Dans le Gafsa de mon enfance, un pauvre diable ramassait dans le désert des scorpions qu’il venait ensuite exhiber à la terrasse des cafés. Les clients de loin lui jetaient des piécettes pour l’empêcher d’approcher. Pour forcer les distraits et les radins, le mendiant à bout d’arguments croquait comme des friandises quelques reptiles vivants.
Le trouble à l’ordre public devint insupportable avec l’arrivée des premiers touristes.
La police l’intercepta au lasso, le roula dans un tapis et l’expédia à la prison de Sfax où il fût débarrassé de sa vermine.
Quelques jours plus tard, l’homme scorpion se suicida en se mordant la langue.
Pour enrayer l’épidémie, on ordonna depuis la Kasbah de la capitale, de distribuer à chacun des hommes scorpions un demi-litre d’huile d’olive, un kilo de semoule et deux cents petits millimes pour acheter le thé, le sucre et l’harissa. C’est ainsi que chaque soir, les journaliers s’en retournaient au gourbi la tête haute et le regard fier. L’oued Beyech emporta la famine et El Guettar fut construite.
Mais ceux qui redevinrent des hommes ne pouvaient imaginer que leurs petits enfants mangeraient des pierres et que l’un d’entre eux viendrait s’enflammer sous le regard de trois ministres qui lui avaient refusé l’aumône.
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