La
désignation d'un nouveau premier ministre est une délivrance que
tout le pays accueille avec soulagement.
Au
terme d'une interminable chikaya, les partis politiques se sont
finalement réconciliés autour du nom d'un inconnu. Sous la pression
conjuguée de la rue, des milieux d'affaires, des syndicats et des
diplomates étrangers Mehdi Jomaâ a été appelé à former un
nouveau gouvernement.
Personne
ne connaît
les opinions de ce technocrate qui occupait jusqu'à présent le
ministère de l'industrie. Est-il homme d'argent ? De
conviction ? De religion ? Nul ne sait. Il n'est pas
partisan c'est le plus important. Il est supposé compétent et pour
l'heure, c'est bien suffisant !
Son
casting correspond parfaitement au souhait de la population.
C'est
un natif du juste milieu : ni Sud, ni Nord, un peu Sahel, mais
pas trop. Mahdia, petit port de pêche est la plus belle des cartes
postales de Tunisie. La cité est prospère mais elle n'aime pas
s'exhiber. Ses habitants, descendants d'immigrés andalous ont
conservé de leurs ancêtres les talents de négociants patients.
Mahdia, c'est la Tunisie apaisante. Le nouveau chef du gouvernement
qui aura pour lointaine et dernière demeure le plus beau des
cimetières marins
du monde ne peut-être méchant ! D'évidence, ce jour funeste
n'est pas pour demain car il est jeune. Pensez, cinquante ans
seulement ! C'est un gamin par rapport aux nombreux postulants
septua, octo, et même nonagénaires qui se bousculaient au portillon
et voulaient imposer à la juvénile Tunisie révoltée une
gérontocratie de bavards.
Mehdi
Jomaâ est un besogneux, un gagneur de pain, un khobsiste au parcours
banal. Il est à l'image de milliers de Tunisiens.
Etudes à l'école publique, diplôme d'ingénieur à Tunis. Immigré
à l'étranger. Carrière de cadre en France. Jusque là tout est normal. Mais ce père de famille nombreuse parvient à crever le
plafond de verre. Il bouscule les X-Ponts de Neuilly et les
centraliens de Passy, s'impose à la direction générale du groupe
Total et prend les commandes de la division internationale
aéronautique et défense. Ce n'est pas rien ! Manager compétent
et pragmatique c'est certain.
Nationaliste
et ambitieux c'est évident, car il y a neuf mois il abandonne sa
carrière dorée pour le poste de ministre sous payé de l'industrie
de son pays délabré. Il y a fait son boulot, ne s'est pas trop
poussé du col, mais surtout, il a su se faire reconnaître comme le
plus capable d'une équipe qui ne l'était pas.
Ses
détracteurs l'accusent d'être une taupe des cartels industriels qui
convoitent les réservoirs
de gaz de schistes et les ressources solaires du pays. On lui
reproche aussi sa virginité politique et son absence d'expérience
des affaires publiques. Qu'importe, dans la difficile période
électorale qui s'annonce et qui mettra les ambitions en ébullition,
il est important que le locataire de la Kasbah consacre tous ses
efforts à endiguer l'effondrement de l'économie tunisienne.
Ce
sera le challenge de Si Mehdi qui présente les stigmates du sauveur
d'une Tunisie égarée. Déjà, il porte en son prénom la baraka de
son destin : Mehdi, c'est l'envoyé divinement inspiré qui
marque la fin des vaches maigres. Jomaâ évoque le rassemblement du
vendredi, jour de ferveur. Le peuple inspiré le suivra. Inch'Allah !
Bonne
chance à Mehdi Jomaâ nouveau guide provisoire de révolution
tunisienne !
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire