Le
« printemps arabe » avait éclos en décembre, « l’hivers
arabe » s’annonce en juillet.
Ce
qui s’est passé au Caire est un hold-up à main armée.
Il
y a un an à peine, le Président Morsi était élu à la majorité des suffrages
exprimés après un scrutin incontesté. Bien sûr, les quarante pour cent de
perdants n’étaient pas contents alors ils ont fomenté la sédition avec la bénédiction
de la bienpensante communauté internationale.
On
cherchera en vain dans l’actualité des témoignages d’indignation.
Les
« démocrates » de tous poils s’accommodent de ce déni flagrant ;
ils prétendent même que ce putsch a sauvé la démocratie !
Le
principe universel « un homme une voix » ne s’applique pas aux
mauresques. L’égalitarisme est le privilège des sociétés dominantes. Point.
En
tout autre lieu de la planète, le coup du Caire eut scandalisé les bonnes
consciences et rempli les avenues de Paris et Washington de
manifestants outrés. Mais l’Egypte c’est l’Afrique ! Et puis, que compte
l’opinion indignée d’un fellah face à un général de division qui ordonne
le tir et à un Prix Nobel de la Paix qui applaudit ?
Le
Président Morsi flottait dans son costume, il dérangeait tout le monde, son
emprisonnement ne gêne personne. Du haut de sa pyramide de soixante dix
millions d’âmes, il se croyait au centre de l’univers. L’élu d’Oum Dounia
s’imaginait invincible, il avait fait l’impasse sur le patronage des grands, il
n’a pas vu le vent tourner. Il a été balayé au coup de sifflet d’un
gratte-parchemin du département d’Etat washingtonien.
Les
événements se sont enchaîné. En quelques semaines l’affaire était pliée :
révocations à la Défense en Arabie, avertissements populaires en Turquie,
destitution au Qatar, putsch en Egypte. Seul couac au scénario du
feuilleton: le Général Ammar qui par sa démission préventive a probablement
épargné le sang de la petite Tunisie, désormais ultime et fragile espoir d’une
modèle pour le siècle.
Pourtant,
au Caire il y a quatre ans jour pour jour, le Président des USA dans un discours
retentissant ouvrait en grand la porte du suffrage universel aux
islamistes.
Il
vient aujourd’hui de la claquer fermement.
Pour
légitimer l’injustifiable soutien aux putschistes, Barack Obama a fait une
déclaration alambiquée sur le thème « la démocratie, ce n’est pas
seulement un processus électoral… » avant d’énumérer la liste des
comportements exigibles pour l’obtention du
label universel de vertu politique. Puis, ses ambassadeurs ont été chargés
d’aller faire la leçon aux islamistes de tous poils de barbe.
A
Tunis, Ghannouchi a reçu le plénipotentiaire américain sous le drapeau tunisien
et la bannière d’Ennahdha. Ces symboles ostentatoires révèlent la consistance
de l’entretien qui se tenait le premier jour du Ramadan et qu’aucun
communiqué n’est venu détailler.
Quelques
jours auparavant, François Hollande l’intelligent, avait préventivement pris le
contre-pied d’Obama en proclamant dans un discours devant l’Assemblée
constituante à Tunis : « l’Islam est compatible avec la
démocratie ! » Le Président de la République française qui compte des
millions de musulmans sur son sol parlait en connaissance de cause. Par cette
petite phrase, son discours de Tunis restera une référence. Mais les Tunisiens
sauront-ils profiter de ce retour d’influence et de cette brèche étroite
dans la nouvelle doctrine arabe de Washington ?
Au
Caire, les militaires vont désigner un gouvernement transitoire qui sera chargé
d’organiser des élections truquées pour élire un dictateur présentable. Le
petit peuple des mosquées va résister. Le Nil va saigner. L’Algérie a payé plus
de cent cinquante mille morts sa guerre fratricide. Quel sera le prix
pour l’Egypte et de la Cyrénaïque voisine ?
Le
monde arabe entier semble écarter cette perspective. L’Arabie exulte,
le Kuwait fait la fête, la Syrie applaudit. Les milliards de dollars affluent
pour tenter de noyer le feu qui crépite.
Faux-cul,
les capitales occidentales affichent leur « préoccupation ».
L’Ouest emprunte à l’Est l’argument stalinien « pas de démocratie pour les
ennemis de la démocratie » et se réjouit en douce du rétablissement de la
sécurité militaire à Suez et à la frontière d’Israël.
Hélas,
la paix risque d’être de courte durée tout comme le pari sur l’assoupissement
du sentiment d’injustice car la pléthorique armée égyptienne, forte de
cinq cent mille hommes et d’autant de réservistes pourrait bien se retourner
contre ses généraux gavés de sucreries américaines.
Et
l’on reviendra à la case départ !
On
verra bien qui d’Obama ou de Hollande aura raison !
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