation « pétrole contre made in France », façon barter britannique Yamamah mais en plus ambitieux. Car redoutant l'éphémère de la lune de miel, d'aucuns souhaiteraient aller jusqu'à sceller l'alliance franco-saoudienne dans le marbre d'un pacte entre François et Abdallah, à la façon de Roosevelt et Abdulaziz Saoud en 1945.

Le ministre de la défense Le Drian, au retour d'un voyage au chevet du roi a sonné la mobilisation du secteur de l'armement. Car dans cette filière l'enjeu est capital. Des prochaines commandes saoudiennes dépendent la poursuite de programmes industriels, la survie de bassins d'emplois et la dotation des armées françaises.

Les armées saoudiennes se distinguent par l'usage de l'achat « clés en main ». Cette pratique est singulière, elle est contraire à celle de tous les autres pays qui acquièrent des sous-sytèmes de provenance diversifiées comme par exemple une carlingue italienne, un module de navigation israélien, un moteur allemand, un armement américain...Les Saoudiens eux achètent une capacité d'emploi, du prêt à à combattre, du tout compris : armement, formation, entretien du matériel, pièces détachées, construction des bases... C'est un peu comme si l'acheteur d'une voiture toutes options incluait dans sa commande une station service et une auto-école.
En contre partie de cette généreuse formule, le royaume saoudien exige de traiter avec un mandataire chef de file et d'avoir la garantie de performance de l'Etat vendeur.

Pour répondre à ce besoin multiforme Paris dispose d'une structure dédiée qui rassemble les principaux industriels de l'armement sous l'autorité d'un représentant du ministre de la défense. En quarante ans, cette équipe a négocié la vente d'un formidable arsenal de véhicules blindés, missiles, avions ravitailleurs hélicoptères... Mais sa principale référence reste la ventes des frégates du programme Sawari 1 et 2 dont les dérives rétro-commissionnées resteront sans doute le mystère le mieux gardé de la cinquième République. L'officine a bon espoir de placer le réassortiment d'une flottille de navires supplémentaires : Sawari 3, pour une poignée de milliards d'euros.

Cerise sur le gâteau, Riyad ambitionne d'accéder au club très fermé de la sous marinade.
A part l'Egypte et l'Algérie, aucune marine arabe n'a la capacité de faire évoluer des sous-marins d'attaque. L'acquisition de ce type d'engin par l'Arabie se justifie surtout par des considérations de fierté nationale car le royaume est bordé d'une part à l'Est par le Golfe persique peu profond donc vulnérable aux submersibles et d'autre part à l'Ouest par la mer rouge, dont la seule menace sérieuse provient des requins et des pirates.
Les opposants au projet soulignent que les ressources humaines du pays et les modestes compétences des forces navales saoudiennes ne lui permettent pas d'envisager un tel bon technologique sans avoir recours à la « coopération » en doublon d'équipages étrangers (français ou pakistanais).
Ces objections opérationnelles ne devraient pas empêcher la conclusion prochaine d'un accord pour la mise en chantier d'une flottille de six à dix sous marins assortis de leurs environnements logistiques. Le projet est gigantesque car il inclut des coopérations industrielles et la construction de bases navales.
Des milliards par dizaine en perspective...

Mais le jackpot saoudien du VRPrésident Hollande n'est que le tremplin d'autres ambitions commerciales régionales encore plus audacieuses.
Ainsi le Rafale n'a sans doute jamais bénéficié d'un contexte politique aussi favorable. L'avionneur-sénateur qui ne brille pas par ses talents d'exportateur saura-t-il saisir l'opportunité unique de déverrouiller le ciel du Moyen Orient massivement doté de chasseurs américains et britanniques ?
La seconde ouverture commerciale des industriels de l'armement français concerne l'accès au marché commun de la défense du conseil de coopération du Golfe ; une organisation qui rassemble les six pétromonarchies du golfe persique. Le GCC a développé un gigantesque projet de protection de son espace pour contrer la menace iranienne et irakienne et tenir les monarchies du Golfe à l'abri d'agressions de toute nature. « Le Bouclier de la Péninsule Arabe » dont la contribution saoudienne est majoritaire est une ligne Maginot des temps modernes qui incluera un mur de missiles infranchissables.
Des milliards encore et encore....
Le Drian ministre, tisse patiemment des liens de confiance avec chacun des rois du pétrole et de l'armement. Déjà, le Saoudien et l'Émirien semblent apprécier le langage breton.

Finalement toute cette diplomatie d'affaires est cohérente avec la volonté politique affichée de restaurer le commerce extérieure et l'emploi. Reste que pour gagner  ce challenge, Hollande président et Le Drian breton devront se prémunir des colporteurs du syndrome Ordralfabétix du nom du célèbre poissonnier bagarreur dont la marée n'est pas très fraîche et qui propage la guerre dans son propre camp. 

jeudi 21 novembre 2013

Arabie Saoudite et Israël, la tentation du Diable



La carte de l'actualité du Monde Arabe affiche un paradoxe désolant. 
D'un côté, toutes les républiques sont ensanglantées, de l'autre toutes les monarchies sont indemnes.
Le sceptre de l'absolutisme garantit la tranquillité de l'Arabie, des Emirats, d'Oman, du Qatar et de la Jordanie. La paix règne sous ces couronnes. 
Aujourd'hui c'est au Maroc de sa Majesté qu'il fait le meilleur vivre arabe.

En moins de trente ans, les référents du Levant ont été laminés. Exit l'Irak, exit le Liban, exit l'Egypte, exit la Syrie, double exit la Palestine. Ceux qui avaient rêvé à l'Umma républicaine vivent le sommet de leurs humiliations. Michel, Salah, Zaki, Gamal et des millions d'autres se retournent dans leurs tombes. Leurs enfants pleurent de honte  !
Mais le comble du comble des révoltes et des révolutions, c'est que le destin qui guide les arabes soit  à présent  entre les mains des Saoud  !

La tribu des sept mille prince et des quarante mille princesses règne sur vingt huit millions de sujets et de serviteurs. Pourtant, en quelques décennies, le pays le plus riche de la terre a vécu la contradiction inouïe d'un retour des idées à l'âge du prophète et de l'accession à la société de l'information. Ainsi, le Royaume des salafistes rétrogrades est celui des accros à YouTub, Twitter Facebook, et autres sms. En marge de la majorité sevrée de religion  de Mac Do et de coca,  la classe sociale la plus aisée a investi dans l'éducation de sa progéniture qui fréquente les meilleures universités étrangères. L'élite saoudienne est aujourd'hui une réalité recensée par dizaine de milliers dans tous les domaines. Petit à petit, le pouvoir du savoir gagne sur celui des princes et des obscurantistes. Ainsi dans l'armée, les rejetons d'altesses royales ont laissé la place à des officiers diplômés de Sandhurst ou de West Point.

L'homme fort du moment est un hybride. Prince de sang royal mitigé, Général d'aviation, diplomate et multi milliardaire. Surnommé Bandar Bush en raison d'une affinité affichée avec l'ancien Président US; c'est le maître incontesté des services secrets du monde musulman.
Deux destins se présentent à lui: celui de roi d'Arabie, celui de roi de la guerre. Comme il est ambitieux, il s'offrira les deux.
Les Britanniques, gens biens informés, affirment que Bandar Ben Sultan aurait passé un accord de coopération militaire avec les Israéliens pour lancer une offensive contre l'Iran. Ce que Riyad dément formellement bien évidemment car la probable réalité est incroyablement extravagante au yeux d'une opinion arabe unanimement anti-sioniste et majoritairement anti-juive.

Selon des géo-stratèges perfides le scénario serait le suivant: Israël bombarderait l'Iran qui riposterait en Arabie par rétorsion d'avoir accordé des facilités aériennes aux attaquants. Les EU et plus modestement la France voleraient au secours du pétrole enflammé. La guerre sera courte. La négociation à chaud (grâce aux Anglais?), cessez-le-feu, promesses de dénucléarisation, promesse d'un Etat Palestinien...
Conséquences post conflit: Bandar héros des arabes, calife du Prophète, et Roi d'Arabie.
C'est simpliste car la guerre est incontrôlable et proliférante.
Mais cet imaginaire reflète la réalité de la coalition Bandar-Barack-Bibi-François, c'est-à-dire et par ordre d'influence entre l'Arabie Saoudite, les USA (pressés par les néoconservateurs et les lobbies sionistes) et Israël flanqué de ses inconditionnels amis socialistes du Crif.

Le Prince Bandar joue avec le feu, il brandit l'allumette d'une déflagration mondiale. Ce qui le rend incontournable à la table de jeu des grands.
A Moscou l'été dernier, pendant quatre heures d'affilées il a affronté Poutine «tu lâches Bachar... je reprends Moubarak....»
Ils ne se sont pas mis d'accord sur un «Yalta arabe» alors en joueur habile, Bandar Ben Sultan a surenchéri la mise. Ses armes affluent chez les rebelles en Syrie, les bombes prolifèrent en Irak et au Liban, les groupuscules salafistes dormants se réveillent aux quatre coins du monde.

Dans cette stratégie du chaos, Vladimir Poutine est tout aussi à l'aise que son rival wahhabite. Il a renforcé l'aide militaire à Damas, proposé un formidable marché d'armement aux Egyptiens, multiplié les rencontres aux sommets avec les Israéliens, les Turcs, les Iraniens. La diplomatie russe est un formidable outil tentaculaire de persuasion qui excelle dans la pratique du billard à trois bandes. Guerre ou paix, Poutine saura toujours tirer les marrons du feu alors il pousse le Saoud dans ses retranchements car il le soupçonne d'esbroufe.

La diplomatie saoudienne gigote dans tous les sens; elle pointe l'Iran, cause avec Tel Aviv et laisse entendre que la bombe atomique du Pakistan pourrait être délocalisée.
Dédaignant le strapontin tournant d'observateur au Conseil de Sécurité, elle exige désormais un siège de membre permanent et il est fort à parier qu'elle l'obtiendra bientôt pour prix «de ses efforts aux services de la paix». En attendant, elle a été élue au Comité des Droits de l'Homme de l'ONU, une élection surréaliste mais qui a valu à Hamza Kashgari, le «Chevalier de la Barre» saoudien d'être  libéré.

Bandar bluffe car il sait bien que son royaume est un coffre fort vulnérable qui ne résisterait pas longtemps aux chalumeaux de quelques commandos de Pasdarans aguerris. Il sait aussi que les forces armées saoudiennes suréquipées seraient bien en peine de manoeuvrer sans l'aide de leurs instructeurs américains britanniques, pakistanais ou français dont aucun n'est disposé à sacrifier sa vie pour du pétrole.
Alors Riyad ressasse l'habituel message apaisant en direction de Téhéran: «jamais l'Arabie n'attaquera un pays musulman! ».

La plus grande incertitude de ce dangereux tour de Mistigri provient de l'Etat hébreu qui a besoin d'entretenir en permanence une posture belliciste. Il dispose pourtant de deux formidables boucliers contre le feu nucléaire de l'islam: quatre millions de Palestiniens et la Sainte Jérusalem.
Mais il possède aussi l'une des plus puissantes armées défensives du monde sous la protection de laquelle les intégristes de Tel Aviv rêvent d'un voisinage implosé façon puzzle dont les miettes seront faciles à asservir, voire à annexer.

Rappelons – ce qui n'est jamais colporté - que l'Arabie Saoudite et Israël ont une frontière quasi commune. Car en effet, seulement quelques kilomètres à la nage les séparent. 
Mais attention, le Golfe d'Aqaba est infesté de requins!

mercredi 13 novembre 2013

La guenon au Panthéon



La banane est le fantasme oblong des obsédés et des détraqués blancs cultivé par les noirs.
Le Banania est la poudre sucrée et chocolatée d'un nègre aux dents blanches et chéchia rouge. Rouge comme le bonnet du primate qui descend de son portique.

Les cendres prochaines qui entreront en grande pompe au Panthéon des grands Hommes seront celles d'une négresse.


Entre ici Freda Josephine...
Tu naquis dans la fange et la misère. A treize ans tu mis aux enchères ta croupe superbe. Les hommes défilèrent et ta famille mangea à sa faim.
Fuyant la haine des blancs tu traversas la mer et t'enfuis vers le pays des Droits de l'Homme où la danse endiablée de tes reins embrasa Paris.
Sur la scène des music hall ta nudité d'ébène stupéfia le public car tu avais ceint en guise de pagne une guirlande de bananes qui pendouillaient sur ta taille. Le comble de l'érotisme!
Tous et toutes te voulaient. Tu te donnas généreusement. Les hommes et les femmes défilaient dans ton lit. Tu les accueillais généreusement en riant.
La négresse, la banane et l'appétit de guenon: tu offris à la foule des mals baisés leur contentement de racisme et de sexe refoulé.
La presse t'adulait, elle exhibait à la une tes seins d'ébène encadrés d'un collier de perles des îles. Sur les grands boulevards tes films «Princesse tam tam», «Zouzou», et ta revue «Nègre» faisaient un tabac. A la radio sur Paris Inter ta chanson fétiche passait en boucle.
Et puis la guerre éclata.


Entre ici Freda Josephine Baker.
Ce nom de Baker, était celui d'un éphémère mari. Il sonnait bien pour les artistes. Alors tu le gardas.
Devenue française tu rejoignis la résistance sitôt que résonnèrent les premiers pas de bottes nazis. Tu devins espionne puis aviatrice. Ta guerre fut héroïque: officier médaillée de la résistance, Croix de Guerre, Légion d'honneur des mains du Général de Gaulle.
A la libération tu repris ta ritournelle: «j'ai deux amours». Le public ému aux larmes t'acclama de nouveau mais ce n'était plus pour ton cul, tes bananes et tes singeries.


Tu refusas les prébendes et les dividendes de la victoire et voulus poursuivre ta lutte. Militante pour l'égalité des droits aux côtés de Luther King, activiste de la Ligue contre le racisme, tu dérangeas les bonnes consciences insouciantes des trente glorieuses.
Mais le plus beau de tes combats sera celui de tes enfants.
Dans un château en Dordogne, tu adoptas une foultitude de gosses abandonnés aux quatre coins du monde. Tu créas une gigantesque famille de frères et sœurs multicolores.
Depuis ton départ il y a maintenant près de quarante ans, tes petits enfants sont centaines qui demain par milliers et millions seront encore traités de singes et de guenons... par des petits cons.

samedi 2 novembre 2013

Tunisie police et Révolution



La peur s'installe car le risque d'attentats est avéré. Le pays est méconnaissable. Il ressemble désormais à un banal pays arabe terrorisé. L'hiver tunisien s'annonce glacé. 

Avec le recul, on s'aperçoit que la révolution n'était que jasminerie. Le peuple a pris la parole, pas le pouvoir.L'assemblée élue souveraine et le gouvernement issus de la majorité n'ont pas été capables de briser le système autocrate devenu pourtant orphelin. 

Dernièrement, la troïka des chefs (Etat, Gouvernement et Assemblée constituante) s'est proprement fait jeter d'une caserne sous les quolibets d'un bataillon de gardes nationaux alignés pour leur rendre "les honneurs". Peu après, un syndicat de policiers lançait un ultimatum au premier ministre. 
Les chancelleries ont interprété les messages comme étant ceux d'un putsch policier consommé.

Insidieusement, en à peine trois ans, le syndrome de Stockholm a gagné toute la classe politique. 

Le Président Marzouki a été incapable d'assoir l'autorité de la République en dehors de Carthage où il s'est incongrûment installé pensant peut-être que les ors du Palais lui vaudraient respect. Plus grave, il a mis un mouchoir sur les convictions qui hier encore donnaient un sens à sa vie de militant des droits de l'Homme.
Le Président de l'Assemblée Ben Jaafar homme brave de dialogue et de compromis n'a pas su rassembler les constituants en force suprême pour conduire la révolution mais il a modéré avec succès l'énergie brouillonne des représentants du peuple.  Accaparés par leur mission "historique" les députés ont oublié de légiférer. Résultat: les mille sept cents lois scélérates, qui régentent l'appareil répressif hérité de la dictature sont toujours en vigueur.
Le Premier ministre Larayedh valeureux rescapé de seize ans de tortures invraisemblables dans les geôles de Ben Ali est un homme admirable car il ne s'est pas vengé. Mais hélas pour gouverner, la grandeur d'âme d'un homme de foi ne suffit pas, il faut être un peu salopard, ce qu'il n'est pas.
Le chef du parti islamiste s'est composé une posture de Calife distribuant des prêches  à ceux qui réclamaient du pain. Il a en outre oublié que les Tunisiens sont des musulmans nationalistes farouchement attachés à leurs traditions et à leurs rites. A trop vouloir exister dans l'éphémère Qatar, Ghanouchi s'est éloigné de l'école Zitounienne de ses ancêtres. L'Histoire retiendra qu'il a permis aux loups wahhabo-salafistes d'entrer dans la bergerie malékite tunisienne.
L'opposition de droite, qualifiée par les islamistes de bourgeoisie francophone s'est rassemblée autour du patriarche nonagénaire Caid Essebsi qui fut ministre de l'intérieur en 1965 ! Les Tunisiens vénèrent les anciens, alors certains vieux abusent de la faiblesse des jeunes!  

Aucun de ces personnages sans charisme n'a révélé de talents d'homme d'Etat.

L'opposition unie de la gauche est martyrisée. Les députés Belaïd et Brahmi qui affichaient la promesse de la relève ont été assassinés.

Régulièrement, la police laisse fuiter une nouvelle liste de menacés. Alors, un climat de peur s'est installé, amplifié par les rumeurs. Rares sont les hommes publics  qui osent traverser la rue sans gardes du corps. 
On est loin de l'époque où Bourguiba faisait sa marche quotidienne dans les rues de Carthage au milieu des badauds et des touristes avec pour unique compagnie celle de son "ministre de la promenade".
Désormais les protecteurs guident les protégés qui sont leurs obligés. Avant d'accepter un ministère, il est prudent de consulter les marionnettistes de l'ombre.
La peur a également réconcilié la population avec la police jadis détestée.Tous se raccrochent à l'espoir que l'uniforme les protégera du chaos.

La machine sécuritaire héritée de la dictature est une force  dont les effectifs sont un mystère: de soixante à deux cent mille hommes selon les sources. Ben Ali avait soigneusement tissé une toile d'informateurs, d'intimidateurs et d'oppresseurs dont il est encore difficile de mesurer l'ampleur. Le pouvoir issu de la révolution a tenté de mettre au pas la police en limogeant une centaine de flics de haut rang, mais elle a conservé la législation "secret défense" qui permet l'opacité absolue de la "boite noire" (en référence à la teinte du blockhaus de l'avenue Bourguiba qui est le siège du ministère de l'intérieur). 
Les récentes déclarations provocantes des syndicats de police qui revendiquent respectivement quarante mille et dix sept mille adhérents prouvent que l'hydre sécuritaire n'est pas étêtée. L'impunité dont bénéficient les tueurs de députés et la nouveauté des attentats suicides attestent pour le moins d'un laxisme inhabituel des forces de l'ordre.

On trouvera des dizaines de raisons à l'escalade de la violence en Tunisie; mais qu'elles s'expriment dans la guérilla des montagnes à la frontière algérienne ou par des assassinats et des attentats dans les villes, tous les criminels  appartiennent à la secte salafiste qui est sous influence doctrinaire et politique de l'Arabie Saoudite où s'est réfugié l'ancien dictateur Ben Ali. Celui-ci, aux dires de ses proches, vient d'être chargé par Bandar Ben Sultan le chef des services spéciaux du royaume wahhabite d'une mission de conseiller "pour la lutte contre le terrorisme en Afrique du Nord". On croit cauchemarder...!

L'appareil sécuritaire tunisien saura t-il s'affranchir des manoeuvres de son ancien chef ?

mardi 22 octobre 2013

L'Arabie Saoudite, un Royaume des ténèbres



C'est le titre de la dernière livraison de René Naba. Rien à voir avec les derniers bestsellers sur le très médiatique et très insignifiant Qatar voisin. L'Arabie, c'est du lourd, difficile à décrypter.

Caché au fond des ténèbres de l'inquisition et de l'horreur, cette monarchie obscurantiste est à l'abri de toutes critiques car elle est la plus riche et donc la plus influente de la planète. Aucun cri de détresse ne parvient jusqu'à Paris, aucun homme politique, aucun philosophe, aucun journaliste, aucune épouse de Président, aucun groupe de bien pensants n'a trouvé le courage de dénoncer ce régime d'insulte permanente aux Droits de l'Homme. 
Le Royaume bénéficie d'une impunité à l'égale de sa richesse: sans limite. Premier exportateur de pétrole, premier importateur d'armes, ce pays est aussi le pôle d'attraction d'un milliard et demi de musulmans auxquels la loi d'Allah prescrit de se rendre en pèlerinage au moins une fois dans sa vie. La Mecque n'est pas un sanctuaire bénéficiant de l'extraterritorialité, elle est la propriété privée de la maison des Saoud qui délivre à son gré le précieux visa d'entrée au paradis.

René Naba est un journaliste rigoureux et intransigeant. En une vie de métier en France et au Levant, on lui cherchera en vain une quelconque faiblesse ou compromission. Ses écrits sont redoutés car la démonstration décalée est toujours implacablement documentée. Il n'est pas du genre à tremper sa plume dans l'eau de rose, ses formulations acides font grincer les dents "non là il exagère" pense-t-on en début de page pour admettre quelques lignes plus loin qu'il a raison. Son livre est bourré de références précises et d'annotations détaillées.
Le musée des horreurs de l'Arabie est unique et les personnes sensibles sont priées de sauter certains paragraphes. Naba aurait pu faire son miel de l'énumération des aberrations effrayantes du Royaume et y consacrer tout son ouvrage, il n'a pas cédé à cette facilité. Il élargit son observation du royaume wahhabite à l'ensemble du monde arabe, aborde avec acuité toutes les incidences à la périphérie de l'Arabie péninsulaire et les imbrications façon poupées gigognes dont les Saoud sont les artisans.

La race des pétromonarques illettrés est en voie de disparition. Au plus vieux roi de la planète succèdera  un "savant" sachant conduire une voiture, lire l'anglais et taper sur un clavier. Les petits-enfants du patriarche régnant connaissent la formidable puissance du Royaume. Auront-ils l'audace de l'utiliser pour émanciper leur pays et lui donner les clés de la justice et de la renaissance des mondes arabes et musulmans ? C'est un espoir secret. Allah karim ! (miséricordieux) Ou à l'inverse seront-ils les géniteurs d'une civilisation de l'obscurantisme et de la violence ? 

Il y a quelques jours, les Saoudiens ont refusé de s'assoir au Conseil de sécurité des Nations Unies. C'est un geste d'une audace inouïe sans précédent dans la diplomatie mondiale. 
Riyad entend protester -non pas contre l'occupation de la Palestine par Israël - mais contre la paix en Syrie !

Pour éclairer un absurde Royaume des ténèbres: René Naba.

vendredi 18 octobre 2013

L'affaire Karachi sur Arte



On retiendra les visages et les mots de la douleur. Ceux de gens ordinaires comme nous. 
Un jour néfaste, il y a dix ans, onze des leurs ont été pulvérisés par 500 kilos de TNT. 
Pourquoi ? 

Le documentaire de Fabrice Arfi tente de documenter. Les interviewés défilent. Aux savants qui ignorent succèdent les ignorants qui font semblant de savoir. Les juges
et les ministres prennent la lumière des caméras. On oubliera vite leur visage et leurs expressions navrées, ils sont interchangeables. 
On retiendra la dignité et le parler vrai d'un rescapé et d'une orpheline. En retrait, les journalistes se taisent.
En demi ton on laisse entendre une musique de corruption qui serait à l'origine du massacre. 
Mais ce n'est qu'une hypothèse !  Le corrompu n'aurait pas touché l'argent du corrupteur alors il aurait lancé un sanglant avertissement. Le corrupteur et le corrompu étaient-ils de mèche par rétro -commissions interposées.
Qui sont les assassins ?

Le constructeur de sous-marins, la Direction des Constructions Navales, arsenal de l'Etat , a mené sa propre enquête mais n'a rien dit aux juges. 
Combien d'ingénieurs de l'armement combien de hauts fonctionnaires au nez pas très propre ? En se taisant ils ont ignoré leur devoir et l'article 40 du code de procédure pénale ? Qui s'en soucie ?
Toute la chaine de commandement s'est évertuée à regarder ailleurs.

Au Pakistan, Ben Laden était un coupable abonné.Mais comme tous les spécialistes démentaient alors diplomatie oblige, à Karachi une poignée de quidams ont été arrêtés, accusés, libérés…Puis l'embrouille s'est internationalisée avec la mise en cause des services de renseignement pakistanais dont une des "factions" afghane aurait pu déraper. 
A Paris on découvrait fortuitement à l'occasion d'une querelle de couple que les intermédiaires saoudiens étaient proches des militaires pakistanais. Autre "surprise", des pots de vin auraient été partagés avec des hommes politiques français. Des gonfaloniers de Sarkozy, Balladur, Léotard ont été mis en examen. Bien entendu, personne dans les milieux de l'armement n'aurait pu soupçonner pareilles turpitudes; d'ailleurs totalement ignorées des services de renseignements. Ben voyons !
En Arabie le backchicheur saoudien désigné eût l'élégance suprême de décéder. Allah yarhamouhou. En compensation, son chambellan parisien endossa le képi d'un mystérieux réseau  "K" dont la lettre était chuchotée dans les cercles d'initiés. L'arabe arrogant et bavard sera mis au trou: il y apprendra à se taire ou à mieux parler !

Retour sur image. Les ministres de la défense de droite et de gauche posent devant la caméra et parlent pour ne rien dire, ils s'arc-boutent sur les principes de confidentialité et de secret de polichinelle. 
Charles Million pédale dans la semoule. 
Alain Richard est pitoyable, la confession douloureuse lui reste au fond de la gorge.  
Un ancien magistrat bredouille. Son successeur sympathique et pragmatique explique que la justice ne peut pas grand chose lorsque l'exécutif est laxiste.

Heureusement, à Cherbourg, un député s'est levé. Il a tempêté et milité pour la vérité. En vain car la chape de plomb du silence n'a pas bougé. Mais récemment le sort a récompensé cet élu vertueux. Il est désormais ministre. Il a pris la place de celui qui avait effrontément menti "dans les yeux" à la République. 
Bernard Cazeneuve est maintenant un homme puissant qui dispose des services d'investigations de tous les circuits de l'argent.

Entre ses mains un double défit républicain: celui de dire qu'un ministre fraudeur est justiciable et que des puissants, complices d'un attentat  par compromission ou omission le sont aussi. 
Cahuzac, Karachi, deux affaires que les électeurs de gauche et de droite ne sont pas prêts d'oublier.

mercredi 9 octobre 2013

Arabie, les dividendes de la guerre en Syrie


Le Drian ministre de la défense a été reçu par le roi d'Arabie. C'est un événement sans précédent dans les usages diplomatiques entre les deux pays. Le monarque saoudien qui ne prisait pas Sarkozy  "cheval fougueux" tient en haute estime François Hollande. C'est un paradoxe extraordinaire que cette lune de miel entre le roi des ténèbres et le Président du pays des lumières. Pragmatisme socialiste oblige Paris s'est allié avec le régime d'Arabie jadis abhorré. Désormais il partage sans réserve la posture interventionniste wahhabite sur la Syrie. Cet alignement de la diplomatie française sur celle de la richissime Saoudie vient de produire un premier retour sur investissement dont bénéficient les exportations d'armements. D'autres fabuleux contrats, mais dans le secteur civil ceux là, devraient être finalisés d'ici quelques semaines en prévision de la visite que doit effectuer le Président Hollande chez le gardien des deux saintes mosquées.

En attendant, le ministre français a signé une commande de 1,3 milliard. Il s'agit d'un avenant au marché des frégates Sawari qui dormait dans les tiroirs depuis vingt ans. Le contrat Roh-Lex concerne la fourniture d'installations par Dcns et la construction d'ouvrages destinés au carénage des navires de guerre à Jeddah. Cette opération sera pilotée par Odas, une société que préside un ancien chef d'état major de la marine nationale dont la filiale infrastructure Sofinfra promoteur du projet a été inopportunément vendue il y a quelques mois à un entrepreneur domicilié dans l'île de Saint-Martin aux Antilles (?)
Un autre contrat devrait être signé dans les prochains jours pour la fourniture à l'Air Defense de missiles Crotale fabriqués par Thales. Cette opération complètera très substantiellement le programme Shahine entamé il y trois décennies. Mdba l'autre missilier français se consolera avec une commande de la Garde Nationale saoudienne. L'ensemble du panier de Le Drian pèse plus de quatre milliards. 

Au delà de ce succès commercial qui fera passer la France de la cinquième à la troisième place des ventes mondiales d'armes, la livraison massive de missiles sol air sur fond de guerre syrienne pose la question de la destination finale de cet arsenal. Le Crotale est un engin sans cesse amélioré qui figure depuis longtemps au podium des tirs au but de toutes les grandes manoeuvres militaires. C'est un tueur d'avions infaillible qui opère depuis des plate-formes de petits camions. L'armée de défense aérienne saoudienne est déjà dotée généreusement de ces systèmes de protection dont la plupart sont d'origine US. On peut se demander si les Saoudiens ne livreront pas in fine les Crotale à l'armée de libération syrienne ? Certes, dans ce cas Riyad se trouverait en contravention avec les traités internationaux sur les ventes d'armes et risquerait théoriquement des sanctions, mais cette menace doit faire sourire les Saoudiens car sans leurs achats, l'économie occidentale de l'armement déposerait le bilan. 
Il se pourrait aussi que ces engins servent à la protection de la base de lancement de missiles balistiques dont les têtes nucléaires pourraient être acquises au Pakistan pour contre-balancer la menace iranienne. Dans ce cas, les jeux et les enjeux seront d'une tout autre dimension.

Avec l'acquisition de Crotale au son des trompettes,  le roi d'Arabie manifeste l'apparence de sa mauvaise humeur vis à vis de son protecteur et fournisseur historique les USA où il a quand même commandé l'an dernier pour plus de trente milliards d'armement. En récompensant la France, il signifie aussi sa volonté de mener une opération militaire indépendante bien que derrière cette attitude de façade, il paraît improbable que la transaction française n'ai pas reçu l'adoubement préalable de Washington. Reste que les intentions de Riyad sont difficiles à discerner. 
En juillet dernier le Prince Bandar, patron des services secrets avait proposé à Poutine de lui acheter des armes par milliards contre l'abandon du soutien de la Russie à Bachar El Assad. 
Cette politique de surenchère à l'armement ne présage pas d'un avenir paisible.  Le plus vieux monarque de la terre qui est un joueur de pétanque assidu semble avoir choisi pour son ultime partie de dégager violemment le cochonnet !

vendredi 4 octobre 2013

Des armes pour la Syrie ?



Le Président Hollande a promis des armes aux rebelles de Syrie. La chose paraît simple, elle ne l'est pas. La France ne produit pas d'armes légères de petits calibres. Ainsi, on cherchera en vain dans son catalogue des pistolets, des fusils, des mitraillettes, des mortiers... le rayon "made in France" est vide. La manufacture de Saint Etienne a livré son dernier fusil il y a quinze ans ! 

Les industriels français aux catalogues impressionnants sont spécialisés dans le haut de gamme. La performance des exportations est loin d'approcher celle des USA et de la Russie mais la France joue dans la même cour que la Grande Bretagne, l'Allemagne et Israel. Le complexe militaro-industriel tricolore excelle dans les trois armes: terre, air mer. Les spécialistes de toutes nationalités reconnaissent la qualité de ses blindés et artillerie, de ses aéronefs et satellites, de ses frégates, corvettes et sous-marins. 
Ces systèmes lourds et très coûteux ne sont pas adaptés à la guérilla syrienne laquelle n'est d'ailleurs pas en peine d'approvisionnement.  Les révolvers, fusils, pistolets mitrailleurs et bazooka sont achalandés à profusion. Pour le quidam, le marché de la Kalachnikov et du lance roquette est tout à fait abordable. Sur les trottoirs d'Alep, un AK 47 se négocie autour de 1 500$ et le premier pack de munitions à 100$ les cent balles est offert. Pour les groupes d'insurgés salafistes du matériel flambant neuf arrive généreusement de Riyad et de Doha en empruntant des circuits mystérieux.
  
Mais ce qui manque surtout pour faire la différence sur le théâtre c'est la technologie. Or, à l'épaulé tué, le missile anti-char français est infaillible, le sol air est un must. 
Pour trente mille euros sans les options, la carapace de protection française permet au fantassin de tout voir et de tout entendre. Le combattant est dans une bulle façon Tintin sur la lune. 
Hélas pour elle, la rébellion syrienne ne peut pas importer ces armes modernes car celles-ci sont tout bonnement interdites à l'exportation. Et le Président de la République aura beau taper du pied, les missiles français resteront sur les étagères faute d'autorisations.

Car en dehors des armes légères répliquées à des millions d'exemplaires et diffusées clandestinement sur toute la planète par d'habiles marchands de morts, la commercialisation des armements sophistiqués est drastiquement réglementée. Ainsi, toute exportation française  est soumise à autorisation préalable du gouvernement, lequel est lui même inféodé au feu vert de chacun des pays de l'Union Européenne. Entre autres règles, la communauté internationale limite les autorisations d'achats aux seuls Etats reconnus vertueux par l'ONU. Bien entendu la réexportation vers les pays tiers est interdite et la traçabilité des armements est assurée par les rivalités du marché. Il y a bien des moyens détournés, mais il ne faut pas se faire piquer comme les italiens en Libye car cela fait mauvais genre dans les conférences internationales.

Si certains missiles bricolés peuvent se vendre à la sauvette, ce n'est pas le cas des vecteurs français dont l'efficacité meurtrière laisse une signature. En outre, la technicité des systèmes performants induit des conditions de stockage et d'utilisation réservés à des soldats ayant reçu une formation adéquate. Dans ces conditions, on voit mal comment les industriels français pourront, en dehors d'un engagement internationalement validé se prévaloir du label opérationnel "Syrian combat proven". 
Reste que par ses incantations, le Président français aura bien mérité, car sa campagne de promotion a doublement séduit les exportateurs du secteur de l'armement et leur principal client l'Arabie Saoudite.

mercredi 2 octobre 2013

L'arabe



C'est la seconde langue de la France. Elle est usitée dans les familles, dans les cages d'escaliers, dans les quartiers. Elle domine dans les banlieues, dans les prisons. Pourtant, elle n’est pas enseignée à l'école primaire, elle est marginalisée au lycée, elle est réservée à une élite à l'université. 
L’arabe en France est la langue des sous-scolarisés et des savants.

L’éducation nationale la considère comme une langue étrangère alors qu’elle fait partie intégrante du patrimoine culturel de millions de français. Pire, elle est poussée au rang de langue liturgique ou savante au même titre que l’hébreu, le provençal, le chti ou le patois bérrichon. 

Un boulevard pour les intégristes qui proclament : "pour savoir l'arabe, apprenez le Coran !" 
Un pétard à mèche lente pour le FN qui va un jour se pencher sur les ELCO et autres aberrations du système éducatif national.

Sacralisée ou bougnoulisée, cette langue n'est ni un facteur de valorisation ni une promesse d’ascension sociale. Pas de TV française publique en arabe (sauf quelques heures sur France 24 qui émet surtout à destination de l'étranger), à quelques rares exceptions il n'y a pas de radio laïque sur la bande FM ! La plus forte audience, Radio Orient lance cinq fois par jour l'appel à la prière !  Le PAF en arabe c’est 400 chaînes satellitaires parfaitement dés-identitaires. Le Français arabophone absorbe insidieusement la « vision » des monarchies et des dictatures orientales. Il devient malgré lui « concerné » par des préoccupations étrangères à sa nation. Il est dé-francisé à son insu. Il est « conditionné » à se passionner pour Algérie-Egypte alors qu’au fond de lui-même il vibrerait plutôt pour « Guingamp-Sochaux ».

L’espace culturel: édition, presse écrite, publicité, spectacles est inexistant ou importé parcimonieusement. L’Institut du Monde Arabe est trop souvent une vitrine des arts islamiques alors qu’elle devrait être la maison de la langue et peut-être essaimer sur le territoire. 

Quel sera le paysage linguistique dans 20 ans ? Cette langue dite morte aura alors une audience unique au contenu sacralisé incontrôlable. On ne dira plus « Bonjour » mais « que tu sois béni de Dieu et de ses apôtres ». On ne saura plus dire « au revoir » (ila lika) mais « Dieu est avec toi » Toutes les phrases seront ponctuées de bondieuseries. Cette dérive de la langue est observée depuis quinze ans dans le monde arabe (depuis la déliquescence des régimes nationalistes et laïcs arabes : Egypte, Irak, Yémen et dans une moindre mesure Tunisie, Algérie, Liban, Syrie). Il s’en ressent une main mise du dogme sur la pensée et sur le comportement quotidien d’une partie de la population française. Est-il possible d’être Français et penser Voltaire, Sartre ou Vialatte en langue arabe ? La réponse paraît affirmative puisque l’arabe est un vecteur de pensée comme toutes les langues, en réalité sa sacralisation et sa régression à la mode du 14ème siècle ne lui permet plus d’aborder avec neutralité les concepts républicains de la France d’aujourd’hui.

L’éducation nationale n’a pas anticipé le mouvement, elle est aujourd’hui dépassée. Pourtant Paris a produit bien plus de savants dans cette langue que la plupart des pays arabes. Mais l’arabe est devenu la langue des terroristes. Dans l’administration, son apprentissage est encouragé seulement dans la police et chez les gardiens de prisons.

Laisser une langue devenir l’arme d’un mouvement de pensée c’est prendre le risque d’une fragmentation politique. Tenter d’éradiquer son usage par la suspicion et la répression, c’est précipiter de mouvement car on ne tait pas une langue.
(texte publié en déc 2009)

samedi 21 septembre 2013

Vers la déconfiture de la France en Syrie



Hélas, diplomatiquement et militairement la France s'est laissé piéger.
On imagine le tollé international qu'aurait soulevé une coalition uniquement composée des Etats Unis et de l'Arabie Saoudite. Il fallait à la conjuration un compère de moralité, un indigné patenté, un tampon socialiste pacifiste droit-de-l'hommiste. 
Ballot, le Président français, sans doute instrumentalisé par le jeu de malice des Saoudiens et des Israéliens, s'est empressé de remplir la fonction. Les bleus du Quai d'Orsay n'ont rien vu venir; ils se sont abstenu de poser des conditions. Maintenant, il est trop tard pour faire machine arrière et le dégagement diplomatique vers l'Iran qui s'amorce permettra tout juste de temporiser. Reste que la facture risque d'être salée.
Car la table de la diplomatie française a proprement été renversée!

Dans le monde arabe, la fracture est consommée. Désormais, la chose est entendue et répétée: Paris est inféodé. Oubliée la posture de De Gaulle dénonçant l'arrogance israélienne, balayée la main tendue de Giscard aux Palestiniens, révolue la politique équilibriste de Mitterrand, effacée l'audace de Chirac, amnésiées les bizarreries de Sarkozy. Désormais France USA c'est kif kif. La posture du médiateur ami de tous est révolu. Les accrédités du corps d'Orient sont discrédités.
A Pékin, nos plénipotentiaires rament, à Moscou, ils plongent, partout ailleurs, ils tentent d'expliquer en apnée que Paris reste la capitale d'une nation libre et indépendante dont l'influence dépasse largement les faubourgs de Bamako. A l'Assemblée Générale des Nations Unis, les pays en espoir de développement et les pays émergents ricanent. A Bruxelles, les piliers fissurés de l'Union Européenne menacent de s'effondrer; celui de la Politique Etrangère et de Sécurité Commune (PESC) est ébranlé, l'Europe de la défense est une histoire ancienne oubliée, la force européenne d'action rapide est une galéjade du siècle passé.

Qu'importe, sous les ors des Palais hypothéqués de la République Française l'illusion de la grandeur demeure. Le conseil de sécurité, le véto, l'arme nucléaire, autant de dissuasions inopérantes qui servent encore de prétextes pour parader et confondre offensive militaire et défilé du 14 juillet.
L'Elysée fébrile tonne et gronde mais le porte-avion reste à quai. L'aéronavale qui n'est pas en capacité de «punir» sans l'assistance d'Israël et de l'US Army attend le feu vert pour appareiller. Sur zone, quelques centaines de matelots patientent en faisant des ronds dans l'eau. Des chasseurs bombardiers sont pré-positionnés en méditerranée. 

Le scénario est au point: quelques Rafales iront larguer des missiles Scalp «fire and go» à bonne distance des côtes syriennes.
L'armée française est surtout crédible au sol. Elle excelle dans le sale boulot, celui de risque-sa-peau. Comme en Bosnie et en Afghanistan. En Syrie, à l'inverse de la Libye et du Mali, les opérations ne se limiteront pas à quelques canonnades à distance. Il faut s'attendre à encaisser les coups qui viendront en retour. Les combats au sol seront inévitables et contrairement aux Américains qui sous traitent aux armées privées (Blackwater/Academi) et aux Saoudiens qui disposent d'un réservoir de Pakistanais, l'armée française n'a ni mercenaires ni supplétifs à sacrifier. A moins que le Tchad et le Mali...

La guerre zéro mort étant illusoire, Paris et Tel Aviv évaluent le nombre de victimes que son opinion est prête à supporter. Le pouvoir syrien fait exactement le même calcul. Il prépare sa riposte en conséquence sachant que quelques centaines de victimes suffiront à faire lever les pouces des attaquants. Car en dehors des révoltés syriens, des moujahdines fanatisés et des révolutionnaires hachichés, qui est prêt à mourir pour la Syrie? Même à très bon prix car l'argent n'est pas un problème depuis que l'Arabie s'est engagée à couvrir l'intégralité des dépenses de guerre: «without any limit» a précisé le ministre salafiste. 

Mais, la population française en majorité hostile à l'engagement de Hollande ne supportera pas la vue d'une goutte de sang et il est à craindre que dans l'hexagone, la guerre consolidera une alliance de circonstance entre la droite parlementaire, une partie de la gauche et même le Front National!
La perspective de sortie de crise s'annonce donc avec un retour sur investissement négatif. Car après le cessez le feu, la mise en accusation de Bachar, la construction des murs d'une Syrie fractionnée en ruine... 
In fine, au terme de la pantomime diplomatique et sanglante, qui sera le dindon de la farce?