mercredi 15 mai 2013

Arabie. François, David, Abdallah et les autres…




L’obsession de Sarkozy était de vendre des armes. Il a échoué partout où il a essayé. Chacun son métier.
A ne pas vouloir y toucher, Hollande pourrait bien faire un carton plein.
Par fidélité à la tradition, le Président se devait de réserver à la maison des Saoud son premier voyage dans le monde arabe. Or noir oblige, l’Arabie est notre première pompe à essence. Toutefois, ce pays n’ayant pas la réputation d’un modèle de vertu démocratique, le protocole a jugé prudent de bricoler une escale à Beyrouth.
Décollage dimanche à minuit, coucher en vol. Petit déjeuner chez le Président libanais. Déjeuner en vol. Diner à Jeddah chez le roi Abdallah. Nuit en vol dans la chambre à coucher de l’A330. Réveil à Ventiane pour la conférence euro-asiatique. Retour d’une traite le lendemain vers Paris. Ouf !
Malgré l’emploi du temps serré, le Président a trouvé un quart d’heure pour rencontrer à l’aéroport royal saoudien trois représentants de « la société civile » qui militent dans le désert pour que le royaume accorde aux femmes des droits extravagants comme celui de conduire une voiture ou de faire du sport.
Les apparences sont sauves. Le Président pressé a donné de la voix. La magistrale leçon de la France portera. Enfin…Inch’Allah !
On attend les retombées diplomatiques et commerciales.
Les arabes du nord nés du printemps son déçus. Marzouki et Morsi espéraient la visite du porte-parole des libertés universelles. Ils attendront. Ils ont à peine eu droit au présidentiel message de courtoisie lors du survol de leur pays. La Tunisie est fauchée, l’Egypte aussi.
Le socialisme réaliste a ses raisons que les droits de l’Homme ignorent.
De ce point de vue, il était urgent de voler vers l’Arabie dimanche dernier car David Cameron flanqué de son ministre de la défense était annoncé pour le lendemain. Mais alors que le Président français « normal » démentait toutes arrières-pensées militaro-industrielles, le Premier Ministre britannique lui, assumait ouvertement sa fonction de VRP de l’armement. Dans sa conférence de presse, il avouait sans ambages ni perfidie œuvrer à la conclusion d’un troisième Yamamah encore plus fabuleux que les précédents.
Pour les humanistes désarmés, rappelons qu’Al Yamamah (le pigeon en arabe) est un mécanisme ingénieux de compensation : pétrole contre armement. Il permet de mobiliser jusqu’à 600 000 barils de pétrole PAR JOUR soit la contre-valeur fluctuante selon les cours et l’évaporation de 30 à 60 millions d’euros. Cette manne est exclusivement réservée à compenser la fourniture de matériel de défense britannique principalement ceux de BAE Systems. Ce contrat cadre a donné lieu à de mirifiques transactions, et aussi à un retentissant scandale inspiré par des envieux auxquels la raison d’Etat de Sa Majesté a immédiatement mis le holà.
La France de son coté lorgne un troisième Sawari avec de nouvelles frégates. Sawari est un contrat d’Etat à Etat dont le premier volet a été signé il y a plus de trente ans. Il concerne la fourniture de navires de guerre et d’infrastructures navales clés en main.
Pour ne pas être en reste avec les Anglais, Sawari 2 fait en France l’objet d’une enquête pour corruption. Les juges d’instruction soupçonnent des franco-gourmands d’avoir trempé les doigts dans le pot de confiture. Gageons que les innocentes colombes étoilées seront blanchies et que le lampiste sera rapidement trouvé.
En attendant Paris espère conclure un vieux projet de carénage : RO (Regular Overhaul) rebaptisé LEX (Life Extension) que des facétieux désignent d’un simple regard de montre.
Mais cette opération de relocalisation d’un chantier de réparation navale en mer Rouge pour un milliard et demi d’euros fait des envieux parmi les industriels locaux et asiatiques. Combinards fébriles et maladroits, les Français n’ont pas signé un seul grand contrat en Arabie depuis quinze ans. Alors, ce projet de plusieurs centaines de milliers d’heures de travail aura valeur de test pour jauger de la capacité du nouveau pouvoir à vaincre le cercle de connivence des incompétents ? Pour le commerce extérieur l’enjeu fait briller les yeux, car un retour d’affection wahhabite porterait la promesse de commande de sous-marins, satellites, Rafale, centrales nucléaires et bien d’autres bricoles encore…
Las, le nonagénaire roi des Saoud souffre de vieillesse. Il ne gouverne plus. Derrière son royal déambulateur, la cour et les sept mille princes grenouillent.
A François Hollande puis à David Cameron, le serviteur des deux saintes mosquées a décerné le grand cordon vert, la plus haute décoration du royaume. Façon de dire aux seconds couteaux qu’ils n’étaient pas venus pour rien !
Puis il a téléphoné à Obama pour le féliciter de sa réélection. Bien entendu, ni le roi des Saoud ni the President n’ont fait allusion à la banale commande du mois : quelques avions ravitailleurs pour la bagatelle de sept milliards de dollars ! Business as usual.

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