lundi 22 août 2011
Aux urnes binationaux aux armes bi-citoyens !
Nous sommes en juin1940, à Gafsa. Des jeunes gens en uniformes sont regroupés puis acheminés dans la nuit vers Tunis. Au petit matin, ils embarquent sur la proue d’un paquebot qui cingle aussitôt vers Marseille. Les hommes du 4ème Régiment de Tirailleurs Tunisiens partent libérer la France !
Pendant la traversée, les passagers de première classe depuis le pont supérieur leur jettent des friandises et des cigarettes qu’ils se disputent joyeusement déjà ivres de la découverte de la mer. Après un voyage de quatre jours retardé par une avarie en rade de Bonifacio, ils posent leurs sacs sur le quai de la Joliette où des wagons à banquettes en dur les attendent. Le convoi gagne Paris. En Gare de Lyon, les hommes cantinent à la hâte d’une soupe avant de sauter dans des camions. Sur le pont d’Austerlitz traversé à faible allure, certains croient discerner la Tour Eiffel. Au petit matin, la troupe bivouaque en forêt de Rambouillet. Au lointain, le canon tonne. Les hommes ne s’en alarment pas, tout occupés qu’ils sont à contempler les arbres immenses, caresser la mousse, effeuiller les fougères. Le lendemain, ils attendent en vain l’ordre de marche. Pour passer le temps, ils capturent trois poules faisanes dont se régalent les officiers lesquels en échange blessent au fusil deux chevreuils, aussitôt égorgés et rôtis au bord de l’étang du Moulinet. Pour la plupart des hommes la guerre est une belle découverte : la France ressemble au paradis.
Quatre jours plus tard, ils apprennent que Paris vient de capituler et que des unités de leur régiment se battent à Palaiseau. Enfin, le Capitaine reçoit l’ordre de rallier Chartres. Les routes sont encombrées par l’exode d’une population accablée. Les armées françaises en colonnes pressées doublent en vitesse une file ininterrompue de civils hagards. C’est une débâcle indescriptible sans gloire ni panache. L’armée allemande est déjà à Trappe. Vers le soir, au bout d’une route toute droite tracée entre les champs de blé de la Beauce, la troupe prend position près d’un hameau désert d’où l’on aperçoit brillant au couchant, les flèches de la cathédrale de Chartres.
La compagnie du 4ème RTT reçoit l’ordre de tenter de stopper l’avance des chars allemands. Par petits groupes, les hommes creusent des tranchées. A la nuit tombée, alors que les obus pleuvent moins nombreux, le Commandant rassemble ses hommes et leur parle à peu près ce langage : « ne laissons pas l’histoire nous traiter de lâches. Jurons de périr ici pour l'honneur de la France ». Tous prêtent serment.
Le jour suivant, ils résistèrent jusqu’au soir. Les derniers survivants formant le carré en défense crièrent : « vive la France…. Allahou akbar ! » avant d’être hachés par la mitraille.
C’était le dimanche 16 juin 1940, à Houville-la- Branche en Eure et Loir.
Le lundi, Pétain signait l’armistice.
Le mardi 18 juin, les 50 villageois qui s’étaient réfugiés dans la chênaie s’en retournèrent pour mettre en terre dans leur cimetière les restes de 63 gosses. Depuis, chaque année, les habitants observent une journée de deuil et s’en vont fleurir la mémoire des hommes qui arboraient l’éléphant d’Annibal sur leur fanion tricolore.
Si un jour, vous passez en Beauce, faites un détour par Houville-la Branche, c’est un village charmant qui invite au pique nique. Entre la rue du souvenir et celle du 16 juin 1940, reposent côte à côte soixante trois hommes « Morts pour la France ».
Le quatorze juillet dernier l’ambassadeur de France en Tunisie recevait en sa résidence somptueuse de La Marsa la communauté française pour célébrer la mère des révolutions. Il avait aussi invité une soixantaine de jeunes de 18 ans pour leur seule qualité de double appartenance. Dans son discours, le diplomate a chaudement encouragé ces nouveaux citoyens à aller voter le 23 octobre prochain pour la constituante tunisienne puis au printemps 2012 pour la présidentielle française. L’appel est singulier car c’est la première fois qu’un plénipotentiaire français invite ses concitoyens à participer à un scrutin étranger. Curieusement, le propos n’a suscité aucune polémique ni à Paris, ni dans l’indulgente capitale tunisienne. L’accrédité aurait-il usé du même langage à Rabat ou Alger ? Son intention probable était de nourrir dans l’hexagone un vrai faux débat qui a fait long feu.
Dédions lui ce billet.
Il existe des citoyens français qui par le droit ou la faveur d’un autre état souverain portent une seconde voire une troisième ou énième nationalité. La vexillophilie n'est pas un vice honteux.
La Fédération de Foot s’en accommode fort bien mais pas le Front National.
Le fisc dans sa grande impartialité ne s’en formalise pas. A quelques exceptions arabes d’affaires près, il considère comme redevable celui dont le foyer est en France. Point.
Le code électoral ne distingue pas le citoyen français de Clermont de celui de Pétaouchnock. Dès lors qu’ils portent une carte d’identité RF, ils votent. On peut se demander si le Français installé au bout du monde depuis des lustres est plus attaché au destin de la France que l’immigré installé depuis trente ans à la Garenne Beuvron… De même, est-il démocratiquement décent de pouvoir voter dans plusieurs pays ? Ici pour les blancs, à coté pour les bleus et là-bas pour les rouges. On peut bien être socialiste chez soit et fasciste sur son lieu de vacance ou inversement. L’exercice du bi-vote est délicat.
En apparence plus simple, le dilemne de la double allégeance ne se pose pas dès lors que le binational revêt l’uniforme. Les soldats tunisiens (citoyens indigènes de l’Union Française) tombés à Houville-la- Branche sont morts pour la France. Les malgré-nous mosellans et alsaciens étaient allemands. Le soldat captif dont on arbore de façon incongrue le portrait sur les mairies de France où il n’a jamais mis les pieds est israélien. Car même pour les gardes suisses du Vatican, la tenue et les galons font le larron.
Reste le libre choix de l’uniforme. Il peut paraitre simple, car à entendre le chef de l’Etat dans la cour des Invalides le mois dernier: « L’armée française, c’est l’affirmation par le peuple de sa volonté de demeurer libre…la France doit à son armée d’avoir passé avec la liberté du monde un pacte multiséculaire… » Discours contredit par la réalité ; il suffit de compter les théâtres où la France non menacée dans son intégrité, sacrifie des soldats pour des causes sans causes enveloppées de mots de libre liberté.
Alors, quels conseils donner au jeune multinational dont l’arrière grand-père en 1942 avec Leclerc a vaincu Rommel et prononcé le serment de libérer la France depuis Koufra ?
Koufra où s'en revient l'Histoire.
Koufra en Libye, oasis verdoyante et prospère au bout du désert. Koufra, portail des trésors de la Cyrénaïque. Koufra, proche de l’Egypte, du Tchad, du Soudan et si loin de Tripoli. Koufra qui suinte le pétrole, enjeu de la guerre.
Ces dernières semaines, la belle Koufra aurait été prise par les « rebelles » de Benghazi, reprise par les forces de Kadhafi avant d’être occupée par l’armée soudanaise d’Omar El Bachir avec, disent les mauvaises langues, la bénédiction de l’ONU, de l’OTAN et surtout de BHL.
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