« Je
veux aider Hollande et les Français ! »
Cette petite
phrase du puissant roi Abdallah d'Arabie pourrait bien valoir à la
France des dizaines de milliards d'euros de contrats.
Le
doyen des monarques du monde est totalement tombé en amour. Il faut
dire que depuis son arrivée à l'Elysée, le Président français a
inconditionnellement aligné sa politique arabe sur celle du
souverain wahhabite. De Damas à Téhéran, Hollande est plus
royaliste qu'Abdallah.
Boudant
ostensiblement son allié historique étatsunien,
le souverain des deux saintes mosquées encense avec ferveur son
nouvel ami européen qu'il entend récompenser avec grandeur. La cour
propage qu'il faut désormais traiter les frankaouis avec égard et
amabilité. Attentif à sa relation avec le Président français, le
roi a récemment missionné à Paris son médecin personnel - qui est
aussi son ministre de la santé - pour faire taire les vilaines
rumeurs que propageait la petite presse sur son agonie.
Las,
Paris n'a pas encore pris toute la mesure de la faveur royale.
Certes,
gouvernement et patronat ont sonné la mobilisation. Mais en dehors
des 40 groupes du CAC, les industriels marquent peu d'appétence pour
une destination dénuée de charme. Nul n'aime vraiment séjourner
à Riyad où le temps n'a pas la même horloge qu'ailleurs. La
minute dure une heure. Ce n'est pas Dubaï ou Las Vegas ! Alors
pour éviter les découchés, ministres, hauts fonctionnaires et PDG
multiplient les aller-retour mais en jet privés.
Les
exportateurs français négligent leur chance inespérée d'avoir un
HEC à l'Elysée. Ils anticipent mal les dividendes de la diplomatie
économique hollandeuse.
Pourtant,
de gigantesques opportunités se présentent dans tous les domaines.
Ainsi la France devrait consolider sa position dans le pétrole et
l'eau mais surtout prendre une sérieuse option sur le programme de
seize réacteurs nucléaires dont le royaume souhaite se doter dans
les quinze prochaines années pour un budget de cent milliards de
dollars !
Dans
cette perspective, les cranes d'oeuf de la finance gambergent
fébrilement un projet d'accord cadre portant sur un mécanisme de
compensation « pétrole contre made in France », façon
barter britannique Yamamah mais en plus ambitieux. Car redoutant
l'éphémère de la lune de miel, d'aucuns souhaiteraient aller
jusqu'à sceller l'alliance franco-saoudienne dans le marbre d'un
pacte entre François et Abdallah, à la façon de Roosevelt et
Abdulaziz Saoud en 1945.
Le
ministre de la défense Le Drian, au retour d'un voyage au chevet du
roi a sonné la mobilisation du secteur de l'armement. Car dans cette
filière l'enjeu est capital. Des prochaines commandes saoudiennes
dépendent la poursuite de programmes industriels, la survie de
bassins d'emplois et la dotation des armées françaises.
Les
armées saoudiennes se distinguent par l'usage de l'achat « clés
en main ». Cette pratique est singulière, elle est contraire à
celle de tous les autres pays qui acquièrent des sous-sytèmes de
provenance diversifiées comme par exemple une carlingue
italienne, un module de navigation israélien, un moteur allemand, un
armement américain...Les Saoudiens eux achètent une capacité
d'emploi, du prêt à à combattre, du tout compris : armement,
formation, entretien du matériel, pièces détachées, construction
des bases... C'est un peu comme si l'acheteur d'une voiture toutes
options incluait dans sa commande une station service et une
auto-école.
En
contre partie de cette généreuse formule, le royaume saoudien exige
de traiter avec un mandataire chef de file et d'avoir la garantie de
performance de l'Etat vendeur.
Pour
répondre à ce besoin multiforme Paris dispose d'une structure
dédiée qui rassemble les principaux industriels de l'armement sous
l'autorité d'un représentant du ministre de la défense. En
quarante ans, cette équipe a négocié la vente d'un formidable
arsenal de véhicules blindés, missiles, avions ravitailleurs
hélicoptères... Mais sa principale référence reste la ventes des
frégates du programme Sawari 1 et 2 dont les dérives
rétro-commissionnées resteront sans doute le mystère le mieux
gardé de la cinquième République. L'officine a bon espoir de
placer le réassortiment d'une flottille de navires supplémentaires :
Sawari 3, pour une poignée de milliards d'euros.
Cerise
sur le gâteau, Riyad ambitionne d'accéder au club très fermé de
la sous marinade.
A
part l'Egypte et l'Algérie, aucune marine arabe n'a la capacité de
faire évoluer des sous-marins d'attaque. L'acquisition de ce type
d'engin par l'Arabie se justifie surtout par des considérations de
fierté nationale car le royaume est bordé d'une part à l'Est
par le Golfe persique peu profond donc vulnérable aux submersibles
et d'autre part à l'Ouest par la mer rouge, dont la seule menace
sérieuse provient des requins et des pirates.
Les
opposants au projet soulignent que les ressources humaines du pays et
les modestes compétences des forces navales saoudiennes ne lui
permettent pas d'envisager un tel bon technologique sans avoir
recours à la « coopération » en doublon d'équipages
étrangers (français ou pakistanais).
Ces
objections opérationnelles ne devraient pas empêcher la conclusion
prochaine d'un accord pour la mise en chantier d'une flottille de six
à dix sous marins assortis de leurs environnements logistiques. Le
projet est gigantesque car il inclut des coopérations industrielles
et la construction de bases navales.
Des
milliards par dizaine en perspective...
Mais
le jackpot saoudien du VRPrésident Hollande n'est que le tremplin
d'autres ambitions commerciales régionales encore plus audacieuses.
Ainsi
le Rafale n'a sans doute jamais bénéficié d'un contexte politique
aussi favorable. L'avionneur-sénateur qui ne brille pas par ses
talents d'exportateur saura-t-il saisir l'opportunité unique de
déverrouiller le ciel du Moyen Orient massivement doté de chasseurs
américains et britanniques ?
La
seconde ouverture commerciale des industriels de l'armement français
concerne l'accès au marché commun de la défense du conseil de
coopération du Golfe ; une organisation qui rassemble les six
pétromonarchies du golfe persique. Le GCC a développé un
gigantesque projet de protection de son espace pour contrer la menace
iranienne et irakienne et tenir les monarchies du Golfe à l'abri
d'agressions de toute nature. « Le Bouclier de la Péninsule
Arabe » dont la contribution saoudienne est majoritaire est une
ligne Maginot des temps modernes qui incluera un mur de missiles
infranchissables.
Des
milliards encore et encore....
Le
Drian ministre, tisse patiemment des liens de confiance avec chacun
des rois du pétrole et de l'armement. Déjà, le Saoudien et
l'Émirien semblent apprécier le langage breton.
Finalement
toute cette diplomatie d'affaires est cohérente avec la volonté
politique affichée de restaurer le commerce extérieure et l'emploi.
Reste que pour gagner ce challenge, Hollande président et
Le Drian breton devront se prémunir des colporteurs du syndrome
Ordralfabétix du nom du célèbre poissonnier bagarreur dont la
marée n'est pas très fraîche et qui propage la guerre dans son propre camp.
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