dimanche 22 août 2021

La "guenon" au Panthéon

La banane est le fantasme oblong des obsédés et des détraqués blancs cultivé par les noirs. Le Banania est la poudre sucrée et chocolatée d'un nègre aux dents blanches et chéchia rouge. Rouge comme le bonnet du primate qui descend de son portique. Rendons gloire à l’intelligence de Macron, les cendres prochaines qui entreront en grande pompe au Panthéon des grands Hommes seront celles d'une négresse.

Entre ici Freda Josephine... Tu naquis dans la fange et la misère. A treize ans tu mis aux enchères ta croupe superbe. Les hommes défilèrent et ta famille mangea à sa faim. Fuyant la haine des blancs tu traversas la mer et t'enfuis vers le pays des Droits de l'Homme où la danse endiablée de tes reins embrasa Paris. Sur la scène des music hall ta nudité d'ébène stupéfia le public car tu avais ceint en guise de pagne une guirlande de bananes qui pendouillaient sur ta taille. Le comble de l'érotisme! Tous et toutes te voulaient. Tu te donnas généreusement. Les hommes et les femmes défilaient dans ton lit. Tu les accueillais généreusement en riant. La négresse, la banane et l'appétit de guenon: tu offris à la foule des mals baisés leur contentement de racisme et de sexe refoulé. La presse t'adulait, elle exhibait à la une tes seins d'ébène encadrés d'un collier de perles des îles. Sur les grands boulevards tes films «Princesse tam tam», «Zouzou», et ta revue «Nègre» faisaient un tabac. A la radio sur Paris Inter ta chanson fétiche passait en boucle. Et puis la guerre éclata.

Entre ici Freda Josephine Baker... Ce nom de Baker, était celui d'un éphémère mari. Il sonnait bien pour les artistes. Alors tu le gardas. Devenue française tu rejoignis la résistance sitôt que résonnèrent les premiers pas de bottes nazis. Tu devins espionne puis aviatrice. Ta guerre fut héroïque: officier médaillée de la résistance, Croix de Guerre, Légion d'honneur des mains du Général de Gaulle. A la libération tu repris ta ritournelle: «j'ai deux amours». Le public ému aux larmes t'acclama de nouveau mais ce n'était plus pour ton cul, tes bananes et tes singeries. Tu refusas les prébendes et les dividendes de la victoire et voulus poursuivre ta lutte. Militante pour l'égalité des droits aux côtés de Luther King, activiste de la Ligue contre le racisme, tu dérangeas les bonnes consciences insouciantes des trente glorieuses.

Mais le plus beau de tes combats sera celui de tes enfants. Dans un château en Dordogne, tu adoptas une foultitude de gosses abandonnés aux quatre coins du monde. Tu créas une gigantesque famille de frères et sœurs multicolores. Ton combat n'est toujours pas gagné car depuis ton départ il y a maintenant quarante cinq ans, tes semblables sont encore traités de singes et de guenons par des petits cons qui n’entreront jamais au Panthéon.

mardi 3 août 2021

Tunisie, demain tout est possible !

 « Ce n’est pas à mon âge que je vais entamer une carrière de dictateur ! ». Parodiant de Gaulle, Kaïs Saïed a voulu rassurer Vivian Yee du New York Times qui venait d’être retenue contre son gré pendant trois heures dans un commissariat de police. La télévision a montré la journaliste  sagement assise dans un salon devant le Président tunisien qui a longuement monologué sans lui permettre de poser une seule question. L’avant veille, le directeur de la radio télévision nationale avait été limogé et tous les correspondants d’Al Jazeera  avaient été expulsés manu militari de leurs locaux. Le signal est clair: la liberté de la presse est désormais sous surveillance.

Un représentant du peuple a été arrêté à son domicile  dès potron-minet. Élu des Tunisiens de l’étranger (circonscription d’Allemagne) il se croyait - comme en Europe - tout permis ! Il  avait eu l’audace il y a trois ans de critiquer l’armée alors qu'il est fils d'un colonel martyr de la révolution. Un tribunal l’avait condamné à la prison. Son immunité parlementaire ayant été levée par décret présidentiel du 25 juillet il est devenu le premier prisonnier d’opinion du « jour d’après ». L’avertissement est sévère:  l’armée c’est sacré, nul n’est à l’abri de la justice militaire, quiconque osera un soupir ou un sourcil levé sera sanctionné. Qu’on se le dise !


Ajoutant aux restrictions de circulation imposées par la pandémie, les autorités ont interdit à tous les élus, aux grands fortunés et aux hauts fonctionnaires de voyager à l’étranger. Nul ne sait vraiment qui est concerné. Pour le savoir, il faut se présenter à la police des frontières de l’aéroport juste avant d’embarquer… éventuellement. Une ancienne députée co-fondatrice  de l’Association des femmes démocrates a été à deux doigts de manquer son avion.


Ces indices inquiétants présagent l'avenir d'un régime musclé. Tout comme ils avaient célébré le coup d’État du 7 novembre 1987, les convertis de la dernière heure flattent outrageusement le recours aux pleins pouvoirs constitutionnels du 25 juillet 2021. Dans les rues de Tunis, les cortèges d’encenseurs se multiplient. Pour autant, tout comme la critique, Carthage ne semble pas priser la flagornerie. Les Saïedolâtres qui espéraient un rapide retour sur investissement restent pour le moment sur leur faim.


Vues de Washington, les entorses aux libertés publiques qui éclaboussent l’unique démocratie arabe sont inacceptables, mais en contraste, le peuple tunisien d’un naturel optimiste attend la contre-partie positive de cette rupture. Il évalue le bilan de dix ans de liberté payé d’injustices et de pauvreté. Il enjolive le souvenir du prix du pain sous les dictatures du siècle passé, il culpabilise d’avoir osé gouverner tout ce temps sans zaïm. L’homme de la rue pense que Saïed va mettre fin à ses difficultés quotidiennes et lui livrer des têtes à couper; faute d’avoir pris son destin en main, il croit avoir trouvé celui qui va restaurer la révolution dévoyée. 


Après l’appel au secours lancé par les autorités, les vaccins et les respirateurs ont afflué de tous les pays. Cette générosité devra rapidement être complétée par des crédits financiers au prix de contreparties de souveraineté. Pour l’instant, les bailleurs institutionnels évaluent la pérennité du nouveau régime au regard du scepticisme prudent affiché par les capitales occidentales.  La loi américaine interdit l'aide étrangère à tout pays dont le chef de gouvernement dûment élu est destitué par un coup d’État; alors les juristes de la Maison Blanche sont au travail, mais ça prendra un certain temps. Les Émirats Arabes Unis, l’Arabie, l’Égypte... applaudissent mais sans ostentation, et les frères maghrébins de leurs côtés affichent une solidarité de voisinage. Tous tardent à mettre la main à la poche. Ils attendent la nomination d’un ou d’une Chef.fe du Gouvernement - qui sera de facto le ou la porte-parole du Président Saïed - avant d’entamer les marchandages. 


Depuis l’indépendance de la Tunisie, aucun chef de l’État n’a disposé de pouvoirs aussi élargis que ceux de Saïed. Bourguiba puis Ben Ali devaient composer avec l’opposition, l’entourage, le parti, l’opinion de l’étranger… mais Kaïs Saïed semble imperméable à toute influence. C’est un homme d’une rigidité confondante en posture et en verbe qui apparaît dénué de capacité d’écoute et de dialogue. Rien ne semble pouvoir infléchir la détermination de sa doctrine confuse qu’il exprime par jets de phrases sentencieuses. Nul n’est capable de deviner sa feuille de route. 

L’ancien professeur de droit s’est servi de la puissance constitutionnelle pour stériliser la constitution et tracer une impasse juridique dont il est seul à connaitre l'issue. Gouvernement et parlement ont été neutralisés « provisoirement ». La tricéphale démocratie tunisienne a perdu deux têtes. Mais pour le cas où la rescapée serait empêchée à son tour qui la remplacera à Carthage ? Selon l’article 84 de la constitution et en absence de chef du Gouvernement, c’est le président de l’Assemblée des représentants du peuple qui sera « immédiatement investi des fonctions de Président de la République ». Par conséquent, l’islamiste Ghannouchi, - âgé, malade, contesté par les siens - pourrait succéder à Saïed. C’est de la fiction. Mais comme depuis une décade la Tunisie cumule les combles et les improbabilités, demain tout est possible !



https://www.businessnews.com.tn/la-reporter-du-new-york-times--kais-saied-ne-ma-pas-permis-de-poser-une-seule-question,520,110773,3

https://www.france24.com/fr/afrique/20210730-tunisie-le-d%C3%A9put%C3%A9-yassine-ayari-critique-du-pr%C3%A9sident-ka%C3%AFs-sa%C3%AFed-a-%C3%A9t%C3%A9-arr%C3%AAt%C3%A9

https://lib.ohchr.org/HRBodies/UPR/Documents/Session27/TN/6Annexe4Constitution_fr.pdf