jeudi 29 décembre 2016

Bilan imaginaire de l'année à venir

En cette fin d'année 2017, les médias ressassent la rétrospective des douze mois écoulés fertiles en surprises. Mais ce n'est pas Trump, ni Poutine, ni Erdogan, ni même Le Pen qui font la une des magazines, mais Abdelfoulan al Faradi le tout récent Prix Nobel de la Paix, que la cascade de révolutions arabes a hissé en quelques mois à la tête de l'Arabia.
La naissance du nouvel état pluriel composé de 22 pays désormais fédérés, est assurément l'événement historique majeur de l'année 2017.
Pourtant saluée et applaudie par l'ensemble de la communauté internationale, la communion du Moyen-Orient, du Levant et de l'Afrique du Nord a singulièrement été accueillie avec bellicisme par l'État hébreu qui a maintenu la mobilisation de ses réservistes, en dépit des déclarations conciliantes des nouveaux dirigeants arabes démocratiquement élus, dont le programme se résume aux trois mots scandés par la foule dans les cortèges des métropoles de l'Oumma: karama, khobz, adala, dignité, pain, justice.

En France, la décision de la Présidente Le Pen de décréter au lendemain de son élection, le blocus sur les Comores - désormais composantes unies de l'Arabia - au prétexte de « mettre un terme à l'invasion de la terre française de Mayotte par des hordes d'Arabes » a soulevé l'indignation de l'opposition et entrainé des manifestations dans toutes les villes de France. Les incidents graves et les rafles massives dans les banlieues ont radicalisé le mouvement de protestation qui a pris une tournure insurrectionnelle menaçant la paix civile.

En conscience, et après avoir dénoncé un complot raciste, le Raïs de l'Arabia, s'est adressé depuis Tunis aux arabes de France: « Si vous voulez rester arabes et que vos enfants et vos petits enfants restent arabes, vous devez quitter la France et venir vous installer en Arabia....Ce n'est pas votre pays, ce n'est pas votre terre, quittez la France et venez en Arabia » a t-il martelé.
Un plumitif facétieux en quête d'inspiration et pour distraire quelques lecteurs, a noté que le ministre israélien de la défense l'ultra arabophobe Avigdor Lieberman avait jadis employé exactement les mêmes mots pour stigmatiser « l'antisémitisme et les attentats contre des cibles juives en France ». C'était le 26 décembre 2016, il y a un an !

La déclaration du Raïs Abdelfoulan a provoqué en France un séisme dont nul ne peut encore prédire les conséquences. Gouverner c'est prévoir. Hélas, aucun(e) politique n'avait imaginé ce scénario catastrophe qui pourrait bien se révéler plus calamiteux pour l'économie française que l'implosion d'une centrale nucléaire et le débordement de la Seine. Selon le patronat, qui n'a pas été démenti par Bercy, le PIB du pays pourrait chuter de cinq points, ce qui est sans précédent depuis la débâcle de 1940. La bourse dont les cours avaient été suspendus a repris ses esprits et limité ses pertes grâce aux achats massifs d'actions adossées à l'emprunt à taux négatif garanti par l'état économique d'urgence.  Le ministre des finances a annoncé que le plafond des retraits en espèces serait relevé mais que le quitus fiscal restait obligatoire pour quitter le territoire. Il a précisé que les sociétés n'étaient pas concernées par ces restrictions  tout en qualifiant « d'extravagant » le chiffre d'un million d'entreprises impactées par l'exode massif des arabes de France. Le ministre de l'intérieur a pour sa part, contesté le chiffre de 500 mille départs liés à l'Arabxit, insistant sur le fait que l'immense majorité des « musulmans de retour sur leur terre d'origine » étaient des émigrés et des sans papiers. Les « Français fuyants sont des faux Français » a t-il ajouté. La formule est depuis devenue un slogan.

Au cours de son allocution traditionnelle de vœux à la nation télédiffusé depuis le Palais de l'Élysée, la Présidente a qualifié l'appel du Raïs de décision souveraine ; elle a invité les Français « de souche, de culture et d'adoption à se réjouir du bon coté des choses » avec notamment la multiplication des emplois et des logements vacants.

Bonne année quand même !

vendredi 23 décembre 2016

L'Arabie Saoudite en capilotade


C'est un fait insignifiant, mais qui additionné à d'autres passés pareillement inaperçus, laisse présager des bouleversements imminents au Moyen-Orient.
Le vice prince héritier d'Arabie, Mohamed Ben Salman, fils du roi, ministre de la défense et de l'économie a fait le pied de grue à Paris pour être reçu par François Fillon qui l'a impoliment éconduit. Il faut dire que les Saoud mal inspirés, avait ostensiblement soutenu Juppé et Sarkozy. Pour autant, la posture du nouveau leader de la droite française n'est pas singulièrement vertueuse, elle est opportuniste et solidaire de la bronca internationale qui isole désormais le royaume salafiste du reste du monde. À l'aube de l'année nouvelle les vœux sincères d'éviction du roi Salman et de son fils Mohamed semblent faire l'unanimité.

En l'espace de quelques mois, la cote diplomatique du royaume obscurantiste a chuté de façon vertigineuse. Ceux qui depuis des années dénoncent inlassablement l'indécence de ce régime féodal « source du venin qui empoisonne le monde » ne peuvent que se réjouir de cette prise de conscience collective tardive.

En septembre dernier, le fringant prince saoudien Ben Salman était encore l'un des hommes les plus puissants de la planète. Après une tournée aux Etats Unis où il avait multiplié les risettes et les emplettes, il avait recueillit en survolant l'Europe l'hommage de ses Chefs d'États. Puis il avait été reçu sur les tapis rouges de Chine. Enfin, consécration suprême, l'empereur du Japon en personne lui avait accordé l'honneur rarissime d'une audience. De retour à Riyad, Mohamed avait rassuré son roi de père qui s'inquiétait des velléités états-uniennes de faire payer à l'Arabie la plus gigantesque ardoise de tous les temps : celle des dommages du WTC du 11 septembre 2001. Le jeune Salman pensait alors avoir mis les USA et tout le G 20 dans sa poche.
À l'époque, il était acquis que Mme Clinton serait élue et l'Arabie ne ménageait pas ses contributions à la candidate, finançant avec générosité le parti démocrate et les associations d'électeurs arabes. Patatrac ! Echec sur toute la ligne.
Obama n'est pas parvenu à empêcher le congrès de voter un droit de suite à l'indemnisation des victimes du 9/1, et c'est Trump qui a été élu. Les saoudiens ont par conséquent courtisé les adversaires de leurs alliés historiques pour rien ou plutôt pour le pire ! Car les républicains ne sont pas près d'oublier cette forfaiture. Donald Trump a promis de faire bouffer aux Saoud leur kéfié. Entre suzerain et vassal la trahison appelle le jugement au choix du sabre ou du peloton d'exécution.

L'Arabie dont la famille Saoud s'est appropriée le nom et la propriété, n'est qu'un confetti de 10 millions de sujets mâles, autant d'objets femelles et autant de serviteurs étrangers. Au total 30 millions d'âmes en recherche d'humanité et de justice qui vivent au quotidien la peur de transgresser les innombrables interdits dictés par une caste de 7000 altesses. 
L’Arabie est un État vulnérable qui ne dispose d’aucune alternative à la coopération US dans les domaines du pétrole, de la défense, de la sécurité, des transports, et même de l’eau…Sans les cadres occidentaux omniprésents dans tous les secteurs vitaux, le pays ne pourrait survivre trois semaines.

Au plan international, en dehors de quelques affinités d'intérêts éparpillés dont celle de la France à durée limitée, l'Arabie Saoudite n'a plus d'alliés politiques.
L'offensive génocidaire lancée il y a dix huit mois contre le Yémen a été la faute suprême commise par des Salman père et fils.
Les grandes nations musulmanes pourtant traditionnellement solidaires se sont détournées  malgré les milliards donnés: ainsi les Pakistanais, puis les Egyptiens. Seuls les fragiles Emirats Arabes Unis voisins n'ont pas pu se défausser, alors que l'exemplaire petit le sultanat d'Oman restait à l'écart, proposant même sa médiation. Quant au Maroc et à l'Algérie, ils se sont évertués à ne pas mettre un pied dans le guêpier. En Europe, l'opinion scandalisée par l'ampleur des massacres s'est finalement mobilisée. Les Suédois, les Suisses, les Allemands ont annulé en cascade leurs ventes d'armements. En Amérique, les Canadiens ont tergiversé sans gloire pour honorer une commande de 15 milliards de blindés ; mais le mois dernier, les USA à leur tour, ont suspendu leurs livraisons de bombes et gelé l'assistance d'une centaine de coopérants militaires avec le commandement des opérations de l'armée aérienne saoudienne clouant au sol la plupart des F16 et des Tornado. Au train où vont les choses, il se pourrait bien qu'une miraculeuse contre offensive du Yémen réconcilié redessine la carte de l'Arabie !

Entre les milliardaires Trump et Saoud, le règlement de comptes sera titanesque, simpliste et inégal. Le pétrole m'appartient dira l'un. Sans ma protection tu n'es rien dira l'autre. Je répandrai sur tes terres la bactérie salafiste menacera l'arabe, je te rendrai pécuniairement responsable de tous les attentats dans monde répliquera l'américain.
Le New Saudi Deal qui amendera le Pacte Quincy ne sera pas négociable. Trump prendra le pétrole et limogera sans doute quelques gardiens de la concession. Chassera-t-il la dynastie tout entière ? Plus probablement il exigera d'elle un roi nouveau, moins sectaire, plus moderne, moins dévoyé, plus présentable et cela va sans dire, totalement soumis. Ordonnera-t-il au surplus l'arrêt du prosélytisme de l'international salafiste dont les Etats Unis se sont si longtemps accommodés ? Là est toute la question.

On se souvient que quelques mois après son élection le Président Barack Hussein Obama prononça en juin 2009 au Caire un discours mémorable sur l'islam. Dans la salle, un auditeur égyptien enthousiaste, qui pressentait peut-être l'espoir d'un printemps arabe, hurla : « je vous aime ! » Donald Trump lui, parlera sur un autre ton. Et la nation musulmane à l'unisson marmonnera « je vous hais ! »


vendredi 25 novembre 2016

De Fillon à Ben Salem, le combat du salafisme à Paris, Djakarta et Tunis


« L'Islam radical est en train de gangréner une partie de nos concitoyens musulmans. Je veux la clarification de nos relations avec l’Arabie saoudite et le Qatar qui abritent les penseurs de l’Islam radical... Depuis longtemps, je dis qu’il faut faire face au risque d’une guerre mondiale provoquée par le totalitarisme islamique. Ce totalitarisme est comparable au nazisme. Il étend son ombre sur des territoires de plus en plus vastes du Sud Est asiatique jusqu’à l’Afrique occidentale. » discours de François Fillon.

Il était prévisible que l'Islam soit au cœur des débats pour les présidentielles. Coupant l'herbe sous le pied du Front National, François Fillon a posé le problème de la contamination des musulmans de France par une idéologie fasciste pseudo religieuse universellement diffusée par l'Arabie Saoudite. Depuis vingt ans, les observateurs indépendants dénoncent ce danger enfin devenu une évidence pour tous: le prosélytisme des fondamentalistes wahhabites menace la paix dans le monde. L'Islam, seconde religion de France, première communauté musulmane de l'occident ne sera pas épargnée. Les signes précurseurs d'une tempête meurtrière se multiplient. En voici deux exemples l'un est aux antipodes, l'autre est à notre porte.

En Indonésie, la fragile démocratie est en voie d'éradication. Cet archipel de 17 mille îles est une mosaïque culturelle de 250 millions d'habitants où la liberté des six religions est garantie par la constitution. Mais les musulmans dominant à 87%, traditionnellement paisibles, sont méthodiquement influencés par les salafistes violents. D'années en années, l'intolérance est en train de contaminer la société. Principales cibles : les minorités chinoises et chrétiennes.
L'emblématique Gouverneur de Djakarta Basuki Tjahara Purnama  cumule ces deux handicaps. De surcroît, étant parvenu à remettre un semblant d'ordre et de justice dans cette métropole grouillante de 30 millions d'habitants, sa réélection en février prochain était jusqu'à présent donnée pour acquise. C'était sans compter avec les mafias islamo-fascistes qui ont réussi à le faire inculper de blasphème et lui interdire de quitter le territoire national. Le crime de cet homme que la rue surnomme familièrement Ahok, est d'avoir publiquement déclaré que rien dans le Coran n'interdisait à un musulman de voter pour un non musulman. Les obscurantistes ont crié au scandale. « Un musulman ne peut élire qu'un musulman » ont scandé des dizaines de milliers de manifestants ignorants. Ahok s'est excusé publiquement. Il a multiplié les gestes d'apaisement, il s'est même rendu dimanche dernier à la mosquée. Les musulmans démocrates le soutiennent, mais comment contenir la hargne des salafistes qui trouvent là le prétexte rêvé pour entamer le processus d'exclusion des minorités de leur citoyenneté. L'Arabie Saoudite qui finance depuis vingt ans à coup de milliards le prosélytisme en Indonésie est sur le point de remporter une victoire éclatante vers l'islamisation radicale du plus peuplé des pays musulmans.

Simultanément, en Afrique du nord, on assiste pareillement à l'occultation du savoir par les hommes des ténèbres.
À Tunis, l'école islamique de la Zitouna est une honorable institution fondée en 737 soit cinq ans après la mort du prophète. C'est la plus vieille université du monde ! Les zitouniens que Bourguiba et Ben Ali avaient quelque peu muselés au siècle dernier se sentent depuis la révolution de 2011, investis du devoir de vérité et de tolérance que leur ancestrale école leur a enseigné. En libérant la Tunisie, le peuple a aussi libéré la Zitouna. C'est sans doute pourquoi lors du dernier remaniement politique, son recteur Monsieur Abdeljalil Ben Salem a été nommé Ministre des affaires religieuses. Le choix était judicieux car il consacrait un théologien respecté pour son érudition, son indépendance et sa liberté d'expression. Très vite, il s'est fait remarquer en déclarant dans un quotidien égyptien « l'extrémisme et le fanatisme ont envahi le monde arabe... nous avons besoin de nous arrêter sur ses causes, ses origines et la manière dont on doit traiter ce phénomène...le fondamentalisme et le terrorisme se nourrit des crises économiques tout comme jadis le fascisme et le nazisme ». Les saoudiens qui revendiquent le monopole du dogme se sont sentis obligés de dépêcher à Tunis une délégation chargée de recadrer l'impertinent. La rencontre fut houleuse. On imagine que l'ambassadeur saoudien outré exigea pour le moins que le repenti à genoux lui baisa la jellaba. Que nenni, rien, oualou. Alors, le plénipotentiaire se précipita chez le Président et le Chef du gouvernement pour exiger l'enfermement du dément. Trop tard, entre temps le téméraire ministre zitounien courrait rendre compte à la représentation nationale qui en séance, applaudissait ses propos : « oui, je dénonce  l'influence néfaste du wahhabisme saoudien en tant que vecteur du terrorisme.... je leur ai dit avec  humilité et affection  : réformez votre école car le terrorisme vient de là ! »
Passé quasiment inaperçu en France, la portée de cet événement est pourtant inouïe ! C'est la première fois que pareille vérité est révélée dans une assemblée musulmane. Jamais auparavant, aucun homme politique arabe n'avait osé proclamer ce que tous les musulmans sensés chuchotent. Immédiatement, les chancelleries ont relayé le coup de tonnerre. Le roi Salman d'Arabie est entré en fureur. L'Etat tunisien a vacillé. En moins de temps qu'il en faut pour l'annoncer, le ministre était limogé.
Si demain, François Fillon devenait Président, Tunis seraient bien inspiré de nommer Abdeljellil Ben Salem ambassadeur à Paris !


jeudi 17 novembre 2016

Malek Chebel le musulman


Le ténèbres ont eu raison de l'homme des lumières ; il s'est éteint la semaine dernière.
Il était tout en douceur, tout en rondeur. S'était-il de sa vie jamais mis en colère ? La voix était douce, presque monocorde, ses yeux pétillants buvaient les paroles des incultes et des érudits avec la même empathie. Il avait la foi. Sa religion était celle de l'abandon, de la confiance, de la paix: Islam.

Né au milieu du siècle dans l'est algérien, l'infatigable dévoreur de savoir monte à Paris à l'âge de 27 ans où il enchaîne les doctorats. Pas moins de trois : psychanalyse, anthropologie, sciences politiques. Pour autant, l'université française n'en fera pas un mandarin. Ses livres se vendent bien car les éditeurs ont flairé le bon client. Malek accepte tous les plans communication : « Islam pour les Nuls » « Dictionnaire amoureux de l'Islam » l'érotisme, le kama soutra, Shéhérazade, sexe, homosexualité, désir... l'Islam à toutes les sauces ! Pourquoi pas ? L'intellectuel sait que pour faire passer son message, pour gagner le grand public, il faut accéder aux têtes de gondoles dans les librairies d'Auchan et de la FNAC. Avant tout le monde, il avait compris que la fracture qui s'annonçait appelait d'urgence la conversion des Français à la perception de l'Islam de la paix et que les musulmans se retrouvent dans une pensée d'incommensurable tolérance. Professer « l'Islam des Lumières », c'est éclairer les ignorants. Alors, il dédicaçait à tour de bras dans les librairies de province, il colloquait inlassablement avec des pasteurs, des rabbins, des abbés, des mécréants et des libres penseurs. Pour les musulmans de France, mais pas seulement, il était la présence rassurante à portée d'étagère, la sagesse de l'ancien qui calmait la fougue de l'ignorance sur les écrans de télévision.

Musulman, arabe, algérien authentiquement ; acceptant l'honneur de la plus haute décoration française, il refusa la nationalité que lui proposèrent deux Présidents de la République. Il a été inhumé à Skikda parmi les siens. Simultanément, à Puteaux en banlieue parisienne, ses voisins, ses amis, des personnalités mêlées aux anonymes, étaient venus par centaines dans la grande salle de la mairie pour lui rendre un dernier hommage. Sous les portraits géants du savant souriant, devant un pupitre sonorisé, les représentants de la France plurielle sont venus dire combien Malek Chebel était grand.

Il était musulman. Allah yarhamouhou.

samedi 5 novembre 2016

Vers une délocalisation de la Salpêtrière au Liban ?

Dans les pays arabes la médecine française a la réputation d'être la meilleure du monde De toutes les anciennes colonies affluent les souffrances que la France savante et généreuse sait apaiser. Mais cette notoriété est en train de s'éclipser au point qu'il y a deux mois, apprenant que Chirac avait été hospitalisé à Paris, ses amis libanais le déclarèrent en grand danger et ils proposèrent à Bernadette de le faire soigner à Beyrouth. Cette petite blague est nourrie par l'histoire d'une contre performance médicale française que se relatent les Libanais.

Elle met en cause la Salpêtrière, centre hospitalier et universitaire parisien - 1 600 lits, 8 000 soignants dont 1 300 médecins -, qui accueille plus d'un demi million de patients chaque année. Ce pôle d'excellence de l'assistance publique a d'un seul coup perdu ses trois étoiles au guide médical du Levant.
Que s'est-il passé ?

L'été dernier, Georges, modeste entrepreneur franco libanais se présente en titubant aux urgences. Il en est très vite congédié avec une ordonnance d'aspirine. Quelques jours plus tard, sur l'insistance de son médecin traitant, il parvient à se faire hospitaliser. Analyses et explorations révèlent des nodules cancéreux dans l'abdomen. Faut-il opérer ? La question s'est sans doute posée. Las, on est au mois d'août, les équipes sont réduites, la plupart des chirurgiens sont en vacances.  Ceux qui restent doivent faire le choix du plus urgent, du moins coûteux, du mieux vivant, du plus jeune, du plus facile... Chacun sait qu'il est malchanceux d'être hospitalisé le week end ou pendant les vacances. Ces périodes de sous effectifs et de surcharge de travail correspondent à une surmortalité. Aucune étude ne l'a prouvé car aucune étude n'a jamais été publiée.
Georges avec de la chance, pourra t-il survivre jusqu'à septembre ? Le diagnostic est mauvais. Pour le soulager on lui pose un drain, on lui propose des calmants que par bravade il refuse d'abord avant de s'y résoudre. La morphine le plonge alors dans un univers cotonneux.

Hier c'était un géant, une force de la nature, hyperactif, débonnaire, toujours souriant. Que vont devenir ses jeunes enfants ? Le voici vaincu, amaigri, déjà cadavérique, les joues creuses, le regard ailleurs. Dans ses instants de lucidité il murmure à l'oreille de ses amis « je suis foutu, ne reste pas là, rentre chez toi... » Nous sommes le quinze août. Dans ce gigantesque hôpital qui paraît suspendu au retour des vacanciers, les couloirs sont vides mais la chambre de Georges ne désemplit pas. L'agonisant est veillé jour et nuit. Dans la salle d'attente, on discute comme si de rien n'était. L'optimisme libanais est de rigueur, il va vivre, c'est évident. Nul ne songe à se résigner. Ce serait tenter le mauvais sort dans ces lieux où le diable rôde. Les amis discrètement prient dans toutes les langues de leurs religions, chacun selon ses rites, ses traditions, ses superstitions : chiites, sunnites, alaouites, chaldéens, syriaques, arméniens, grecs, juifs, orthodoxes, incroyants...C'est la tour de Babel des suppliques silencieuses.
Chaque jour, des quatre coins du monde il en arrive des nouveaux, d'Australie, d'Abu Dhabi, de Dakar, de Valparéso...Ceux qui ne peuvent pas venir téléphonent tout le temps. On leur répond sans faillir, que Georges va beaucoup mieux, que le remède « expérimental » donne des résultats probants... On ment comme des arracheurs de dents. Personne ne nous croit mais chacun espère le miracle.
Les infirmières et les autres patients s'interrogent sur la cause de cette agitation. Georges est-il le chef d'un parti politique influent ou d'une secte mystérieuse ? Le Président d'une multinationale ou celui d'un pays lointain ?
Rien de tout cela. C'est seulement le héros anonyme connu de ses seuls compagnons d'armes. Il était le chef charismatique d'une centaine de lycéens. Mais qui se souvient de la guerre du Liban ? Elle dura 15 ans fit 250 000 morts ! En proportion, imaginez la France avec 3 ou 4 millions de tués. Qui se rappelle des exploits de ces adolescents résistants de la première heure, en 1975 ? 
Eux. Les survivants. Il sont venus, ils sont tous là. Mais pas question d'évoquer le passé ni même de se lamenter. Ces presque quinquagénaires sont restés des combattants. A t-on essayé tous les remèdes ? Chacun interroge les médecins, les infirmières de passage. Puis en réunion la troupe confronte les réponses.
C'est le monde à l'envers : au fatalisme médical français répond la logique et le pragmatisme oriental, au défaitisme occidental s'oppose l'optimisme libanais. Le malade est condamné disent les blouses blanches, c'est une question d'heures, au mieux de quelques jours. Mais vous n'avez rien tenté s'indignent les amis de Georges !

À Beyrouth, quelques sommités médicales alertées planchent sur le cas du moribond. L'espoir est mince. C'est suffisant. Yallah ! Les amis se cotisent : les riches abondent, les pauvres sont dispensés. En toute hâte, un transfert est organisé. La décharge de responsabilité est signée. Le mourant quitte l'hôpital direction l'aéroport du Bourget. Quatre heures plus tard, dans la nuit, un avion sanitaire se pose à Beyrouth. Cent personnes escortent l'ambulance jusqu'à l'hôpital  un bloc opératoire a été préparé. Deux chirurgiens se penchent pendant six heures. Ils extirpent les boules de mort du corps inanimé.


Les mois ont passés. Le miraculé se porte bien. Le Liban tout entier est secoué de fierté. Dans quelques jours, Georges sera de retour à Paris où ses amis lui ont préparé un banquet pour célébrer la victoire des opiniâtres sur les résignés.

lundi 24 octobre 2016

La leçon magistrale de Bourguiba et Mendès France pour vaincre le chômage

La Tunisie doit son indépendance à deux frères en politique : Habib Bourguiba et Pierre Mendès France. L'un et l'autre incarnèrent le désintéressement personnel et le dévouement à leur pays qu'ils ont marqué de leur empreinte. Mendès France était le maître à penser de Bourguiba. Inlassablement, le tunisien cherchera à imiter son modèle, le surpassant parfois et pas seulement dans la longévité de sa gouvernance : trente ans pour l'un, 232 jours pour l'autre. Jamais, jusqu'à sa mort, le portrait de l'ancien Président du conseil français ne quittera le bureau du leader tunisien ; hommage fidèle du colonisé à son libérateur, mais aussi à celui qui lui révéla quelques recettes d'économies pour vaincre le sous développement. 

Le 20 mars 1956, la Tunisie accédait à l'indépendance. Le pays pansait encore les blessures de l'effort de guerre, du passage des armées de Rommel et de la lutte de libération nationale. Il était exsangue : électricité, eau potable, routes, aspirine, chaussures...tout manquait sauf les drapeaux. Car malgré la misère, la nation en espérance pavoisait. L'enthousiasme était devenu la respiration de tout un peuple soulevé par une indescriptible ardeur patriotique doublée d'une incroyable abnégation : « bledi kbel awlèdi » (mon pays avant mes enfants). 
Bourguiba le zaïm adulé excellait en toute chose excepté en économie et en finance. Il ignorait le commerce et méprisait l'argent. De tous les conseillers qui l'entouraient, aucun dans ces domaines n'avait d'expérience affirmée. Comment vaincre le chômage qui réduisait plus de dix pour cent de la population en cohortes nomades ? 350 000 miséreux ! Entre collectivisme de Moscou et libéralisme de Washington, le « Combattant suprême » était à la recherche d'un modèle non aligné  pour extraire la Tunisie du sous développement. 

Le choix de la troisième voie allait de soi : puisque Mendès France avait arraché l'indépendance à la France, il fallait continuer à lui faire confiance et mettre en pratique sa théorie du plein emploi. Encore fallait-il ne pas le crier sur tous les toits car il eut été mal compris des bien-pensants de l'époque que l'émancipateur de la Tunisie fit ouvertement appel aux idées de l'occupant qu'il avait combattu.
C'est ainsi que Gabriel Ardant sera discrètement missionné auprès d'un quarteron de proches de Bourguiba pour leur inspirer quelques orientations. Ardant était alors considéré en France comme le plus éclairé des inspecteurs des finances de l'après guerre. En 1954 avec Pierre Mendès France il avait cosigné « La science économique de l'action », ouvrage qui fait encore autorité en matière de politique de l'emploi dans la bibliothèque de quelques rares socialistes français.

Par un beau jour d'hiver 1959, dans un discours radiodiffusé, Bourguiba annonça solennellement sans crier gare, que tout chômeur qui se présenterait devant l'un de ses treize gouverneurs obtiendrait dans l'heure un emploi. Il promit un salaire journalier de 200 millimes et un kilo et demi de semoule. C'était une paye modeste, mais suffisante pour vaincre la faim et recouvrer la dignité. La mesure ne coûtait rien car quelques mois plus tôt, le leader tunisien en visite à Washington avait refusé tout armement mais accepté un don de 45 000 tonnes de blé.
À ses gouverneurs stupéfaits de se voir changés en chefs d'entreprises il disait : débrouillez-vous, faites fonctionner vos méninges dabrou rouskoum. Chacun d'entre eux reçut la dotation budgétaire et des camions de céréales. 
En quelques semaines, le pays qui comptait 3,5 millions d'habitants, se transforma en fourmilière. Au bout de seulement quatre mois, on comptait 150 000 chômeurs enrôlés ! Des routes, des maisons, des retenues d'eau, des plantations, des ateliers...Rien qu'à Gafsa, 120 chantiers populaires employant cent, deux cents ouvriers ! À la fin de la journée, chaque « travailleur » recevait son salaire. Il y avait bien quelques tire-au-flanc qui se faisaient rabrouer par le cabran (caporal de chantier) mais l'enthousiasme stimulé par le puissant parti nationaliste le Néo Destour faisait des miracles. Emancipé, le peuple des travailleurs assumait son nouveau destin. Partout on se mit à forger des pelles et des pioches, à creuser les canaux d'irrigation et des citernes, à planter les arbres qui dans cinq ou dix ans donneraient des fruits qui seraient récoltés, transformés, exportés... Le travail crée le travail... C'était la théorie de Mendès France et Ardant. Simple, simpliste , efficace, probant. Très vite on s'aperçut que les chantiers populaires étaient un régulateur social auquel avaient également recours les travailleurs intermittents et les saisonniers. Désormais assuré de ne plus chômer, l'ancien colonisé découvrait concrètement toute l'ampleur du changement : dignité et citoyenneté dans l'indépendance, et surtout pain à chaque repas.

Piloté de front avec une politique de scolarisation intensive et d'émancipation de la femme, le jihad contre le sous développement engendrera des bouleversements profonds de toutes natures. Ainsi, la déconcentration du pouvoir central au profit des gouverneurs de province permit de briser la bureaucratie jacobine héritée de la Régence française, de libérer les initiatives de la base. Mais aussi et de façon inattendue au plan vestimentaire, car progressivement les ouvriers agricoles échangèrent gandoura et séroual pour blouson et pantalon qui sont bien plus commodes au labeur... 
Certes, au début du processus, les chantiers populaires se contentaient de casser des cailloux, mais peu à peu, des projets productifs plus ambitieux furent inaugurés. Après quelques mois, il devint indispensable d'encadrer la croissance retrouvée par une politique de planification quinquennale à l'échelle nationale. Ahmed Ben Salah, l'un des plus talentueux hommes d'État tunisiens en sera le maître d'oeuvre dévoué.

Bien entendu, cette dictature du plein emploi n'allait pas de soi. Bourguiba devait quotidiennement stimuler les volontés. Inlassablement il parcourait les provinces visitant les villages, s'adressant aux foules dans la langue tunisienne, derja celle du peuple comprise de tous, plutôt qu'en arabe classique inaccessible aux illettrés. Selon les conseillers socialistes français il était en effet indispensable que les réformes soient parfaitement explicitées et que le gouvernement établisse « une intimité affectueuse » avec l'opinion. Chaque jour, la chronique d'Abdelaziz Al Aroui sur Radio Tunis faisait résonner les propos de Bourguiba en les magnifiant sur le ton de la confidence. Cette méthode relevait de la même stratégie de communication que les « causeries du samedi » de Mendès France sur Radio Programme Parisien. La France en 1954 puis la Tunisie en 1957 innovèrent une posture nouvelle, celle de  « la parole humaine en politique » qui allait devenir fondamentale pour tous les gouvernants.

Sur l'expérimentation de sa théorie du plein emploi, Gabriel Ardant a publié chez Calman Levy en 1961« La Tunisie d'aujourd'hui et de demain » un ouvrage que l'on serait bien inspiré de rééditer. En voici la brève conclusion : « L'expérience tunisienne signifie que l'élimination du chômage direct est à la porté de tout gouvernement. Elle démontre que le maintien du sous-emploi ne peut s'expliquer que par le défaut d'une volonté réelle d'y mettre fin, par l'acceptation d'un état séculaire d'inaction et de misère, par la résignation que les privilégiés ont si facilement à l'égard des malheureux. »

On serait tenté de commenter ces propos tenus il y a un demi siècle à la lueur du chômage qui ronge aujourd'hui deux pays dont les destins sont liés. Entre la France et la Tunisie le commerce en tous genres n'a jamais été aussi fusionnel. Mais il reste fragiles, alors pour le consolider, les énarques parisiens donneurs de leçons continuent de se presser autour de la casbah. Ainsi, le mois prochain, en grande pompe, le gouvernement français désignera un « Haut responsable de la coopération industrielle et technologique franco-tunisienne » selon l'exemple de « Monsieur Algérie » Jean-Louis Levet qui depuis trois ans, est parvenu à créer « du lien » entre les fournisseurs d'emplois des deux rives de la Méditerranée.

Aux dernières nouvelles, Matignon serait à la recherche d'un homme providentiel ! Mais y a t-il encore des Gabriel Ardant ?

mardi 11 octobre 2016

Cafouillage dans les ambassades de France en Arabie Saoudite et en Tunisie

À Riyad en Arabie, chaque lundi soir, un petit groupe de Français se retrouve au « ciné-club ». C'est un local improvisé dans une villa car il n'y a pas de salle de cinema publique au pays des salafistes. À l’affiche de cette semaine « Made in France ». C'est l’histoire  d’un journaliste musulman qui infiltre les milieux intégristes de la banlieue parisienne… Pas vraiment de quoi distraire les expatriés cinéphiles de leur train-train quotidien. Mais depuis quelques mois, ils ont pris l'habitude de se rassembler après la projection autour d'un chawarma pour commenter non pas le film, mais les derniers épisodes d'un conflit social qui agite et gangrène le moral de la petite communauté française en Arabie Saoudite.

Les impayés de Hariri
L'affaire a commencé il y a un plus d'un an par la lente déconfiture de Saudi Oger, un géant du bâtiment et des travaux publics dont les 38 000 salariés ont d'abord été payés partiellement, puis avec retard, enfin plus du tout. Parmi eux environ 250 Français : des techniciens et des ingénieurs installés avec leurs familles. Au début, ils ne se sont pas vraiment inquiétés. La direction du groupe les assurait qu'ils seraient généreusement dédommagés de leur patience. Ils l'on cru car l'entreprise Saudi Oger appartient aux Hariri ; une famille de milliardaires saoudiens d'origine libanaise, grands amis de la France et de ses dirigeants. Na-t-elle pas hébergé gracieusement Jacques Chirac et sa famille pendant six ans dans un somptueux appartement sur les berges de Seine à Paris ? Enfin et surtout, le consulat et l'ambassade de France faisaient savoir qu'ils s'occupaient de la détresse de leurs ouailles mais que la discrétion était de mise car « il faut pas indisposer les saoudiens par des actions intempestives ». Au fil des mois, la situation quotidienne des deux cents familles se complique : les banques ne leur accordent plus de découverts, les écoles ne font plus crédit, les téléphones sont coupés...Elles deviennent prisonnières d'un système kafkaïen car pour changer d'employeur ou quitter le pays, il faut produire des quitus que l'entreprise et l'administration refusent de leur délivrer. Désespérés, certains pensent même faire appel aux tribunaux car la charia impose « de payer ses employés avant même que ne sèche la sueur sur leur front » Mais en Arabie, la jurisprudence est incertaine. Mieux vaut s'éloigner des prétoires et des cachots. Les condamnés à chômer protestent et manifestent sans faire de bruit. Ils lancent des appels de détresse silencieux. Le consulat et l'ambassade relaient les messages de Saudi Oger : patience, boukra inchallah ! Pourtant, les cadres d'autres nationalités européennes et américaines victimes du même problème sont pris en charge par leur chancellerie. Les ressortissants français ont l'impression d'être des otages injustement oubliés de la France car même l'Inde et les Philippines s'agitent avec succès pour aider leurs milliers d'ouvriers à quitter l'Arabie. Lorsque l'épouse d'un ingénieur tente de se suicider, l'émotion et l'indignation gagnent l'ensemble de la communauté des 6 000 expatriés. La patience a des limites. La bronca cible l'ambassadeur de France Bertrand Besancenot.

Rétro-ambassadeur
Nommé il y a neuf ans après avoir été le conseiller de Michèle Alliot-Marie au ministère de la Défense, ce diplomate infatué de ses médiocres talents semble atteint du syndrome de Stockholm tant il met du zèle à défendre les intérêts saoudiens jusqu'à les confondre avec les siens. Pour prix d'un alignement de la diplomatie française sur celle des Saoud, il fait miroiter à Paris des milliards de contrats qui ne seront jamais  signés. 
Sur les réseaux sociaux, le collectif des expatriés grugés fait le buzz, la presse est alertée. En février, Le Parisien titre « En Arabie Saoudite on a du pétrole mais pas de salaires ! ». Mais que vaut la détresse de cadres bien payés face aux milliers de smicards métropolitains licenciés ! Finalement, l'incurie de l'ambassadeur est étalée. À l'approche des élections le scandale menace de faire basculer les opinions. Il devient également urgent de trouver un responsable aux milliards de promesses saoudiennes envolées. Des parlementaires chuchotent bien haut. Ses amis d'hier abandonnent Besancenot qu'il croyait soutenu par les altesses.
En visite à Paris en juin dernier, le jeune vice-prince héritier Ben Salman ne montre pas plus de sympathie pour l'ambassadeur de France que pour le PDG d'ODAS, l'agence gouvernementale de l'armement en Arabie. Mais si l'amiral est épargné, l'ambassadeur est sacqué. À l'issue d'un conseil des ministres où ne siège plus Laurent Fabius, Bertrand Besancenot est muté aux archives de Nantes alors qu'il convoitait le Vatican. Pour autant, il n'a toujours pas fait ses valises et fait une interminable tournée d'adieux, espérant peut-être à quelques mois de la retraite, des promesses d'emplois juteux qui seront payés rubis sur l'ongle.
Aux dernières nouvelles, les 250 familles impayées ont commencé à recevoir leur dû. 
Al hamdou lillah !

Le second Résident de France en Tunisie
À la Marsa en Tunisie, sur l'esplanade de la corniche reverdie par les orages d'automne, les attablées aux terrasses des cafés devisent ironiquement sur le changement de locataire de la somptueuse résidence de France. L'ambassadeur nouveau est carrément qualifié de malotru, de parvenu, d'erreur de casting... » les mots sont durs tant la désillusion est immense. 
Après la révolution, ils avaient chassé Boris Boillon, un Sarkozy-boy sans éducation: https://hybel.blogspot.fr/2011/02/le-nouveau-resident-de-france-en.html 
Alors très vite, Paris avait fait acte de contrition en nommant François Gouyette, un diplomate de carrière : « du miel ! Il a sillonné toute la Tunisie...courtois, modeste, toujours un mot aimable à la bouchedans un arabe parfait...c'est bien simple, au 14 juillet pour ses adieux, il y avait plus de monde à la résidence de France qu'au stade de foot !..." Les regrets sont unanimes et la compassion sincère car meskin, l'infortuné diplomate a été nommé en Arabie Saoudite, chez les obscurantistes. On plaint son épouse Halima, contrainte de porter l'abaya noire quand elle voudra sortir de la résidence en béton du quartier réservé aux diplomates. Le couple ira t-il faire le pèlerinage à la Mecque comme leurs homologues britanniques Simon et Huda Colis ? Pas simple.

Le stagiaire du Quai d'Orsay à la Kasbah
Le successeur du bien aimé François Gouyette est le déjà détesté Olivier Poivre d'Arvor. Il est arrivé par bateau. Tout comme le Résident Général de Hauteclocque qui conduisit la sanglante répression contre le mouvement nationaliste en 1952. Quel symbole ! Pire, dans une déclaration à RTL, l'ancien PDG de Radio France Culture a tenu des propos diplomatiquement insensés « Ma mission principale est d’assurer la sécurité des Français qui se trouvent en Tunisie... Il faut pouvoir les protéger, notamment dans les pays comme la Tunisie dont on sait qu’ils sont fournisseurs de jihadistes » 
Un comble pour les Tunisiens qui se souviennent que les députés Chokri Belaïd et Mohamed Brahmi sont tombés sous les balles d'un jihadiste français natif de Paris, toujours en fuite,  et que les attentats de Charlie, Bataclan et Nice ont également fait des victimes tunisiennes. 
Par ses propos, l'ambassadeur Poivre d'Arvor qui est aussi accrédité en Libye, s'est d'emblée totalement discrédité. 
Fort heureusement les Tunisiens sont de bonne composition car on imagine le scandale qu'auraient provoquées semblables désinvoltures au Maroc ou en Algérie ! Le Président tunisien Caïd Essebsi est un beldi de noble éducation qui a fait ses classes comme ministre des affaires étrangères il y a un demi siècle. Il ne va pas tarder à inculquer les bonnes manières au jeune parachuté. D'ailleurs, trois mois après son arrivée, il n'a toujours pas pris le temps de recevoir ce stagiaire du Quai d'Orsay à la Kasbah !

Décidément le cafouillage de la diplomatie arabe de la France est une irréductible constante. 

dimanche 2 octobre 2016

Dassault, l'exception française

Il faudra bien s'y résoudre, dans deux jours ou dix ans, Serge Dassault tirera sa révérence. Après une cérémonie aux Invalides, des gens très importants formant cortège, accompagneront le défunt jusqu'à sa dernière demeure au cimetière de Passy, derrière la Place des Droits de l'Homme, où il reposera aux côtés de son géniteur Marcel dont le tombeau de marbre noir indique sobrement qu'il fut « avionneur ». Dans les jours qui suivront, Le Figaro affichera son portrait liseré de noir et rapportera les commentaires dithyrambiques sur les exploits du patron milliardaire d'un groupe centenaire authentiquement français.

L'antipathique homme le plus puissant de France
De son père, Serge a hérité un empire et des idées politiques qu'il a fait prospérer. Mais autant le déporté-résistant-ingénieur-génial était affable, sympathique et généreux, autant son fils ainé est distant, arrogant, grognon, infréquentable. Sitôt la main serré, on est soulagé de la lui rendre. Pour les anglo-normands, son personnage fait irrésistiblement penser à celui de « Monty », Mister Burns dans les Simpsons. Mais après tout, un milliardaire peut bien se payer le luxe de se dispenser de simagrées mondaines. Contrairement aux autres industriels de l'armement, il ne fréquente pas les endroits huppés, ne met jamais les pieds au Polo Club, il préfère les safari en solitaire dans sa chasse privée près de Rambouillet. Il n'est pas non plus du genre à taper dans le dos de ses 18 000 cadres et employés très qualifiés qui appliquent sans regimber ses quatre mots d'ordres : passioninnovationexcellenceengagement.
L'homme est richissime à 18 milliards d'euros. Il détient des participations dans une cinquantaine de sociétés, l'ensemble dégage des bénéfices enviés par tous les fonds de pension. Son entre-gens est considérable dans la finance, les médias et les milieux politiques où nul n'est assez fou pour se le mettre à dos. C'est l'homme le plus puissant de France : une autre raison bien française de le détester.

Lignée cocorico
En très exactement cent ans « Dassault père et fils » sont parvenus à se faire un nom dont la renommée internationale est l'égale de Dior, Bic, Chanel ou Michelin. Tous les grands de ce monde se déplacent en Falcon, le plus performant et le plus sûr des avions d'affaires, quant au Rafale c'est un redoutable engin de guerre, un avion multi-rôles vecteur de bombes nucléaires.

Dassault Aviation est un champion singulièrement exemplaire dans l'industrie française. Confidentialité oblige, il atteint un taux d'intégration « made in France » proche de 90% en faisant appel à 500 entreprises sous-traitantes de haute technicité toutes implantées dans l'hexagone. Économiste de la vieille école, Serge Dassault est à contre courant de la financiarisation de l'industrie, il est son propre banquier et n'a jamais songé à optimiser en délocalisant son siège des Champs Elysées. C'est un french tycoon paternaliste qui serait apprécié du public si son groupe fabriquait des smartphones plutôt que des avions de chasse. Pourtant, à contre courant du commerce extérieur civil qui enregistre un déficit de 50 milliards d'euros par an, celui des armes est largement excédentaire. Ce n'est pas une consolation, c'est une tradition bien française qu'aucune révolution n'a jamais transgressé.


France, terre de fabricants de canons
La France jamais en paix, de tous temps a guerroyé. Son savoir faire des armes date de cinq siècles. En 1515 à Marignan, petit village près de Milan, le tout jeune roi François 1er alors âgé de 25 ans, intronisé 8 mois plus tôt, remporte une victoire spectaculaire sur des troupes plus nombreuses grâce au feu de ses 70 canons. En 1517, il recueille Léonard de Vinci, 65 ans, qu'il chouchoute à Ambroise pour lui ravir les plans de ses machines de guerre.
Depuis, tous les monarques et Présidents n'ont cessé de promouvoir le développement des industries d'armements. Après les leçons des deux guerres mondiales, la doctrine gaulliste a encouragé des programmes ambitieux. Outre le nucléaire stratégique, la France second espace maritime de la planète, a innové dans la construction de sous-marins et de navires de surface de tous tonnages. Des budgets de recherche considérables ont été consacrés à l'artillerie et aux blindés ; aux hélicoptères ( 20 000 engins civils et militaires en opération dans 150 pays) ; aux avions de chasse et de transport, sans compter les missiles sol/sol et les satellites d'écoute et d'observation.
Sur le marché mondial de l'armement, l'offre française occupe la troisième place derrière les géants américains et russes.

De du Bellay à Dassault
La génération de Serge Dassault a appris par cœur sur les bancs de l'école le poème de Joachim du Bellay : France, terre des arts, des armes et des lois, tu m'as nourri longtemps du lait de ta mamelle...
Coté arts : Monsieur Dassault s'est doté d'un château dans le bordelais qui pisse un vin empyreumatique tout comme la prose des rédacteurs de son groupe de presse.
Coté lois : après une carrière modeste d'élu local dans la banlieue parisienne, il a fini par remporter un siège à la représentation nationale en devenant sénateur. Le parlementaire nonagénaire siège rarement, mais il maintient la tradition familiale en imposant régulièrement aux lecteurs de Jours de France ou du Figaro des éditoriaux que des thuriféraires biens payés se chargent ensuite de propager. Irréductiblement de droite, il appel à voter Sarkozy aux primaires de 2016 mais fait la bise à Hollande se rappelant sans doute qu'il doit ses succès électoraux aux déroutes de la gauche et la prospérité de ses affaires aux gouvernements socialistes. Têtus, droit dans ses bottes, il est suprêmement maladroit comme en témoigne ses nombreux déboires avec la justice : pour avoir chassé le faisan illégalement, pour dissimulation d'une poignée de millions au paradis fiscal, pour achat de voix lors d'une élection municipale... Autant d'infamies qu'il aurait pu s'épargner en se contentant d'être le patron multimilliardaire d'une entreprise prospère.

Merci patron

Polytechnicien arrogant, Serge Dassault est un citoyen qui donne son avis à tout bout de champs, irritant secrètement Les Républicains dont il est pourtant secrétaire national. Tous lui reprochent à voix basse ses leçons de paternalisme : « dans mon entreprise, on a choisi l'égalité entre salariés et actionnaires... en ce moment, comme les choses ne vont pas trop mal, on leur a donné 100 millions : cent millions pour les actionnaires, 100 millions pour les salariés....ça leur fait trois-quatre mois de salaires pour chacun... » Propos extraits d'une interview en ligne sur son blog à faire rêver les quelques 800 mille employés d'entreprises du secteur public : Edf, Gdf, Sncf, Ratp, Aéroport de Paris, La Poste, Air France.... Même sa dépendance des commandes publiques est un contre exemple pour Areva, Alstom... Le capitalisme familial serait-il devenu plus socialiste que le capitalisme d'État ? À droite comme à gauche, nul n'apprécie les sorties iconoclastes de Monsieur Dassault qui déclare à propos de Pierre Gattaz Président du MEDEF (son ancien employé 1984-1989) qu'il « est le patron de rien du tout ! » On comprend pourquoi ses amis politiques ne l'aiment pas vraiment. Ils se soumettent bon gré mal gré. Personne ne lui fait de cadeau, tous en attendent un de lui.

Tel Aviv ou Riyad ?
Au plan international Dassault est plus discret car il ne faut pas se brouiller avec d'éventuels clients étrangers. Que son cœur penche vers Israël plutôt que vers l'Arabie Saoudite, ou inversement, rien n'est évident. Selon Intelligence Online et Marianne : l'agent d'influence des principales industries d'armements israéliennes en France Laurent Azoulai (Président de la Commission Nationale des Conflits du Parti Socialiste , fondateur de la très influente Fondation Jean Jaurès et du Cercle Léon Blum, ancien argentier des campagnes électorales du PS) co-gère avec Moshe Avital une prospère société d'intermédiation qui compte parmi ses clients Dassault Aviation mais aussi le groupe Saoudien Bugshan. Cette triangulation d'affaires permet sans doute des rapprochements politiques et inversement.
Mais si « Sergio bin Marcel », comme le surnomme un autre intermédiaire mal élevé, aime la politique intérieure, il déteste la politique étrangère et leurs commerçants en coulisse qui d'ailleurs le lui rendent bien, car dans ce milieu avide de commissions à deux chiffres, il traine une réputation d'oncle Picsou.

Rafale au décollage
Sa fonction de patron du groupe d'aviation éponyme le porte à rencontrer les potentiels clients. Depuis des décades, il sillonne le monde dans son jet pour le plus grand mal de ses affaires car ce n'est pas un marchand de violette, c'est le pire VRP du commerce extérieur. Il a beau se forcer, il n'arrive pas à faire semblant d'être content de rencontrer un étranger. Il ne sait pas quoi lui dire, baragouine deux mots d'anglais, met les pieds dans le plat, improvise des discours hors sujet qu'aucun de ses collaborateurs n'ose contredire. Sa présence sur les salons de l'armement est boudée, les visiteurs galonnés préfèrent aller se faire photographier sur le stand russe aux côtés de Michaïl Kalachnikov, Général le plus décoré de Russie, décédé paisiblement dans son lit à l'âge de 94 ans en 2013, dont les terrifiantes inventions ont battu tous les records de carnage de l'histoire de l'humanité.

Miracle ou coïncidence, depuis que Serge Dassault voyage moins et qu'il a cédé les rênes à ses adjoints, le Rafale se vend enfin. Certes, il faut admettre que convaincre l'Émir du Qatar ou le Maréchal Sissi d'Egypte ne sont pas des exploits commerciaux probants et qu'ils sont surtout la conséquence de la diplomatie d'affaires conduite par Le Drian ministre. 
Mais la récente vente à l'Inde, première démocratie à acquérir des Rafales, est indiscutablement une performance. Elle est d'autant plus habile qu'elle a été signée par le ministre et que cette position de sous-traitant de l'État français met Dassault à l’abri des aléas juridiques et commerciaux les plus sérieux. Cette percée ouvre la voie à d'autres commandes.
Reste une incertitude de taille : après le Mirage de Marcel et le Rafale de Serge, quel sera l'avion d'Olivier l'héritier ? Bien malin qui pourra prédire l'avenir de cette étonnante lignée.

lundi 19 septembre 2016

Pierre Conesa. Dr Saoud et Mr Djihad


Pourtant remarqué à chacune de ses interventions à la télévision, Pierre Conesa y est rarement invité. Agrégé d'histoire, énarque, ses états de service dans l'enseignement, la défense, l'armement et le renseignement auraient pu lui assurer un complément de retraite confortable dans le lobbying en tous genres s'il s'était enfin abstenu de dire ce qu'il pense. Trop savant, trop brillant, trop décontracté, il a longtemps partagé les secrets d'État, il en sait long, il décourage les candidats à la contradiction. Lorsqu'en responsabilité il lui arrivait d'être placardisé, il en profitait pour voyager dans des pays sans touristes ou écrire des livres singuliers : son petit Guide du paradis Edition de l'Aube 2011 est une friandise truculente à mettre sur toutes les tables de chevet.
Cet intellectuel ne pouvait pas escamoter le débat sur l'Islam. Il n'est pas arabisant, n'a jamais mis les pieds à La Mecque mais a visité toutes les capitales du Moyen-Orient où il a observé les Altesses dans l'ombre discrète des délégations officielles; de surcroît, il n'a pas son pareil pour faire la synthèse d'une pile de documents.

Avec la parution de sa dernière contribution Dr Saoud et Mr Djihad ou La diplomatie religieuse de l'Arabie Saoudite chez Robert Laffont, l'iconoclaste jette un pavé qui fera des vagues dans le marigot des jihadologues. Il s'agit d'une échographie du monstre à double visage qui ronge l'islam: la monarchie wahhabite saoudienne.
Hubert Védrine dans une préface remarquable salut cette étude du  saoudo-wahhabisme comme élément du « soft power idéologique planétaire » au même titre que celui d'Israël, de la Russie, du Vatican...et juge l'ouvrage « sévère mais documenté... qui comble une lacune de l'analyse politique » espérant au passage que le moteur auxiliaire du wahhabisme saoudien de « certains émirats » (traduire le Qatar), fera l'objet d'un indispensable complément d'enquête.

La diplomatie religieuse de l'Arabie Saoudite est un modèle d'endoctrinement et de prosélytisme d'État au service d'une idéologie que Pierre Conesa n'hésite pas à comparer à celui des Khmers rouge et des Nazis. C'est une usine à propager le racisme , la misogynie, l'homophobie, la haine du dissemblable. Elle dispose de moyens logistiques illimités et bénéficie d'une totale impunité auprès de la communauté internationale corrompue par les achats de pétroles et les ventes d'armes.
Avec la rigueur du professeur d'Université, il retrace la genèse du Royaume wahhabite en s'appuyant sur une solide documentation d'ouvrages académiques dont le plus remarquable mérite d'être inlassablement cité : « Le pacte de Nejd » par Hammadi Redissi, publié au Seuil en 2007, qui demeure l'ouvrage le plus éclairant sur l'émergence planétaire de l'islam sectaire.
Conesa scrute le formidable réseau d'influence de la Ligue Islamique Mondiale, une ONG qui dispose d'un budget annuel estimé à 5 milliards de dollars soit cinq à sept fois plus que l'ex URSS et vingt fois moins que le Vatican.
Cette diplomatie prosélyte de l'ombre est sans contradicteur car elle est systématiquement défendue par la diplomatie officielle. Aucun régime démocratique ne peut lutter contre contre le mal qui se déguise en bien ; contre Dr Saoud et Mr Djihad ; contre le chantage et l'argent. Et l'auteur de rappeler que le gouvernement d'union de la gauche de Mitterrand s'était résolu, au début des années 80 à contracter un emprunt de 3 milliards de dollars auprès de Riyad ; que sous la Présidence de Sarkozy, Michèle Alliot-Marie Ministre de la Défense, en visite chez son homologue le Prince Sultan , avait été proprement mise à la porte après sept minutes d'entretien pour avoir osé faire allusion aux « carences du système éducatif saoudien ».

On pourra regretter que l'auteur, pourtant très informé, ne se soit pas étendu davantage sur les incroyables complaisances de la France « pays où les droits de l'homme sont mieux protégés que la population », mais d'autres livres suivront. Dans sa cartographie très complète des lieux d'influences jihadistes, il démontre comment, aux quatre coins de la planète, l'action religieuse de la monarchie saoudienne pervertit l'Islam.
Ainsi, en Grande Bretagne où vivent 2,8 millions de musulmans, 100 000 enfants suivent les cours de 700 écoles coraniques. Il existe aussi des hôpitaux halal, des quartiers signalés  « Sharias zone » sans alcool, sans tabac, sans femmes en cheveux, sans homosexuels... Pire, des tribunaux islamiques sont autorisés à juger selon la loi coranique les conflits en matière commerciale et civile ; y compris les querelles de couple et de voisinage. Unique protection contre l'arbitraire, les décisions de ces juridictions sont susceptibles d'appel devant la Hight Court. « Le ministère de la justice laisse faire. Peu médiatisé, la naissance de ce système d'arbitrage parallèle n'a pas suscité de réaction en Grande Bretagne » remarque sobrement Pierre Conesa. Effarant !
Pendant ce temps, mais pour combien de temps encore ?... d'autres musulmans résistent à l'hégémonie wahhabite: en Tunisie, en Algérie, au Maroc mais pas seulement. Qui leur vient en aide ? Qui dénonce le génocide saoudien au Yémen, qui relaie les cris de souffrance de la jeunesse encagée d'Arabie ? Personne ou presque. (En France, pas moins de cinq agences de conseil en communication se chargent de « corriger » l'image des Saoud dans l'opinion)


L'enquête de Pierre Conesa est une contribution majeure à sélectionner en priorité sur l'étalage que consacrent les libraires à « l'édition jihadologique ». Il faut espérer que sa large diffusion réveillera les consciences. À l'avenir, nul diplomate, nul élève de l'ENA ou de Sciences Po, nul commis de l'Etat nul candidat au suffrage universel ne pourront dire qu'il ne savait pas.