vendredi 20 mars 2015

L'horreur d'Arabie, l'honneur de la Suède



Ce qui se passe en Arabie mérite notre attention. C'est le plus riche producteur de pétrole et le premier importateur d'armes au monde, mais c'est surtout le foyer de la doctrine salafiste, génitrice de l'internationale des égorgeurs.
Le sacre d'un roi nouveau est un événement d'une portée considérable car il est de nature à endiguer l'obscurantisme du royaume des ténèbres et l'exportation de ses idées criminelles.

Imaginez que vous soyez saoudien. Vous auriez adoré votre nouveau roi.

Pour célébrer son intronisation en janvier, Salman a offert à ses sujets une prime de deux mois de revenu ; à chaque fonctionnaire, retraité, étudiant...mais aussi aux salariés du secteur privé, car le patronat à l'unisson n'a pas voulu être en reste.
Le père Noël des sables a libéré avec parcimonie une poignée d'encagés en attente d'être fouettés et aussi trois femmes qui avaient osé prendre le volant.
Enfin, le roi a décrété que les 37 médecins et infirmiers morts du Syndrome respiratoire du Moyen-Orient (MERS) étaient des martyrs de l'Islam ; chaque famille endeuillée a reçu un chèque de 125 mille euros. 
Officiellement 436 personnes seraient décédés de cette terrible grippe, mais en réalité plusieurs milliers. 
Les savants ont formellement identifié le vecteur de transmission de ce virus foudroyant: c'est le chameau. Hélas, pour cause de censure, la population est incapable d'entendre  le message d'alerte lancé par l'Organisation Mondiale de la Santé  « Ne pas  boire le lait de chamelle ou l’urine de chameau !  ». Blasphème abominable que refusent de relayer les autorités car il contredit la sainte parole du prophète Mohamed qui a prescrit il y a quatorze siècles « ...  de suivre les chameaux, de boire leur lait et leur urine  ». 
Le pipi de dromadaire en Arabie, c'est la potion magique, l'élixir miracle en vente dans tous les supermarchés !
L'OMS n'insiste pas car elle risque la fatwa et la visite d'un commando de cinglés !


Pour la première fois dans l'histoire du pays, le monarque saoudien est un alphabétisé bilingue qui lit, écrit, comprend l'arabe et l'anglais. 
On le dit malade, mais il a les moyens de se faire bien soigner. Certes, il est âgé de quatre vingts ans alors que les deux tiers de ses sujets ont moins de trente, mais cela ne l'empêche pas de préparer avec ardeur l'avenir de sa cinquantaine de rejetons.

À peine intronisé, il a chassé tous les barbons de la cour. En moins de quinze jours, la gérontocratie dorée a été politiquement euthanasiée. Le nouveau conseil des ministres comprend désormais des roturiers, mais c'est une réforme de façade. L'essentiel demeure.
La dynastie s'appuie sur trois princes gardiens des sabres du Palais : Mohamed Ben Salman ministre de la défense, (34 ans) Mohamed Ben Nayef (55ans), ministre de l'intérieur, et Mitab ben Abdallah, ministre de la garde nationale (62 ans). Chacun d'entre eux est à la tête d'une armée de plus de cent mille soldats, pour la plupart loués à l'étranger : Pakistan, Egypte, Yémen... Ils sont encadrés par des officiers saoudiens assistés de 20 mille coopérants occidentaux très bien payés.
Pour autant, la maison de Salman est fragile.

L'Arabie est domaine des Saoud depuis 1932.   L'État c'est moi, et je suis le  Gardien des deux saintes mosquées
Monarque absolu, le roi dispose du monopole du dogme. Et il entend aujourd'hui imposer à tous les musulmans de la planète des lois entendues à Médine et La Mecque il y a mille quatre cents ans. De gré ou de force. En laissant boire du pipi de chameau s'il le faut !

L'intégrisme est le socle de la théocratie saoudienne. Sans lui, la dynastie s'effondre. Alors, les rois successifs font de la surenchère. Salman est dans la lignée.
Le pays est devenu un pénitencier religieux qui produit des psychopathes sous l'effet d'une peur omniprésente jamais observée dans le monde depuis l'Inquisition. La population subit un lavage de cerveau permanent. Ryadh veut faire croire que la normalité c'est Arabie et que la folie c'est l'étranger. Sus aux mécréants, par l'argent ou par le sang.

Mais pour tenir la paix sociale, il ne suffit pas de distribuer des libéralités. La société étouffe sous les contraintes et la pauvreté. Un correspondant explique : «   pour subsister, un couple a besoin de 2000 euros par mois. Le SMIC est de 1400 euros pour les nationaux et 600 euros pour les travailleurs immigrés. Entre un saoudien revendicatif et un Indien servile à moitié prix, l'employeur a vite fait son choix... » Selon le Washington Post, plus de deux millions de saoudiens auraient moins de 500 euros par mois pour vivre. Les femmes n'ont pas le droit de travailler sauf dans les rares entreprises qui leur sont réservées, alors les diplômées restent à la maison. 
Le taux de chômage, 12% selon des chiffres officiels, atteindrait en réalité des scores de pays sous développés.
En dehors de la noblesse et de la bourgeoisie d'affaires, le Saoudien est souvent très pauvre. Au surplus, il est condamné à se taire, car en Arabie, on évite d'ouvrir la bouche, même chez le dentiste ! 
Les murs ont des oreilles. Les muttawas veillent.

La Commanderie pour la Promotion de la Vertu et la Prévention est une copie de l'inquisition médiévale. Cette milice de 5 000 fonctionnaires assistés de dizaines de milliers de volontaires fanatiques traque l'hérésie et sème la terreur partout. Un exemple récent : un adolescent organise une boum avec des copains, les muttawa forcent la porte de la maison. Les mômes se retrouvent au cachot. Ils risquent gros : un an minimum pour avoir chanté et dansé, beaucoup plus si on trouve de l'alcool ou du cannabis, ou une copine... voir la peine de mort si l'accusation retient le crime d'homosexualité et de fornication.
À cause des interdits, la vie quotidienne en Arabie est un enfer.

Pourtant, des milliers de femmes et d'hommes luttent pour leur droits élémentaires. Deux exemples :
Rahif Badawi 31 ans, blogueur. Pour avoir clamé la vérité, il a été condamné à dix ans de prison et 1000 coups de fouet.
Walid Abu Al-Khair, son avocat a été condamné à quinze ans mais dispensé de flagellation. Ces deux personnalités étaient déjà des figures héroïques de la jeunesse saoudienne avant de devenir celles des révoltés du monde entier.

Le 16 janvier, Rahif Badawi recevait le fouet en place public. Les images font le tour de la terre. Dix jours plus tard, le nouveau roi Salman était intronisé. On s'attendait à un geste de clémence, il n'en fut rien. Sourd aux appels du couple Obama, de Merkel et même du Prince Charles, Riyadh laissa entendre qu'un nouveau procès pour apostasie aurait lieu afin de décapiter proprement les deux empêcheurs de penser en rond.

A Berlin, on a hoqueté. Le vice-chancellier dépêché à Riyad a signifié le gel d'un contrat d'armement. A Stockholm, où l'un des condamnés avait été distingué en 2012 du prestigieux Prix Olof Palme, on a manifesté. 
La ministre des Affaires Etrangère Madame Margo Wallström a décidé de faire part de la mauvaise humeur de son pays lors d'un sommet de la Ligue Arabe où elle était invitée. Mais au dernier moment, elle a été empêchée de prononcer son discours par les manœuvres en coulisse des Saoudiens. Alors elle s'est fâchée tout rouge : rupture de la coopération militaire avec l'Arabie ! 
Le geste n'est pas symbolique car la Suède, ce n'est pas seulement Nokia et Ikea, c'est aussi Ericsson, Volvo et surtout Saab, un groupe de 13 mille ouvriers qui fabrique des sous marins, de l'artillerie, des drones et des avions dont le célèbre Gripen - concurrent du Rafale - vendu à 240 exemplaires à l'export.
La Suède c'est la 22ème puissance économique mondiale, et sa ministre des Affaires étrangères n'est pas une godiche de l'année!
Agée de 60 ans, Margo Wallström a été Commissaire Européen, Vice-Présidente de la Commission Européenne, Représentante Spéciale du Secrétaire Générale de l'ONU... Sur la scène diplomatique mondiale, c'est une actrice de premier plan.
Elle vient de donner une magistrale leçon de morale, inédite dans l'histoire des relations internationales.

Mais aux yeux des Saoud, elle n'est qu'une femelle dévoilée. L'affront était trop grand, le roi Salman et sa cour sont entrés en rage. Rappel de l'ambassadeur, injonction aux pays satellites de faire de même ; les Emirats ont immédiatement obtempéré. Campagne de presse, appel au boycott, suspension et annulation des visas de voyages... Parallèlement, les Saoudiens ont demandé aux pays Européens « amis » de se démarquer.

L'ambassadeur de France zélé du Palais a réuni le club des hommes d'affaires présidé par Me Mohamed Bin Laden. L'avocat, parfaitement francophone, a fort opportunément rappelé que 80 sociétés françaises ont investi 15 milliards de dollars en Arabie où elles emploient plus de 27 000 personnes...
Bref, la France jette une verre d'eau d'eau sur l'allumette suédoise. La solidarité européenne attendra.
Business is business.

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