lundi 17 avril 2017

Le vote des citoyens issus de la diversité fera t-il élire Mélenchon ?


C'est un sujet tabou dont tout le monde parle. Les frontistes avec assurance, les autres avec précaution. Les statistiques ethniques sont interdites par la loi. Combien de noirs, combien d'arabes en France ? Nul ne peut exactement le savoir. Une évidente certitude : le peuple des basanés forment la classe sociale la plus pauvre de la société.


À Paris, ils sont majoritaires dans les premiers métros du matin, sur les chantiers, à l'entretien des hôpitaux et des TGV, chez Mc Do et Uber... dans tous les petits boulots mal payés. On ne les voit jamais dans les beaux quartiers, les club huppés, dans les embouteillages des départs en week end, dans les stations de sport d'hiver...
Aux côtés des travailleurs déplacés de Pologne et de Roumanie, ils forment la cohorte des prolétaires précaires et des chômeurs en alternance.


Pourtant, dans l'élection présidentielle qui s'annonce serré, leurs votes seront déterminants. Sur les 45,7 millions d'inscrits, les citoyens à peau noire ou basanée seraient plus de 4 millions. 
Dix pour cent du corps électoral ce n'est pas rien !

Cette communauté populaire mais non populiste largement anti Front National avait jadis permis la victoire de Chirac en 2002 et de François Hollande en 2012. Aujourd'hui, ces Français d'en bas sont désabusés et déboussolés. Alors devant l'urne, il est probable que leur choix sera dicté par leur appartenance à une catégorie de citoyens doublement discriminés.

Dans la course à l'Élysée, ils sont invisibles en tête d'affiche. On les aperçoit furtivement en arrière plan. Ils sont les accessoires discrets et muets indispensables à l'image subliminale de tolérance affichée par le candidat.
Chacun des onze présidentiables bichonne ses figurants de couleur qui seront pourtant bien mal récompensés. Au cours de ces vingt dernières années les ministres noirs se sont comptés sur les doigts de la main. Le score est plus encourageant pour les arabes. Il faut rendre justice à Nicolas Sarkozy qui a promu « des représentants visibles de la diversité » et à François Hollande qui a amplifié le mouvement. Mais dans les états majors des partis politiques et dans la haute fonction publique, le plafond de verre reste très bas. Les élites en proportion pourtant très nombreuses ne parviennent pas à percer. Combien d'ambassadeurs, de généraux, de procureurs, de commissaires, de recteurs...? Combien de distingués dans la dernière promotion de la Légion d'honneur ?
Aucun descendant des indigènes de la République n'est parvenu à réunir les 500 signatures requises auprès des 42 000 grands électeurs. Cheminade, Lassalle, Asselineau, ont fait le plein haut la main. Rama Yade qui a pourtant été à la rencontre de plus de 1000 maires n'a rassemblé que 353 soutiens et le Dr Kamel Messaoudi seulement 3.
À la porte du pouvoir, comme à la discothèque, les vigiles veillent. N'entre pas qui veut.


Cette discrimination politique concerne toutes les nuances de couleur de peau: l'africaine, la caribéenne, la réunionnaise, la calédonienne, la métis, l'arabe, la kabyle, la turque, l'asiatique … Ghettoïsés dans les banlieues, ils se révoltent parfois à l'occasion d'injustices policières, rarement pour revendiquer l'égalité et la fraternité car ces valeurs sont les leurs et ils se sentent citoyens blancs de peau et de conviction. Si le bulletin blanc existait, ils l'utiliseraient en masse pour dire leur attachement à la démocratie et leur indifférence pour des candidats tellement éloignés de leurs préoccupations.
Du côté de la bien pensance sans nuances, on se désole ouvertement mais on se félicite tout bas que les sans dents  polychromes soient inorganisés. Les gonfaloniers de la diversité : Désir, Belgacem, Khomri, Placé... n'ont d'ailleurs jamais revendiqué le rôle, ils ont au contraire savamment gommé leur identité culturelle. Dati, Ben Guigui et Kadri se sont lamentablement déconsidéré. D'autres, plus dignes sont resté fidèles à leur culture comme Taubira, Bareigts, Pau-Langevin et Lurel... de son côté, Fleur Pelerin a carrément levé le pied.

Conscients de l'enjeu de ce réservoir à suffrages, les candidats redoublent tous de câlineries savamment ciblées.
Côté noir : Hamon s'engage à « Faire battre le cœur des Outre-mer » ; Fillon liste 25 propositions ; Macron offre 200 000 billets d'avion à prix cassés depuis les îles (incluant la Guyane) ; Le Pen annonce des policiers et des douaniers...
En hologramme ou en Airbus, tous les candidats ont fait le voyage pour annoncer aux oubliés du bout du monde que Paris allait enfin s'occuper d'eux. Dans cette débauche de promesses le programme émancipateur de Mélenchon fera sans doute basculer le vote des indécis dans les territoires en révolte et en métropole.
Côté arabe : Macron a eu le toupet d'aller négocier - avec succès - le soutien du pouvoir algérien. Pour autant, il est incertain que les discrètes consignes d'Alger soient suivies par les binationaux. François Fillon pour sa part, ménage al Assad (que les candidats s'appliquent à prénommer familièrement Bachar) et promet de réviser nos relations avec la monarchie saoudienne. Cela prouve qu'il ne leur doit rien. Tout cela est insuffisant pour convertir.
L'important suprême, c'est l'insupportable colonisation Israélienne. Lorsque l'on sait la sensibilité de la communauté arabe pour la cause de cette injustice qui s'aggrave de jour en jour depuis 50 ans, il est probable que dans son immense majorité elle donnera son vote à l'un des trois candidats de gauche ayant au moins pris l'engagement de reconnaître l'État Palestinien.


Par conséquent, la double fonction tribunitienne et de concorde du parti de la « France Insoumise » est en posture de rallier la majorité de la communauté des discriminés. Toutefois, si Jean Luc Mélenchon ne parvenait pas à se qualifier, il serait imprudent de compter à nouveau sur les citoyens issus de la diversité  pour faire barrage au Front National au second tour.


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