dimanche 11 mai 2025

Un matin à Ravensbrück

La grandeur de l’Allemagne est d’honorer celles et ceux qu’elle a jadis martyrisés. Dans les centaines de camps de déportations où des millions d’êtres humains avaient été traités comme du bétail par les nazis, des commémorations ont été célébrées pour le 80ème anniversaire de leur délivrance.                       

En ce premier dimanche du mois de mai, à Ravensbrück où 133 000 femmes ont été parquées, humiliées, forcées, torturées, affamées, assassinées, gazées, incinérées… une foule s’est rassemblée pour les pleurer. 

Admirable présence qui invite à méditer. Sommes nous responsables des actes de notre lignée ? Petits-enfants de bourreaux allemands devez-vous porter éternellement le fardeau des crimes de vos ascendants ? Comment ne pas songer aux descendants des 27 millions de soviétiques morts pour libérer l’Europe du joug d’Hitler dont certains sont aujourd’hui mobilisés par Poutine au prétexte fallacieux d’aller libérer l’Ukraine des nazis ?…Et aux six millions de suppliciés dont les héritiers massacrent les femmes et les enfants de Gaza par dizaines de milliers. Victimes d’hier et bourreaux d’aujourd’hui ne sont assurément pas du même sang.

Sur une esplanade immense recouverte de mâchefer noir, une allée de cendres conduit à une estrade où des musiciens adolescents arrachent des soupirs à leurs instruments. Au micro se succèdent les témoignages, les prières, les discours… Des nuages noirs couvrent le ciel, des bourrasques de vent  glacent l’assistance. Chacun est pétrifié d’émotion en lien avec le paysage, le froid qui monte de la terre, la plainte des violoncelles, le récit des souffrances, le Chant des marais, celui des déportés, entonné à capella par mille voix:

Dans ce camp morne et sauvage

Entouré de murs de fer

Il nous semble vivre en cage

Au milieu d’un grand désert


Aucune bannière, aucun drapeau, seulement des femmes, des hommes, des vieillards et des enfants en poussettes avec un bouquet de fleurs ou une rose à la main. Nul hymne national ni sonnerie aux morts, aucun uniforme au garde-à-vous ! Ici, toutes et tous sont égaux. Rien ne distingue la vingtaine d’ambassadeurs parmi lesquels celui de France, digne et affecté. Pareillement discrets, des ministres allemands prennent la parole pour dire sobrement leur effroi face au réveil de la bête immonde du fascisme partout dans le monde.

Très ému, un général français d’un grand âge est aller incliner ses cinq étoiles devant la plaque accrochée au mur des Nations par le neveu d’une héroïne. « En mémoire des sous-lieutenantes Marie-Louise Cloarec, Eugénie Malika Djendi, Pierette Louin, Suzanne Mertsizen Boitte, opératrices radio du corps féminin des transmissions d’Alger » surnommées les « Merlinettes » parachutées en France occupée en avril 1944, exécutées ici en janvier 1945.

Enfin, la foule silencieuse en lente procession vint déposer couronnes, gerbes et poignées de pétales, au pied du monument aux mortes, face au lac de Schwedtsee où entre 1939 et 1945 furent dispersées les cendres de dizaines de milliers de femmes, d’enfants et de nouveaux nés.

lundi 28 avril 2025

Capitaine algérien de l'armée française


En novembre 1942, les Américains et les Britanniques débarquent sur les rivages du Maroc et de l’Algérie. Soldats sans préjugés, ils tendent la main aux juifs et aux arabes. Les pétainistes rentrent la tête dans les épaules. Liberté, égalité, fraternité…allons enfants de la patrie… Les lendemains chantent. Une nouvelle Algérie va naître, c’est certain. En nombre, les arabes se précipitent dans les bureaux de recrutement pour aller libérer la France du joug nazi.


Abdelkader Rahmani a 17 ans. Son père, docteur ès-lettres lui a appris à manier avec élégance la langue française. Il est berbère né en Kabylie pays décrit par Albert Camus dans son itinéraire de la misère où les enfants meurent de faim. 

Abdelkader est pâle de peau, instruit et  fils « de grande tente »: trois raisons pour être admis à l’école des officiers indigènes d’Algérie et de Tunisie de Bou Saada. Brillant élève, il fait partie de la première promotion de quatre algériens admis à la prestigieuse école de cavalerie de Saumur. Après cinq années de formation (cursus plus long que celui des Français) on lui décerne le grade de sous-lieutenant… à la condition de renoncer à solliciter la nationalité française ! 

Les temps sont confus, les politiques coloniales changeantes et incohérentes. Pour le jeune officier indigène, l’armée est une vocation, c’est le choix de sa vie. Il sait pourtant qu’il lui sera impossible de franchir le plafond de verre des quatre galons de commandant. 

Certes, Chérif Cadi premier polytechnicien musulman a pu se hisser en 1916 au grade de lieutenant-colonel, mais c’est une des rares exceptions et les généraux musulmans sont encore plus rares, l’histoire ne dénombre que le Tunisien Youssuf qui a été étoilé en 1856; le Marocain Kettani le sera en 1954 et l’Algérien Rafa en 1961.


À cette époque, les émoluments des musulmans sont inférieurs à ceux des chrétiens, les affectations restreintes, les discriminations et brimades fréquentes. Même « marié-à-une-française », les couples mixtes n’accèdent pas au mess. En 1950 tous les officiers algériens sont invités à passer un examen pour être confirmés dans leur grade. Pour eux, les temps étaient noirs, tout était prétexte à les éloigner de l’armée depuis qu’ils avaient manifesté leur sourde indignation après les massacres de Sétif, Guelma et Constantine en 1945. Certains avaient vu des civils projetés des falaises de Kerrata et de Bougie. Un officier FMA, (Français Musulman d’Algérie) qui avait été obligé d’assister à ces supplices s’était suicidé.


Alors pour éviter la contagion, l’armée avait proposé d’éloigner les officiers musulmans qui le souhaitaient. Rahmani sera affecté en Corée. Il y gagnera par son courage les galons de lieutenant et la croix de la Légion d’honneur. En 1956, il est au Liban en mission d’observation. Pendant ce temps, en Algérie la guerre totale est engagée et les espoirs de paix sont entravés par la droite revancharde rescapée de Vichy. 


À Paris, les partis politiques s’affrontent dans des joutes oratoires stériles cependant que « rebelles » et  « gardiens de l’ordre républicains » s’entre-massacrent à qui mieux mieux. 

Le détournement de l’avion civil de Ben Bella par l’armée française en octobre 1956 ordonné par un secrétaire d’état en cachette de son ministre et du chef du gouvernement pour saboter toute tentative de négociation, désespère les plus optimistes. Pour les officiers musulmans c’est l’heure du choix. Plusieurs d’entre eux désertent et rejoignent les rangs de l’Armée de Libération Nationale. Ils deviendrons généraux de l’Algérie indépendante. 


Rahmani (le miséricordieux en arabe) reste fidèle à son serment. Nourri à l’école de la République des armées, sans doute un peu naïf, il est persuadé que sa hiérarchie -forcément vertueuse- ignore la réalité du terrain. Alors, méthodiquement, il réunit les preuves des exactions et des injustices. Son volumineux dossier est accablant.   

Avec 52 de ses camarades officiers musulmans, ils projettent  en décembre 1956 de l’adresser  au président de la République : « Notre situation d’officiers algériens est rendue intenable par la lutte sanglante qui oppose nos camarades français et nos frères de sang…Nous sommes et pourrons faire un lien solide entre nos deux peuples…ce qui permettrait d’engager une conversation immédiate et loyale entre les représentants des deux communautés » Bref ils proposent leur intermédiation pour  « une paix des braves ».


Avant de soumettre officiellement leur supplique au Président René Coty, « Chef des armées en titre » mais aux pouvoirs constitutionnels limités, Rahmani consulte la voie hiérarchique et les responsables politiques de tous bords. 

Dans son ouvrage L’affaire des officiers algériens (éditions du Seuil décembre 1958), il relate ses rencontres avec Pierre Mendès France, Daniel Mayer, Buron, Pfimlin, Faure… Il narre aussi les dérobades et les lâchetés, les rendez-vous reportés et manqués avec François Mitterrand ministre de la Justice et Guy Mollet le président du Conseil dont le chef de cabinet lui lance: « et si les Bretons demandaient leur indépendance, que feriez-vous à la place du Gouvernement ? »  Rahmani rétorque: « puisque vous nous assimilez aux Bretons, avons-nous des Algériens députés à la Chambre ? des ministres ? Accepteriez-vous qu’un jour un Algérien soit Président de la République ou du Conseil ? » 


Ultime rencontre et dialogue de sourds avec le général d’armée inspecteur des forces  d’Afrique du Nord. « Il faut que le FLN soit exterminé  » lui dit-il.  « Mais mon général si vous tuez tous ces tueurs, vous devenez vous-même un tueur…et puis alors, avec qui faire la paix ? » L’entretien franc et houleux de quatre heures d’horloge semble se terminer dans l’apaisement: « vous avez ma parole Rahmani, qu’aucun de vous ne sera arrêté, je m’en porte garant…dites le à vos camarades » Trois jours plus tard, Rahmani est  incarcéré au Fort de Saint Denis avant d’être transféré en mars 1957 à la prison de Fresnes sous l’inculpation « de tentative de démoralisation de l’armée ».

De Gaulle le fera libérer quelques mois après son retour au pouvoir. 

Rahmani dont l’histoire a été déformée par la passion et la propagande sera finalement promu capitaine en… 1975.


jeudi 10 avril 2025

"Qui perd gagne" Comprendre le sentiment de revanche de Trump


Pas un jour sans que le vieux monsieur détraqué ne s’adresse aux citoyens du monde. Ses mots sont insensés. Alors aussitôt, angoisse et anxiété se répandent. 

L’avenir est indéchiffrable. Même pour les sachants ayant réponse à tout qui se succèdent à la queue leu-leu sur les plateaux de télévisions. On cherche désespérément à comprendre le pourquoi et le comment de cette guerre mondiale qui refuse de dire son nom.


Le désarroi face à l’épidémie d’injustice et à la montée du fascisme  nous submerge. Il n’y a pas d’autres hypothèses plausibles que celle d’une pathologie cérébrale. En écoutant Trump on ne peut se retenir de s’exclamer « mais il est malade ! » ? C’est un mauvais remake de Charlie Chaplin bouffonnant Hitler en train de jouer avec un ballon de baudruche en forme de globe terrestre (Le dictateur 1940)


À l’exception du courageux Zelensky, le De Gaulle ukrainien, tous ceux qui défilent dans le bureau ovale évitent soigneusement de contredire l’écervelé. Pire, comme menacés par un canon invisible posé sur leur tempe, les chefs d’états étrangers accourus à sa convocation le flagornent outrageusement. 

César, Caligula, Bokassa…les exemples de troubles cognitifs sévères des puissants à travers les âges ne manquent pas. La nouveauté c’est que ce délirium est retransmis à des milliards d’apeurés qui s’attendent à voir le ciel leur tomber sur la tête.  On est en train de Gazaifier les consciences. La psychose collective se répand. Nulle manifestation ni protestation de foule. L’inertie et la paralysie gagnent. Les têtes s’enfoncent dans les épaules de crainte d’être tranchées. Chacun goûte son moment de sursis en s’auto-persuadant qu’il échappera à la foudre.


Pour tenter de comprendre le moteur de ce suicide programmé de l’Amérique qui précède celui de l’Europe, il faut être sociologue, anthropologue, et surtout psychopathologue clinicienne.

Évelyne Larguèche est tout cela. Cette ingénieure de recherche au CNRS a publié nombre d’études académiques très savantes, mais depuis qu’elle est à la retraite, elle écrit des petits livres  accessibles et éclairants. Après L’injure. La blessure du Moi (In Press 2021); La provocation. Au risque de l’image de soi  (In Press 2023), elle vient de publier: Qui perd gagne. Le sentiment de revanche (L’Harmattan 2025).


Comment se fait-il qu’à chaque page de cette trilogie injure-provocation-revanche on pense à Trump alors que son nom n’est jamais mentionné ? Tout à coup ce personnage déjanté qui remplit nos inquiétudes nous apparait transparent. Et si son comportement provocateur et injurieux n’était que l’expression de son sentiment de revanche ?

La revanche est un terme associé au jeu. Le perdant peut se refaire si le gagnant magnanime consent à ses conditions. « Vous n’avez pas les cartes en main ! » lance Trump à Zelensky. Injure, provocation, revanche ? La trilogie est réunie.


Au fil des siècles, le terme revanche s’est répandu par la déformation du mot vengeance. « La revanche est  une disposition qui accorde à celui qui a perdu une nouvelle possibilité de gagner. Action elle est vengeance, résultat elle est annulation » écrit Évelyne Larguèche qui ajoute  « le sentiment de revanche n’annule ni ne se venge, il compense un soi passé ressenti comme perdant par une illusion de toute-puissance et de maîtrise à laquelle il croit et fait croire ».

 

« Qui perd gagne » est un essai d’une centaine de pages qui nous entraine vers la redécouverte de locutions, d’expressions, de postures, et surtout vers  l’usage d’outils conceptuels évidents qui avaient échappé à notre réflexion. On navigue entre le « je » et le jeu dans lequel le gagnant n’est pas celui que l’on croit. La pensée du lecteur qui ignore les cheminements savants de la psychanalyse est guidée pas des exemples nombreux puisés dans le sport ou la littérature. On côtoie le tennisman Djokovic avec Zweig, Kafka et Dostoïevski, le Mondial de foot et la boxe avec une ribambelle d’écrivains: Diderot, Corneille, Khadra, Ernaux , Gary…mais aussi le compositeur-chanteur Jean Ferrat et même le général De Gaulle ! Ce fourmillement d’exemples conduit le lecteur à marquer une pose de réflexion à la fin de chaque paragraphe: bon sang mais c’est bien sur !… avant de reprendre sa lecture.

Évelyne Larguèche n’a pas cédé à la tentation du best seller. Il n’y a pas dans « Qui perd gagne » la moindre référence à l’actualité, pour autant, sa lecture offre l’apaisement du savoir à ceux qui cherchent à comprendre le sentiment de revanche de Trump et des autres agités du bocal.


 

 



 




mardi 25 mars 2025

Où est la défense passive ?

Dans le vacarme de vociférations qui couvre toute réflexion, écoutons ceux qui se taisent. 

Sans regret ni honte, l’artisan que je rencontre a fui son pays en guerre avec sa famille. Je sais qu’il a perdu un frère et deux copains. À mes interrogations compatissantes, il reste muet le regard vers le ciel, ne répond rien mais me serre la paume à deux mains 

À cet autre, centenaire honoré de médailles prestigieuses  à qui je demande à brûle pourpoint les souvenirs d’une terrible bataille, je reçois le regard songeur et un silence prolongé. 

À mes questions d’enfant curieux, mon grand-père brancardier héros de 14-18, se figeait un instant dans ses pensées lointaines et m’entrainait immanquablement  : «  viens, allons faire le tour du jardin  !  »


La perception diffuse de la guerre

Les va-en-guerre ne sont pas ceux qui l'on vécue. Rares sont les rescapés, mutilés, traumatisés sur les plateaux de  télévision. La guerre est perçue comme une abstraction d’images, elle est sans odeur de sueurs froides, sans fracas ni hurlement,  sans nausée qui retourne les tripes, sans rougeur poisseuse… Les causeurs de salon, faiseurs d’opinion dénoncent les capitulards, les munichois... et se décernent des brevets de patriotisme par anticipation. Leurs contradicteurs, ni pacifistes ni militants de la paix, sont des obligés de la Russie qui hier encore leur payait grassement des jetons de présence, des conférences, des tribunes dans leurs journaux. 


Lorsque le décret de mobilisation s'affichera sur les smartphones et que Paris sera menacé il faut espérer que devant le danger commun tous s’aligneront en rang. Hélas il est à craindre qu’ils se précipitent sur les routes, matelas sur le toit de leur voiture vers les frontières du sud comme des étrangers qui s’en retournent au pays. 


Insouciance collective

Obnubilée par les échéances électorales la classe politique feint d’ignorer que la guerre suspend la démocratie. Elle est convaincue que la paix tiendra au moins jusqu’aux municipales de l’an prochain ! Le Président tente par petits phrases, de rassembler sans trop alerter la population accrochée à son pouvoir d’achat. L’inflation est atone, le chômage contenu, le prix de l’essence à la baisse, la croissance marque un petit point (contre six en Chine)… On se résigne, on se satisfait de ce fond de verre, chacun prépare ses vacances estivales. La guerre de Russie comme la réforme des retraites attendra bien la rentrée.


À l’affiche d’un théâtre sur les Champs Elysées, un ancien ministre vaniteux de la justice soliloque ses souvenirs de plaideur cependant que s’achèvent trois procès de la honte et de la nausée qui sont autant de miroirs sociétaux: celui d’un ex-président de la République pour corruption; celui d’un chirurgien violeur de 299 enfants; celui d’un hominidé qui a drogué son épouse pour la livrer à 51 détraqués sexuels. 


La Russie paiera !

Habitués à son confort et à la tranquillité le Français ne voit dans la  guerre que les inconvénients de son coût. Où trouver l'argent ? emprunt national, captation d’épargne, confiscation des avoirs russes ? Pas question d’augmenter les impôts a rassuré le Président. Chacun pense avec confiance: « la Russie paiera ! » tant il est vrai que les vaincus sont toujours les payeurs et qu’il ne fait pas de doute que nous serons vainqueurs.

Pour rassurer tout un chacun, l’Union Européenne a rassemblé les intentions de crédit des nations, soit au total 800 milliards d’euros. Comment les dépenser; qui définira l’expression des besoins et fixera les priorités; comment fédérer les industriels concurrents, quelle centrale d’achat, quel commandement intégré  … ??? Mille questions posées en 24 langues pour créer en toute hâte une néo-OTAN sans les États-Unis félons.


Ter repetita

Comme en 14, comme en 39, la France une nouvelle fois est confrontée aux leçons de son histoire.

Il faut lire le dialogue entre les frères Thibault écrit par Roger Martin du Gard. Il est daté du 17 juillet 1914 soit une semaine avant le début de l’hécatombe qui fit 18 millions de morts et 21 millions de blessés. On se surprend à remplacer Allemagne par Russie, Kaiser par Poutine, Poincaré par Macron…

Le 30 septembre 1938, une foule de Parisiens « ah les cons ! » acclamaient Daladier de retour de Munich où il avait sacrifié les Sudètes de Tchéquie contre  la fourbe promesse d’Hitler : « L'Europe connaîtra ensuite la paix pour mille ans ! » Une année plus tard, l’avancée des troupes allemandes qui avaient contourné la ligne Maginot, jetait sur les routes 10 millions de civils en panique.

En aout 1939 Hitler et Staline scellaient un pacte d’amitié qui ressemble sinistrement à celui qui se négocie entre Trump et Poutine. 


Réarmement

Le scénario de la guerre qui se prépare ne sera pas le même. Aujourd’hui, l’infanterie est robotisée, les avions téléguidés… Les combattants ne regardent plus la mort en face. Elle surprend sans prévenir comme à Gaza où les dronistes tuent sans risque d’être tués; comme au Liban où le Hezbollah a été décimé par des smartphones piégés. 

La priorité du réarmement de la France n’est pas l’usinage d’engins d’artilleries obsolètes mais la production massive de systèmes télécommandés et de robots dopés à l’intelligence artificielle.

L’arme première étant celle du renseignement, la mise en commun des ressources européennes serait prodigieusement efficace. L’histoire de Gustave Bertrand est édifiante. La coopération de cet officier français avec ses homologues polonais et britanniques a permis de casser les codes de la machine à crypter allemande Enigma, et partant, d’écourter le dernier conflit mondial de deux ans !

 

On ne prépare pas la guerre uniquement en fourbissant les armes

Il est à prévoir que le champ de bataille de l’Ukraine sera contourné d’attaques par procuration qui viseront entre autres la Pologne, l’Allemagne, l’Angleterre et la France. La Russie ne manque pas de satrapies et de mandataires. Les alliés historiques de Moscou: Algérie, Hongrie, Azerbaijan… resteront-il neutres ? Ils ont déjà commencé à répandre de l’huile sur le feu avec la complicité objective des extrêmes droites européennes qui comme les communistes de 1939 sont divisées sur la poursuite de leur allégeance au Kremlin.  


Comme en 14, comme en 39, la population n’est pas préparée à recevoir le choc d’armes offensives inédites. La vulnérabilité est numérique:  communications, informations, eau, électricité, avions, trains, TikTok et Amazone…tout peut être stoppé y compris les Tesla qui fonceront dans les murs. Ces attaques anonymes sèmeront le chaos dans une société désarmée car il n’existe pas de parade ni de dissuasion probante au numérique anonyme et encore moins au quantique. C’est pourquoi il serait raisonnable de se préparer à subsister en mode survitalistes. 


La Suède on invite ses citoyens à constituer des réserves de survie d’une semaine. La Finlande prévoit des stocks de carburant, médicaments, céréales…pour neuf mois. 

En France, rien. Pire, aucune mesure préventive, aucune mobilisation de ressources humaines, aucune réquisition ne paraissent pour l’instant envisagées. Sans bouclier, le bras qui brandit le glaive sera vite coupé.

Le pays persiste à tourner le dos à son Histoire. La défense passive est passive.


samedi 15 mars 2025

Fachosphère

La triangulation Moscou, Washington, Tel Aviv bouleverse la géostratégie mondiale. Ces trois pouvoirs sont devenus les propagateurs d’une idéologie qui les rassemble: le fascisme.  Car comment qualifier autrement cette volonté de puissance dont le cynisme fait penser à celui des empereurs romains ou des dictateurs du tiers monde ? 


Nous sommes directement concernés. L’espionnage de Poutine, la propagande de Netanyahu, les intimidations de Trump-Vance sont sur le point d’atteindre leur objectif commun: faire basculer le vieux continent dans l’autocratie réactionnaire.


Déjà la droite radicale est au pouvoir en Hongrie, en Italie et en Belgique. Elle  participe aux gouvernements de Slovaquie, de Finlande et des Pays -Bas. En Allemagne et en France, elle représente un électorat important. Si nous ne voulons pas être submergés par l’idéologie brutaliste il est urgent de se réveiller.


Les activistes de l’ombre du RN

En France, le Rassemblement national est passé à deux doigts de la victoire. Frustré, mais gonflé d’espérance, il attend les prochaines échéances qu’il prépare activement. Mais ses militants les plus radicaux s’impatientent. Hier ils taisaient leurs convictions de fachos, aujourd’hui, ils paradent encouragés par  l’exemple de la « bascule » de Washington. Tous les suprémacistes et les racistes, qui sommeillaient s’ébrouent avec arrogance. Leur moment de gloire approche.  Ils prennent de l’assurance. Certains lèvent le bras paume tendue et vocifèrent des outrances sur tous les tons pour se faire remarquer des vainqueurs de demain. « J’étais un des premiers à vous rejoindre… » diront-ils en réclamant leur récompense. 

Devançant le verdict des urnes de 2027, ils légifèrent par anticipation sur les plateaux des chaînes de télévisons complaisantes à leurs idées. Ils exaltent la patrie, la nation, la souveraineté, l’armée, le culte du chef… Certes, mais aussi  l’ethno-différentialisme, le sectarisme, la défiance, le dénigrement des immigrés et de la religion musulmane. Autant d’insanités qui  sont ressenties avec un malaise profond par toutes celles et ceux dont le faciès ou le patronyme est devenu suspect. Mais attention ! Le RN « héritier de Pétain » selon la juste expression d’Elisabeth Borne en 2023 ne sont plus antisémites, ils ont trouvé provisoirement un remplaçant.


« Le juif d'aujourd'hui, c'est le migrant du sud. Il est latino, subsaharien ou arabe. Oui, l’arabe d’aujourd’hui est le juif d’hier » écrit  le blogger Z qui ajoute prémonitoire avec raison: 

« L’histoire de leur persécution et le partage de leur souffrance vont inéluctablement les rapprocher » 


Je ne savais pas !

L’extrême droite prépare les duplicatas des lois scélérates de 1940 appliqués aux musulmans qui devront faire acte de soumission et sans doute se signaler d’un croissant vert et circuler tête nue munie d’un  pass numérique. 

Ce n’est pas une fiction mais la perspective politique assumée du RN qui entend expulser en masse, restreindre le droit à la nationalité, légiférer sur sa déchéance et partant, dé-naturaliser ceux dont les grands parents ne sont pas français. Ce programme est inscrit dans la proposition de loi déposée par Marine Le Pen. 

Il faut consulter le site du RN ! Nul ne pourra dire: « je ne savait pas ! »

Article 1er I. - Sont interdites sur tout le territoire de la République ou à destination de ce dernier, sous toute forme et par quelque moyen que ce soit, la pratique, la manifestation ainsi que la diffusion publique des idéologies islamistes…

Article 6. -Toute personne dont il serait dûment établi (par qui ?) qu’elle a, de façon habituelle, manifesté ou diffusé une des idéologies visées à l’article 1er peut se voir refuser l’accès à la fonction publique, en qualité de titulaire ou de contractuel, ou, en être révoquée, ou encore, voir son lien contractuel, le cas échéant, résilié ou non renouvelé, pour ce seul motif.  

Les militants et sympathisants zélés du FN qui lisent à la pointe du crayon le programme de leur parti ont pris les devants. Ceux qui exercent des responsabilités se croient déjà tout permis. Ainsi un éminent professeur d’histoire de la Sorbonne a t-il été suspendu pour racisme avéré envers un agrégatif. Dans la fonction publique, dans l’armée, dans le privé les ségrégationnistes font discrètement « le ménage » surtout parmi les binationaux visés par une autre proposition de loi de Marine Le Pen. 


Où sont les opposants ?

À de rares exceptions, dans son ensemble la droite libérale hier encore majoritaire baisse la tête. Celle de Macron est pour l’instant inaudible. Elle feint d’ignorer que le prolétariat qui fait vivre la France est importé et que les innombrables « secteurs en tension » prospèrent grâce aux sans-papiers. La grève des immigrés est un scénario cauchemar car sans arabes, sans africains, sans asiatiques, le pays serait à l’arrêt. Le grand remplacement par des smicards lepenistes est une utopie. Quel travailleur « de souche » accepterait d’aller faire un boulot éreintant pour 9,40€ net de l’heure ? La migration des peuples est mondiale. Hier, les Américains et les Européens allaient en Afrique chercher des esclaves. Aujourd’hui ils affluent au péril de leur vie avec l’espoir d’être affranchis par l’obtention d’un permis de séjour qui leur ouvrira les droits à la liberté, l’égalité, la fraternité.


La droite dite « républicaine » tourne facho « Qu’ils crèvent tous, Israel fait le travail de l’humanité » s’emporte Louis, le fils de l’ex Président Sarkozy, sans provoquer la moindre indignation. Pourtant, dans cette phrase immonde si vous remplacez Israel par Palestine vous êtes passible des tribunaux ! Et c’est ainsi que l’outrance verbale des fachos se banalise.

Où sont les grandes consciences héritières de Zola, de Crémieux, d’Hessel, Mauriac, Veil …? Où sont les gaullistes, les démocrates chrétiens, les francs-maçons…où sont les centristes de raison ? 

Où est la gauche de la gauche, où est la sociale-démocratie ? De Mélenchon à Hollande, pour un plat de lentilles ils ont laissé gangréner le séparatisme et les dissensions.  


C-News

Sur cette chaine de désinformation continue, les mêmes experts de rien donnent leur avis sur tout. Les "pros" nous bourrent savamment le mou. 

On se surprend à fredonner la chanson:  «  dans les poulaillers d’acajous, les basses-cours à bijoux

 

On entend la conversation

D'la volaille qui fait l’opinion   

Ils disent:


On peut pas être gentils tout le temps

On peut pas aimer tous les gens

Y a une sélection c'est normal

On lit pas tous le même journal


Mais comprenez-moi, la djellaba

C'est pas ce qui faut sous nos climats

Mais comprenez-moi, à Rochechouart

Y’a des taxis qu’ont peur du noir »

Mais comprenez-moi c'est inquiétant

Nous vivons des temps décadents… »


(Poulailler’s Song Alain Souchon)



Algérie, l’obsession

L’affaire Boualem Sansal a probablement été montée de toute pièce par d’astucieux marionnettistes français et algériens dont les ambitions politiques convergent. De chaque coté de la Méditerranée deux pouvoirs affaiblis l’un par l’âge, l’autre par l’obsession du RN veulent en découdre. Nostalgiques de l’ALN et de l’OAS, ces négationnistes falsifient l’histoire et tentent de réveiller les instincts qui sommeillent. 

Dans cinq ans on commémorera le bicentenaire de la colonisation de l’Algérie; dans quelques jours le 63ème anniversaire des accords vers son indépendance. La cohabitation charnelle de ces deux peuples n’est pas terminée, la fusion perdure par l’intégration de millions d’immigrés algériens en France dont la plupart ont acquis la nationalité. L’hostilité n’est pas entre les familles et les peuples entremêlés, mais entre les régimes politiques.

L’Algérie est « non alignée », elle copine avec l’Amérique mais s’arme en Russie. L’Élysée et El Mouradia ne sont pas diplomatiquement au diapason, alors les discours se nourrissent d’outrances. Alger et Paris se réciproquent des affaires d’espionnage et de cinquième colonne auxquelles les opinions restent indifférentes, tout comme sur la question du Sahara marocanisé. 

Le journaliste Jean Michel Aphatie qui cherche à se faire remarquer cite les Ouradour de la colonisation entre 1832 et 1955. De l’huile sur le feu.  Du carburant pour alimenter les haines ! Certes, Algériens et Français se sont entre-massacrés lamentablement, c’est chose reconnue; mais ensemble ils ont chassé les nazis, libéré la Tunisie, la Corse, l’Italie, la Provence, Toulon et Marseille, les Vosges et l’Alsace…des centaines de milliers de morts main dans la main, alignés côte-à-côte dans les cimetières que nul ne va visiter. Ce récitatif qui devrait rapprocher les héritiers des rescapés est occulté ainsi que toutes autres perspectives de devenir commun. 

Si demain le gouvernement décrète la mobilisation générale pour monter au front en Ukraine, gageons que ceux qui iront se planquer à Alger, Tunis ou Rabat ne sont pas ceux que l’on croit.

mardi 4 mars 2025

Flâneries odonymiques à Tunis

Le nom de rue est le lieu d’hébergement, l’étiquette complémentaire de l’identité, l’adresse obligatoire de tous les domiciliés. Dans les villes du nouveau monde, elles sont affublées d’un numéro. À New-York, on se donne rendez-vous au coin de la 8ème et de la 34ème alors qu’à Paris, on se retrouve au bistrot de l’angle de l’avenue du Président Roosevelt et du Président Wilson. Rassurons nous, il n’y aura jamais en France une assemblée d’édiles pour donner le nom de Trump pas même une impasse. 

L’odonyme est la désignation d’une voie de communication par un nom propre. L’odonymie est l’étude des noms des rues. Cette discipline est inconnue en Californie où l’imagination se limite aux « Ocean Beach Bd» et « Pacific Beach ave ».  

En France, « l’odonymologue » se régale car y a 1,5 millions noms de rue dont l’occurence est souvent banale: entre celle de l’Église, celle du Marché ou de l’École, il y a aussi les grand personnages Pasteur, De Gaulle, Jaurès, Hugo qui sont en bonne place tout comme les rois mais jamais l’empereur. On recense seulement 7,5% de femmes car les conseils municipaux sont peuplés de misogynes ! Y compris à Paris où la maire a débaptisé la rue du Maréchal Bugeaud, sabreur d'algériens, remplacé par l’ultime Compagnon de la Libération Hubert Germain. Quitte à cicatriser les plaies d’Algérie en ravivant les polémiques, j’aurais préféré une plaque Anne Beaumanoir

Pour la plupart des passants l’odonyme est inconnu. Qui est ce quidam qui squatte le nom de ma rue ? Quels faits lui valent cette gloire postale toujours posthume. Le parisien connait la Place du Trocadéro, la rue d’Odessa, le boulevard Sebastopol, l’avenue Mac Mahon, la rue de Lourmel, le Pont de l’Alma, le métro Malakoff…il méconnait la guerre de Crimée qui fit entre 1853 et 1856  sept cent mille morts dont cent mille soldats  français !  Contre l’oubli la plaque de rue n’a qu’un temps. D’ailleurs, elle change de nom au gré des agitations de l’histoire. Retiendra t-on ma proposition de renommer la très chic avenue Franco-Russe: Président Volodymir Zelinsky ? Tout est possible. Seuls les Champs Elysées sont assurés de l’éternité !

L’odonymie est passionnante car elle révèle l’évolution de la société dans la cité. Le monumentale Dictionnaire des rues de Paris de Jacques Hillairet est une somme de savoir qui émerveille le promeneur. Aucune autre ville au monde ne possède autant de matière à érudition…sauf peut-être la ville de Tunis dont l’Histoire surprenante a été racontée en 700 pages par Paul Sebag il y a trente ans.

Il y a deux mois, l’une de ses disciple, Hasna Ghoul a soutenu une thèse de doctorat à l’Université de Rouen Normandie: « Les noms de rue de la ville de Tunis ». Ce travail laborieux très savant écrit soigneusement se lit comme un roman. On lui souhaite l’avenir d’une édition de poche pour guider l’amateur dans les dédales de l’une des plus belles cités de la Méditerranée car son catalogue savant illustré invite à déambuler le nez en l’air.

Chaque plaque en émaille bleu tracée en lettres bâton françaises et calligraphiée en langue arabe raconte l’histoire de la sociologie du lieu. En universitaire scrupuleuse, Hasna Ghoul détaille en quatre parties les aspects environnementaux, sociolinguistiques, historiques, glottopolitiques. Mais pour autant, ce découpage académique et l’usage  de concepts savants ne parviennent pas à occulter la passion de la chercheuse que l’on devine émerveillée par la découverte de chaque odonyme.

Le néophyte retiendra l’histoire de la célèbre rue des bordels de la médina qui portait le nom d’un Sidi promptement effacé par des intégristes indignés en 2011 cependant que la plaque de la « Rue des Charcutiers » a seulement été gribouillée. On s’interroge sur la traduction et la prononciation en arabe de la « Rue des Moniquettes »  qui doit faire rougir et rire les collégiens. On s’étonne de la célérité des autorités à rétablir en Avenue de Paris celle qui en une nuit avait été baptisée Avenue de Gaza. Enfin, on sourira à la transcription bien prononcée de la « Rue du tribounal » ou de l’outrage à la légendaire propreté du pays helvète car la « Rue des Suisses » est jonchée d’immondices.

Contrairement à la légende propagée par les anciens colons: après l’indépendance, la « Place Anatole France » n’a pas été rebaptisée « Place Anatole Tunisie » mais Place de la République. 

Fort heureusement, rien n’efface les souvenirs de jeunesse, ainsi les lycées Carnot et Cailloux devenus Bourguiba et Flaubert restent chez nos anciens élèves attachés à leur appellation d’origine. 

samedi 8 février 2025

Make Tunisia great again

samedi 1 février 2025

Trump et les damnés de la terre

Triste moment que celui de l'intronisation de Trump: demi dieu, mi fou, mi bouffon, prenant des postures d'adulte pour proférer des niaiseries d'enfant, flanqué d'une première dame masquée d'un énorme chapeau, entouré d'une famille endimanchée à la mine gourmande, devant un auditoire de milliardaires en pâmoison qui applaudissent chacun de ses mots. Bénédictions catholique et juive, oracles, cantates et trompettes pour l’arrivée du nouveau Messie. Le Mozart français de la finance n'avait pas été invité à cette loufoquerie, mais l'italienne Mélonie - en souvenir du Duce peut-être - en était. Et aussi les représentants de tous les partis fascistes européens. La retransmission en mondovision a déchainé l’enthousiasme des commentateurs des chaines d’informations à la solde de leurs richissimes propriétaires.

Le chef de l'armée la plus puissante du monde et son assistant l'homme le plus riche de la planète ont promis le bonheur aux Américains et le malheur aux autres.  En France, Bardella a exulté  : «  Le courant des idées que l'on porte (au RN) s'exprime aux États-Unis  ». 

Colonialisme d’abord, ONU en syncope     Tout comme Mussolini qui du haut d’un balcon de Venise promettait aux Italiens d’envahir la Grèce, la Tunisie et l’Éthiopie, Trump veut asservir le Groenland, la Panama et la Canada. Ce n'est pas une boutade ni une déclaration écran de fumée pour éviter d'évoquer les sujets préoccupants de l'Asie, l'Europe ou le Moyen-Orient,  non  ! c'est le hors d'oeuvre d’une goinfrerie.  Le Canada deviendra une satrapie, le Panama un comptoir, le Groenland un territoire militarisé. Comme pour l'Ukraine, il est certain qu’aucun «  ami  »  n'ira donner sa vie pour les défendre. Et si le Danemark et le Canada, membres fondateurs de l’OTAN sont attaqués, aucun pays européen ne se prévaudra de l'article V de la Charte pour voler à leur secours. 

La doctrine de liberté des peuples à disposer d'eux mêmes n'est plus. Heureux les pays qui ne possèdent ni pétrole, ni terres rares, ni autres richesses convoitées car aucune nation n'est désormais à l'abri de la bande des prédateurs de Trump. L’ONU est en syncope. Ses résolutions sont chiffons de papier, ses forces d'interpositions casquées de bleus sont domestiqués par l’assaillant. Les trois principaux membres permanents du conseil de sécurité échangent aimablement tour à tour leur véto. Le Royaume Uni et la France à la remorque, se demandent encore si elles sont les plus petites des grandes puissances ou les plus grandes des petites nations.  

Diplomatie de l’échangisme et du cynisme  Dans le Monopoly mondial, il n’y a que trois joueurs: CHINE, USA, RUSSIE. Quelques autres invités sont parfois autorisés à sortir de la case prison pour faire un petit tour avant d'être sur un coup de dés pipés, ramenés à la case départ. Échangerai le Groenland, le Panama, le Canada, Cuba contre l’Ukraine; l’Iran contre Taiwan. J'achète en bloc le Yémen, le Somaliland, l'Érythrée et le Soudan...give me a price guy ?  

À Versailles en 1918, à Yalta en 1945, les grands avaient tracé les frontières et découpé le monde en zones d’influence. C'est la fin des illusions, celle des principes qui plaçait l'humain au centre de toute réflexion. L’avenir est au cynisme assumé. Le monde est devenu une  cour de récréation où les plus costauds harcèlent les faibles, humilient les trouillards et volent les pauvres. L'iniquité, l'injustice, la raison du plus fort sont devenues la règle imposée par l'exemple de trois empires qui  se partagent le monde. Qui a commencé à transgresser la règle du jeu en toute impunité ? 

Coalition des suprémacistes MIG & MAGA  Le MIG (Make Israel Great) est le complément spirituel du MAGA. Depuis 1945, les intégristes juifs sont parvenus à lier leur destin à celui du peuple américain pour faire progresser leur projet biblique. L’élection américaine a fourni un formidable espoir à tous les racistes, suprémacistes, homophobes, colonialistes, annexionnistes. Trump a été élu sur un programme mercantilo-mystique qui les rassemble.  Alors que moins de 20% des électeurs juifs ont voté pour lui, plus du quart de ses électeurs sont des sionistes chrétiens. Pour ces authentiques fascistes Trump est le Messie qui va créer le Grand Israel rêvé qui s’étendra de l’Euphrate au Nil. 

L’ambition MIG a fusionné avec celle du MAGA. Israel et les États-Unis sont en train de muter en théocraties que seule l’alternance démocratique des prochaines échéances électorales permettra de distinguer du Vatican, de l'Iran, de l'Arabie ou de l’Afghanistan. Il est même à craindre que la dynastie Trump survive à son fondateur.

Les grands enjeux   Le déploiement de la volonté de puissance de Trump aura des effets planétaires et dont il apparait déjà que seuls la Russie et la Chine pourront à la marge, contrarier. Ainsi, la Russie dont l’expérimentation de missiles hypersoniques a renversé le rapport de force avec les États-Unis. Ainsi la spectaculaire irruption de DeepSeek une « start up" chinoise dans l’intelligence artificielle où l’Amérique pensait avoir une avance de centaines de milliards.

Cependant, l’Europe de l’armement et de la défense est depuis 25 ans un sujet de réflexion et l’Europe du numérique vient seulement de se réveiller la semaine dernière.

Il est probable que la physionomie politique des pays de l’union européenne changera très vite car Trump va soutenir ouvertement toutes les formations d’extrême droite. Aux bordures de l’Europe, les frontières de l’Est risquent de faire l’objet d’une diplomatie mercantile dont l’Ukraine sera la première monnayée. 

Au sud, le journaliste franco-marocain Mustapha Tossa prédit quelques tremblements de Trump en terre nord africaine. Le flirt diplomatique poussé de l’Algérie, alliée stratégique de la Russie avec l'Iran pourrait reléguer ce pays dans  la catégorie des états voyous «  rogue states  ». Washington a toujours considéré que l’Afrique du Nord relevait d’abord de la sphère d’influence de la France mais Trump pourrait rompre avec cette tradition en favorisant celle de l’Italie.

L’opium des gouvernants   Chacun a pris conscience qu’un battement de cils de Donald peut provoquer des crises violentes aux quatre coins du monde. Les envolées inattendues et déroutantes de ses propos sont tellement anxiogènes qu'on s’interroge sur les possibles calculs maléfiques d’une trêve imposée au génocide de Gaza et aux 100 jours pour faire la paix en Ukraine. 

À contempler la cérémonie d’intronisation on se demandait si la Maison Blanche ne devait pas désormais son nom à la couleur de la poudre consommée plutôt qu’à celle de ses murs. Les Américains ont un coup dans le nez: 20 millions d’entre eux sont soignés pour des troubles psychologiques liés aux stupéfiants. Près de cent mille morts chaque année par overdose de Fentanyl, la drogue du « zombie »

La France n’est pas épargnée. Ce secteur florissant fait « vivre » plus de deux cents mille chômeurs. Près d’un million de fumeurs de canabis, plus d’un million de snifeurs d’héroïne, 750 000 d’avaleurs de pilules décervelantes. Le marché est en pleine expansion. Toutes les catégories sociales sont concernées, y compris la haute administration dont une partie est gangrenée par la corruption. 

La drogue est la menace de déchéance à moyen terme de l’Amérique et de l’Europe. La demande est exponentielle. Les drogues naturelles coûtent chers, celles de synthèses à bon marché sont importées des usines d’Asie.

C’est la revanche des guerres de l’opium qui ont jadis asservi la Chine à l’Occident.  Déjà en 2017 Trump en visite à Pékin accusait les chinois de fermer les yeux sur le trafic de Fentanyl. Par des législations répressives sans merci les pays d’Asie protègent leurs populations de ce fléau, mais dans le même temps, elles laissent prospérer sous leur contrôle les mafias exportatrices de pilules de mort. 

La fin du monde programmée   La principale peur panique qui sourde ne vient pas seulement du délirium d’un inculte golfeur septuagénaire qui se croit maître du destin de chacun, elle est dans le constat désormais visible de la déchéance de la planète dont la destruction est en cours. 

Désordres climatiques, disparition des oiseaux, des insectes, des forêts, des eaux, des glaciers, des airs…Prolifération des robots numériques sans yeux ni oreilles ni entrailles, sans raison humaine, totalement et intelligemment artificiels.

Déjà le citoyen épié de partout se sent numériquement transparent et totalement asservi à son serveur, il pressent son grand remplacement car si une petite partie de la surface terrestre devait être momentanément  écologiquement épargnée, elle ne pourra pas contenir toute l’humanité. L’intelligence artificielle est  prédictive. Elle est capable de donner l’année où l’air de Paris deviendra aussi irrespirable que celui de Delhi aujourd’hui. 

Inquiet de la disparition des merles et des passereaux Mauriac  en 1961 alertait: « La destruction est en cours et vous ne la voyez pas » 

Aujourd’hui on la voit. Sauf Trump évidemment !