L’obsession
de Sarkozy était de vendre des armes. Il a échoué partout où il a essayé.
Chacun son métier.
A
ne pas vouloir y toucher, Hollande pourrait bien faire un carton plein.
Par
fidélité à la tradition, le Président se devait de réserver à la maison des
Saoud son premier voyage dans le monde arabe. Or noir oblige, l’Arabie est
notre première pompe à essence. Toutefois, ce pays n’ayant pas la réputation
d’un modèle de vertu démocratique, le protocole a jugé prudent de bricoler une
escale à Beyrouth.
Décollage
dimanche à minuit, coucher en vol. Petit déjeuner chez le Président libanais.
Déjeuner en vol. Diner à Jeddah chez le roi Abdallah. Nuit en vol dans la
chambre à coucher de l’A330. Réveil à Ventiane pour la conférence
euro-asiatique. Retour d’une traite le lendemain vers Paris. Ouf !
Malgré
l’emploi du temps serré, le Président a trouvé un quart d’heure pour rencontrer
à l’aéroport royal saoudien trois représentants de « la société civile » qui
militent dans le désert pour que le royaume accorde aux femmes des droits
extravagants comme celui de conduire une voiture ou de faire du sport.
Les
apparences sont sauves. Le Président pressé a donné de la voix. La magistrale
leçon de la France portera. Enfin…Inch’Allah !
On
attend les retombées diplomatiques et commerciales.
Les
arabes du nord nés du printemps son déçus. Marzouki et Morsi espéraient la
visite du porte-parole des libertés universelles. Ils attendront. Ils ont à
peine eu droit au présidentiel message de courtoisie lors du survol de leur pays.
La Tunisie est fauchée, l’Egypte aussi.
Le
socialisme réaliste a ses raisons que les droits de l’Homme ignorent.
De
ce point de vue, il était urgent de voler vers l’Arabie dimanche dernier car
David Cameron flanqué de son ministre de la défense était annoncé pour le
lendemain. Mais alors que le Président français « normal » démentait toutes
arrières-pensées militaro-industrielles, le Premier Ministre britannique lui,
assumait ouvertement sa fonction de VRP de l’armement. Dans sa conférence de
presse, il avouait sans ambages ni perfidie œuvrer à la conclusion d’un
troisième Yamamah encore plus fabuleux que les précédents.
Pour
les humanistes désarmés, rappelons qu’Al Yamamah (le pigeon en arabe) est un
mécanisme ingénieux de compensation : pétrole contre armement. Il permet de
mobiliser jusqu’à 600 000 barils de pétrole PAR JOUR soit la contre-valeur
fluctuante selon les cours et l’évaporation de 30 à 60 millions d’euros. Cette
manne est exclusivement réservée à compenser la fourniture de matériel de
défense britannique principalement ceux de BAE Systems. Ce contrat cadre a
donné lieu à de mirifiques transactions, et aussi à un retentissant scandale
inspiré par des envieux auxquels la raison d’Etat de Sa Majesté a immédiatement
mis le holà.
La
France de son coté lorgne un troisième Sawari avec de nouvelles frégates.
Sawari est un contrat d’Etat à Etat dont le premier volet a été signé il y a
plus de trente ans. Il concerne la fourniture de navires de guerre et
d’infrastructures navales clés en main.
Pour
ne pas être en reste avec les Anglais, Sawari 2 fait en France l’objet d’une
enquête pour corruption. Les juges d’instruction soupçonnent des
franco-gourmands d’avoir trempé les doigts dans le pot de confiture. Gageons
que les innocentes colombes étoilées seront blanchies et que le lampiste sera
rapidement trouvé.
En
attendant Paris espère conclure un vieux projet de carénage : RO (Regular
Overhaul) rebaptisé LEX (Life Extension) que des facétieux désignent d’un
simple regard de montre.
Mais
cette opération de relocalisation d’un chantier de réparation navale en mer
Rouge pour un milliard et demi d’euros fait des envieux parmi les industriels
locaux et asiatiques. Combinards fébriles et maladroits, les Français n’ont pas signé un seul grand contrat en Arabie depuis
quinze ans. Alors, ce projet de plusieurs centaines de milliers d’heures de
travail aura valeur de test pour jauger de la capacité du nouveau pouvoir à
vaincre le cercle de connivence des incompétents ? Pour le commerce extérieur
l’enjeu fait briller les yeux, car un retour d’affection wahhabite porterait la
promesse de commande de sous-marins, satellites, Rafale, centrales nucléaires et bien
d’autres bricoles encore…
Las,
le nonagénaire roi des Saoud souffre de vieillesse. Il ne gouverne plus.
Derrière son royal déambulateur, la cour et les sept mille princes
grenouillent.
A
François Hollande puis à David Cameron, le serviteur des deux saintes mosquées
a décerné le grand cordon vert, la plus haute décoration du royaume. Façon de
dire aux seconds couteaux qu’ils n’étaient pas venus pour rien !
Puis
il a téléphoné à Obama pour le féliciter de sa réélection. Bien entendu, ni le
roi des Saoud ni the President n’ont fait allusion à la banale commande du mois
: quelques avions ravitailleurs pour la bagatelle de sept milliards de dollars
! Business as usual.
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