La Libye est un patchwork de plus de cent tribus. Kadhafi avait mis en place un système politique inédit de « bedouinocratie » qui est aujourd’hui à la dérive. Depuis 40 ans les révoltes ont été incessantes. La plupart étaient fomentées par les USA, GB et FR et concernaient la région de Derna, Tobrouk, Benghazi où se trouve le pétrole. La rébellion islamiste de 1996 et la répression de la mutinerie de la prison d’Abou Salim en 2005 ont définitivement coupé Kadhafi de la population sans que pour autant une alternative émerge.
L’ingérence armée en Libye est un « hold up » franco-britannique pour ouvrir une relation tout à fait bénéfique avec le nouveau pouvoir de Benghazi dont on espère qu’il saura se montrer généreusement reconnaissant. Accessoirement l’opération permet de geler les avoirs libyens en banque à Paris et Londres (une paille de 200 milliards dit-on) et de mettre sous tutelle les revenus du pétrole de la Cyrénaïque.
Le pacte entre Sarkomeron et les insurgés de Benghazi est probablement de même nature que celui scellé jadis entre Roosevelt et Fayçal pour la fondation de l’Arab American Petroleum : gagnant/gagnant, fifty/fifty.
On peut s’offusquer de la manœuvre audacieuse d’une coalition de prédateurs soucieux de leurs intérêts. Mais peut-on en matière de politique étrangère se contenter de jouer à la marelle ?
Tous les efforts alternés de domestication et de déstabilisation du régime libyen ayant échoué lamentablement depuis quarante ans, la tentation était grande de mettre à profit une conjoncture internationale favorable.
Les états-uniens sont empêtrés dans un déficit incompatible avec une nouvelle guerre ; les Russes ont une armée tout juste capable de réprimer les pauvres Tchétchènes, les Chinois ne sont pas encore menaçants.
Au niveau régional, la Turquie n’a pas atteint l’influence à laquelle elle aspire ; l’Algérie est en état insurrectionnel permanent ; l’Egypte et la Tunisie libres ne sont plus solidaires du dictateur Libyen.
Quant aux autres pays arabes, leurs dirigeants passent leur vendredi dans un jet prêt au décollage pour le cas où le peuple à la sortie des mosquées se ferait trop menaçant.
Enfin, au plan interne, le vieux Kadhafi complètement azimuté n’offre plus à ses tribus que la perspective d’une gouvernance par des rejetons minables.
Dans ce contexte Français et Britanniques auraient eu tort de se priver de l’occasion de faire main basse sur le grisbi!
Mais pas question d’avouer au grand jour la tentative de rapine avec préméditation! On tourne autour du jackpot car il faut ménager les lecteurs de la Comtesse de Ségur. C’est pourquoi les chapardeurs ont imaginé un roman.
Il était une fois un charmant écrivain-philosophe-reporter-millionnaire-chemise et dents blanches qui s’en était allé prendre le soleil à Benghazi. Là-bas, il vit des choses vilaines qu’il s’empressa de raconter dès son retour à Paris.
Le chef des cœurs valeureux en apprenant que la liberté était bafouée en Libye tomba de l’armoire. Indigné, il alerta ses camarades de la bande des G8. C’étaient tous des dégonflés surtout l’Allemande qui lui dit : « vas-y toi-même ! ». Seule, l’Albion se montra bonne camarade et aussi le grand Ricain qui pour ne pas perdre la face, balança depuis un rafiot une centaine de pélots en limite de date de consommation.
Dans la bande des G20 aucun des costauds ne voulut être de l’expédition mais le plus petit, un émirat habitué aux placements à risque, pour faire l’intéressant fit un pas en avant. Une autre principauté du Golfe qui ne fait partie d’aucune bande fayotta ses services contre la promesse d’une invitation pour un week end à Deauville en mai prochain.
Les autres gangs de Rapetou les 15, les Afros, les Rebeu, les BRICS, tenus à l’écart du coup, ruminent depuis leur déconvenue dans l’attente de jours meilleurs.
Dans l’hexagone, pour ne pas heurter l’intelligence des votants, les politicards s’en vinrent à suspecter quelques manœuvres façon billard à trois bandes. Ainsi, il y aurait chez les cht’i un profond sentiment de solidarité avec les Tripolitains, de nature - si l’on en croit les instituts de sondage - à faire basculer le vote de toute une région.
D’autres observateurs aguerris évoquent plus sérieusement l’émergence d’une nouvelle doctrine française en matière de politique arabe : Paris interdit aux dictateurs de tirer sur leur peuple sous peine de représailles sanglantes.
Pour la petite histoire, il parait qu’en décembre dernier, la célèbre ex-ministre aurait menacé de bombarder le Palais de Carthage ! Ce qui aurait précipité la fuite de Ben Ali.
Fort de cette réussite, l’Elysée aurait décidé de pousser l’expérience plus au sud et de libérer la rue arabe depuis la méditerranée jusqu’à l’océan Indien.
Vaste programme !
1 commentaire:
Tout simplement brillant! Quel humour, quelle elegante maniere de dire les choses qui nous font mal (a nous maghrebins, pietines par des nains tels Sarkozy et l' imbecile BHL). Je dis bien 'pietines' car la Libye fait partie de notre histoire, et meme si Kadhafi merite mille fois le sort d'un Mubarak ou Ben Ali, en tant que maghrebins, on ne peut accepter qu' il le soit par cette racaille sioniste au pouvoir en France... d' ou mon degout pour ceux qui soutiennent ces ignares d' insurges en Libye!!
J' ai decouvert votre blog grace a un ami journaliste, desormais comptez une lectrice de plus!
Sorry pour le manque d' accent, j' ecris sur un clavier de la perfide Albion ;-)
Enregistrer un commentaire