Deux études
publiées opportunément avant les élections dans le landernau des Sciences Po
montrent que le vote juif est éparpillé alors que le vote musulman est
nettement à gauche. Il n’est pas dit quelle est l’inclinaison politique des séfarades par rapport aux
ashkénazes ni celle des musulmans arabes par
rapport à leurs frères d’Afrique noire et d’Asie qui ne le sont pas.
Pour les politologues du dimanche, l’électorat est composé d’agrégats de communautés.
On isole le vote harki, arménien, antillais, corse,
rapatrié, expatrié, romanichel…On abreuve l’électeur de statistiques fondées
sur des panels dits représentatifs. Ces études au doigt mouillé sont bidonnées
à souhait. Le 20 heures et C dans l’Air les réclament car pensent-ils,
« l’audience » est insensible aux convictions du chômeur
en fin de droits ou de la ménagère rmiste de cinquante ans.
Le quidam
est un citoyen sans identité à la voix enrouée dont nul ne se
préoccupe du vote sauf s’il appartient à la confrérie des mangeurs
halal, casher, tripoux ou macrobiotique. La presse du sectarisme flatte
les veaux en les triant comme des troupeaux selon des critères fantaisistes de
provenance et de pâturage.
Les heureux
élus n’échappent pas à la traçabilité.
Le nouveau gouvernement est moitié-moitié :
femmes/ hommes. Parité hétéros-homos ? Nul ne le sait encore.
Trois ministres sont applaudis par le CRIF : l’un est juif, l’autre a
épousé la religion de son épousée, le dernier aurait appris l’hébreu en
cachette… Il y a des maroquins musulmans. Evident. Mais aussi des protestants,
catholiques, maçons et même Hollandais ! Devant la photo de groupe sur le
perron de l’Elysée chaque communauté compte les siens. « Chouf,
chouf ! Il est de chez nous ! Son père est d’Oran ! Sa première
femme était tunisienne, il s’est remarié avec une crêpière bretonne, c’est un
moslem d’Armor ! »
N’importe quoi !
Proclamons une bonne fois pour toute que le vote
islamique en France est un mythe. Tariq Ramadan l’a démontré.
Depuis son minaret Suisse, le penseur musulman
avait appelé ses congénères français à soutenir massivement le candidat
sortant. Résultat : les neu neu du FN (qui sont nombreux) ont voté à
gauche !
En revanche, le vote arabe existe bel et bien. Sans
enthousiasme mais avec résolution il s’est porté massivement sur le
candidat socialiste.
Hollande est considéré car bien élevé, il est
respectueux donc respectable « mouhtaram ». Dans la plupart des
familles - pas seulement arabes- la bonne éducation est une parure de noblesse.
Le Président sortant était un mal éduqué. Il a été retoqué.
A l’intronisation populaire de François Hollande
place de la Bastille, il y avait des drapeaux arabes, (bretons et corses aussi), tout comme pour Chirac il y a dix ans à
la Concorde…. Mais qui s’en souvient ?
Oui, le vote arabe existe, il est authentiquement
français.
Reste
qu’au-delà des préoccupations du quotidien, les citoyens attendent une relation
apaisée avec les pays arabes. D’abord parce que des millions d’entre
eux ont des racines en Afrique du Nord et que la seconde langue parlée dans
l’hexagone est l’arabe. Cette « arabité » mériterait de l’audace
diplomatique comme par exemple de demander l’adhésion de la France à
la Ligue Arabe comme membre observateur, au coté de l’Inde du Brésil et du
Venezuela.
La reconstruction de
notre relation avec l’Algérie appelle un signal fort dès juillet prochain. Hollande ira-t-il à Alger célébrer le
cinquantenaire de l’indépendance ? Après un demi-siècle de ressentiments,
il serait temps de déchirer la page et la jeter aux historiens ! En
Algérie comme en France, le nombre d’anciens combattants augmente d’année en
année. A chaque occasion, les fédérations distribuent sans discernement
médailles et breloques. Tout est prétexte à commémoration unilatérale. Tout est
prétexte à polémique. De part et d’autre, les vieux empoisonnent de leurs
souvenirs le présent et l’avenir de leur descendance. Que je sache,
en 1968, cinquante ans après l’armistice de la grande guerre et seulement vingt
trois ans après la libération, l’Allemagne et la France s’étaient déjà
serré la main et nul n’aurait songé à traiter Dany Cohn Bendit de Boche.
Hollande
ira-t-il à Tunis dire la solidarité française à la révolution ? Ses mots sont
attendus avec impatience. C’est une urgence ! Chaque journée
d’indifférence qui passe retarde d’autant le processus démocratique. La
France a le devoir d’être aux côtés des
séculiers. Depuis les élections tunisiennes libres, depuis la constitution d’un
pouvoir légitime, les autorités françaises sont
embarrassées. Le docteur Marzouki, Président de la
République tunisienne, a passé une partie de sa vie à soigner en
France c’est un militant des droits de l’homme. Cela devrait suffire
à lui réserver une parade sur les Champs Elysées !
Hollande
ira-t-il au Caire dire la différence entre la tolérance et l’intégrisme. Osera-t-il
parler de l’Evangélisme américain, du Sionisme israélien, du Salafisme saoudien
et qatari, de l’Islamisme iranien ? Osera-t-il rappeler que les Français musulmans sont bien
plus nombreux que dans la plupart des Etats du Golfe et qu’ils ont choisis
de vivre leur foi dans un pays où la laïcité est
« sacrée » ? S’adressera-t-il aux Coptes d’Egypte qui en
proportion et en nombre dépasse les musulmans de France ?
Ira-t-il en
Arabie, au Kuwait, dans les Emirats pour parler d’autres sujets que celui de
l’armement ? S’abstiendra-t-il d’aller parader aux côtés de la seconde épouse de l’Emir du Qatar ?
Ira-t-il à
Beyrouth braver Damas ?
On peut
rêver de grandeur ! Du retour à une politique qui avait porté
l’influence de la France en Orient à l’égale des deux grands parce qu’elle
était indépendante des Israéliens.
En attendant, on se consolera de la certitude que
la posture arabe de l’Elysée ne passera plus par le protocole des déjeuners
d’affaires à l’hôtel Bristol avec des intermédiaires sulfureux. De même, il est
peu probable que des ministres en exercice pataugent cet été dans la piscine de
Monsieur Takieddine. Quant à imaginer le Premier Ministre –dont le nom est
imprononçable en arabe car il désigne l’appendice caché derrière la feuille de
vigne- en villégiature à Marrakech aux frais de la princesse !
Les représentants nouveaux de la France sont des
gens extraordinairement ordinaires. Ni Ray Ban, ni Rolex, ni BHL, ni nana. Le
roi Abdallah d’Arabie qui se souvient encore du petit mal élevé qui
lui avait exhibé la semelle de sa chaussure va apprécier le changement de
posture.
Déçu par
Obama dont les discours du Caire et d’Istanbul se sont envolés sous les cieux
hébreux, le monde arabe cherche désespérément un interlocuteur occidental
raisonnable. Hollande porte la promesse de l’emploi. La voie est étroite pour
louvoyer sur le théâtre oriental de la guerre froide que se livrent les blocs sino-russe et étatsunien. L’engagement de forces françaises
contre l’Iran ou la Syrie n’apporterait pas plus de dividendes que ceux du Golfe,
d’Afghanistan ou de Libye.
Pour la
première fois depuis longtemps, le chef de l’Etat français peut porter son
regard sur l’Orient en s’affranchissant des influences électorales. Pour la
première fois depuis plus de trente ans, le Quai d’Orsay est en capacité de
tourner le dos au domaine réservé jusqu’à présent à la place Beauvau. Les
intérêts de la France ne doivent plus être dictés par la synagogue ou la
mosquée de Paris. Il revient au nouveau pouvoir de recadrer le CRIF et l’OIF sur
le champ exclusivement républicain et de se libérer de leur ingérence en
politique étrangère.
L’été arabe
sera diplomatiquement chaud pour la France. Le gouvernement nouveau, par le
rassemblement des compétences, laisse entrevoir l’espérance du
déploiement d’une politique forte à l’abri des lobbys. Elle sera de nature, si
elle réussit, à réconcilier par ricochet les banlieues avec la Lozère.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire