Tariq Ramadan et
Caroline Fourest ont en commun le talent de faire parler d’eux. Ils adorent la
polémique et le contre-pied. Les journalistes en mal d’idées et le public
français en mal d’agitateurs d’idées les adulent ou les exècrent. Ce couple
infernal de la controverse professionnelle me fascine à l’insomnie.
Le frère Tariq vient de proclamer à Dakar :
« il faut tenir le discours de la responsabilité et éviter de juger »
Tout le monde a applaudi.
Puis il a ajouté…. « Et ce n’est pas parce qu’on
est homosexuel qu’on n’est pas musulman ! »
La déclaration a fait l’effet d’une bombe à
fragmentation.
L’auditoire est resté sans voix. Le référent de la
pensée musulmane européenne venait de tenir ces propos en plein mois de
ramadan. Alors dans l’immense salle, un beau jeune homme s’est levé pour crier
« ramadan je t’aime ! ».
Il n’a pas été inquiété car il parlait du jeûne bien
sur !
L’homosexualité masculine en Islam est un interdit
absolu passible de la circoncision au sabre en place publique. Dans tous les
pays à législation chariatique la sodomie est l’abomination suprême. Pour les
intégristes de tous poils, la pédérastie doit être génocidée ; c’est
pourquoi en terre d’Islam son apparence ou sa suspicion est marginalisée à
coups de bastons. Chez les moustachus d’Algérie et de Turquie elle
est totalement niée : « Ahh…chez nous y’a pas de pédés ! »
Pourtant, si tout le monde le cache, nul
n’ignore que les ouailles musulmanes comptent en proportion tout autant de
« déviants » que les juifs, les coiffeurs et les joueurs de
football ! (je connais un coiffeur juif qui joue au foot de fort belle
manière). Il est même une petite monarchie pétrolière que les diplomates nomment
ironiquement « la pédocratie », où la plupart des ministres sont
passés par le lit du souverain et où dans les soirées festives on consomme à
l’abri de paravents des petits garçons poudrés importés d’Asie.
En matière de tourisme sexuel, la notoriété de
l’Egypte et de la Tunisie n’est plus à faire. Déjà, sous la colonisation on y
trouvait des bordels unisexes de grande réputation.
Les Tunisiens sont hostiles à la tartufferie. Mon
éloigné parent le célèbre et talentueux chanteur Ali Riahi, petit-fils du
vénéré saint Sidi Brahim, se promenait maquillé et en tenue rose fuchsia sans
jamais essuyer les quolibets des promeneurs de l’avenue Bourguiba. Au Caire,
l’inamovible dernier ministre de la culture de Moubarak ignorait les insultes
et les menaces des frères musulmans, il s’amusait en sortant accompagné d’une
garde du corps à la poitrine dissuasive.
Tariq Ramadan en deux phrases a balayé quatorze
siècles d’hypocrisie. Qu’il en soit remercié.
Caroline Fourest est homosexuelle ; enfin je
crois car elle a une compagne sous son toit. (Mais ça ne veut rien dire ;
j’ai moi-même partagé au temps des vaches maigres la litière d’infortune d’un
camarade qu’aucune appétence réciproque n’est jamais venue égayer).
La pamphlétaire fait commerce d’idées comme d’autres
vendent de la soupe en sachet ou du dentifrice. Elle pratique le marketing du
faire valoir. Marine le Pen, Tariq Ramadan sont des bonnes enseignes pour
écouler sa marchandise. Il faut reconnaître que le procédé est habile car au
plan politique Fourest est (encore) une naine et au plan universitaire, sa
notoriété ne dépasse pas (encore) le café de Flore. Mais c’est une ambitieuse
qui occupera peut-être un jour la place de BHL ou de Tapie, ou bien les
deux !
Son dernier combat est celui des Femen dont
les méthodes radicales interpellent et le discours sulfureux dérange. Qui est
le marionnettiste des Femen ? On ne le saura probablement jamais. Afficher
les attributs de son sexe, c’est grossier, insulter l’islam c’est vulgaire. Pour
autant et en attendant de juger si la fin justifie les moyens, il convient de
se demander si la cause des Femen est juste.
Assurément si l’on prend l’exemple de celle d’Amina,
première innocente prisonnière politique du printemps arabe. Madame Caroline
est monté au créneau avec son porte-voix. Amina monopolise son blog, ses tweets,
sa parole sur Inter. Qui pourrait l’en blâmer?L’émancipation, l’égalité, la
parité, autant de batailles incessantes à mener pour conserver ou gagner le
droit de la femme à être l’égale de l’homme.
Par son action et son combat en ligne pour faire
libérer Amina, il faut saluer Fourest, même si on méprise le reste.
Si les intellectuels, grands ou modestes comme frère
Tariq et dame Caroline se rejoignent dans la lucidité d’une lutte contre les
intégrismes et les phobies sociales, alors l’utopie est à portée de nos
indignations.
Louange au grand Alexandre Vialatte pour conclure:
« …et c’est ainsi qu’Allah est
grand ! »
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