Sous un léger corsage
Qui fait des plis,
Deux petits seins bien sages,
Comme c’est joli !
La fredaine de
Montand ne me quitte pas.
Je pense au tableau d’Eugène Delacroix que des centaines de millions de
badauds ont admiré au Louvre. Toile de dimension et de portée gigantesques.
Elle représente une fille au téton dénudé, étendard levé, à l’assaut d’une
barricade: allégorie de l’héroïne des « trois glorieuses » journées
de la Révolution de 1830.
C’est « La Liberté guidant le peuple ».
Je me souviens de l’image
de cette insupportable liberté gravée sur les billets de cent francs français
dont les wahhabites d’Arabie d’un trait de feutre noir cachaient le
sein qu’ils ne sauraient voir.
Je songe à la
bédouine entrevue par Monsieur de Maupassant en 1885 sur la route de
Kairouan : habillée de bleue, montrant la chair ferme et bronzée
de ses jambes… marchant d’un pas tranquille, balançant doucement la
taille souple sur ses hanches, tenta les anges du ciel comme elle nous
tente encore, nous qui ne sommes point des anges
J’ai le souvenir des bourgeoises tunisoises de mon enfance vêtue de la
fouta et blouza révélant les plis du ventre et un nombril incongru.
Et des filles légères imitant Zohra Lambouba ; celle qui
enflammait les nuits de ramadan à Bab Souika par une danse du ventre
lumineusement mise en valeur par deux ampoules rouges tressautant au bout de
ses nichons.
Amina la
Tunisienne arbore son torse sur Facebook car elle le proclame, ce
corps lui appartient. Son père, son frère et le juge la séquestrent. L’état lui confisque ses papiers. Elle est folle, elle est
paria. Elle s’enfuit. Puis, entendant la voix
du peuple, elle part bouter les salafistes hors de Kairouan. La police et
l’injustice la rattrapent alors qu’elle tague
deux syllabes sur un muret blanc. Au trou ! Trois complices accourues en solidarité depuis l’étranger sont prestement soutien-gorgées
et enfermées.
Pendant ce temps,
sur les plages des très chics hôtels de Raouad, de Hammamet et de Djerba, dans
les clubs Med et les villages de vacances, la police veillent sur la
tranquillité des dénudés de tout poil qui ne sont pas encore accusés
d’association de malfaiteurs de la pudeur.
Mais Amina n’est pas une touriste.
Amina n’est pas Zohra Lambouba.
Amina n’est pas la vulgarité, elle est la liberté.
En Tunisie la vulgarité est libre, la liberté est en prison.
Libérez la
liberté !
1 commentaire:
Très beau post, concis, et ça dit tout ce qui pèse sur le pays.
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