Je veux attirer l’attention des trois fidèles lecteurs de ce blog et en appeler à leur conscience pour relayer le cri de mon ami Mouton.
En effet, en ce Saint week-end de Pâques, deux cent quinze millions, trois cent mille huit cent trente sept innocentes et saignantes tranches de gigots seront englouties sur les tables de France. Ne nous arrêtons pas en vaine polémique sur ce chiffre incontestable, ni sur l’origine de ces pauvres créatures pour la plupart Zélandaises, transportées comme des bêtes, dans des conditions inanimales à moins dix huit degrés. Il ne convient pas d’avantage de méditer comme le fait mon boucher sur l’usage des carcasses amputées de leurs jambes, dont l’industrie du cassoulet et autres préparations de haricots de mouton, peine à absorber les stocks, ni sur le sort des abats apprêtés à la-va-vite sans mojettes, lingots ou Soissons, par la multinationale Ronron.
Le mouton est la victime expiatoire « à bon dos » du Monde entier. Car la France n’est pas la seule à chercher à se débarrasser de ses « peccada mundi » ; les péchés du monde ont en effet infectés toutes les capitales. Rappelons que cette question a été traitée lors du dernier G20 et que les paradis mis en cause ont promis de faire la chasse aux loups.
Dans quelques jours, le 19 avril, la Grèce qui est au bord de la faillite, exécutera rondement, avec l’orthodoxie qu’on lui connait trois millions six cent vingt huit mille quatre cent trente deux Agnus Deis innocents. Les grecs, il faut leur rendre cette justice, ne sont pas gâcheurs. Dés potron-minet, le mouton entier sera soigneusement rôti à la broche avant d’être engloutis par les hellènes et les hellas qui plus tard, achèveront la fête en absorbant une salutaire soupe de tripes à la crème et à l’aneth copieusement arrosée de résiné à l’Alka-Seltzer.
Dans quelques mois, le monde musulman sera le dernier à s’inviter au méchoui. Nous sommes en 143O, et en retard, il faut attendre la fin de l’année hégirienne et le pèlerinage pour s’autoriser à égorger trois cents trente deux millions six cent dix mille huit cent douze colliers de mérinos et approchants. Inutile de dire que les pauvres doublures d’Ismaël seront intégralement boulottées, os sucés, laines filées et cuirs tannés. Al hamdou lillah !
Les prédicateurs lecteurs de marc de café et bulles de Perrier annoncent que la crise prendra fin avec le sacrifice du billionnième mouton. Cela laisse du temps pour spéculer sur le Panurge!
En attendant que la Chine s’invite au festin, il faut encourager l’Inde et le Pakistan à se goinfrer de Pilaos et l’Ouzbékistan à se délecter d’un Plov, digeste ragout de riz au suif et à la graisse de coton que l’on pousse avec du thé vert ou du cognac glacé. Les voisins Kazakhs plus raffinés, servent à leurs invités une tête de mouton bouillie, puis solennellement, à la pointe d’un grand couteau décollent avec soin les yeux de l’animal pour les offrir à leur hôte en hommage à sa « clairvoyance ». Si cela vous arrive, dites que vous n’êtes pas digne de cet honneur, réclamez la cervelle en prétextant l’atrophie de la votre, ou feignez d’être sourd pour avoir les oreilles, c’est selon votre goût !
Sous d’autres cieux plus civilisés, peut-être aurez-vous la révélation d’un plat de pieds de mouton farcis. C’est une œuvre d’art qu’aucun chef micheliné n’est capable d’accomplir. Si cela vous arrive, vous saurez que la crise est désormais derrière vous...
Ce sera le requiem de l’Agnus Dei !
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire