Dans un café
de Montparnasse, une blonde aux yeux bleus s’installe à notre table. Elle pose
délicatement le bichon blanc qu’elle portait dans un sac en bandoulière. Le
petit chien agite le museau, flaire les pattes de Georges, accepte une
caresse puis rassuré, s’en va terminer sa grasse matinée sous la table.
Tracy commande un thé. Elle me laisse parler. De temps en temps, elle lance
quelques balles qui deviennent de plus en plus serrées. Implacable, elle monte
au filet. Le discours est clair, structuré, documenté, imparable. C’était une
partie amicale. Madame Chamoun excelle dans tous les combats de la politique.
Elle est légère, vive, méthodique. Elle a mis à terre plus d’un gladiateur. Si
vous la rencontrez, ne vous fiez pas à son apparence, ne baissez pas la garde.
L’angélique charmeuse est une adversaire implacable.
Bon perdant,
j’accepte la grâce d’un autographe du dernier livre qu’elle m’offre
généreusement.
Au Liban, la politique n’est pas un jeu pour
enfants de cœur. A la moindre faute d’inattention on peu y laisser ses tripes
et celles de sa famille. Pendant la guerre du Liban, l’ancien
correspondant de l’AFP se souvient encore de la blondinette de quinze ans qui
montait la garde derrière des sacs de sable au milieu des combattants aguerris.
Depuis, la gavroche a grandi dans la grandeur d’une famille massacrée par les
siens.
Le Liban, c’est compliqué. Chaque montagne possède
ses codes et sa religion. Les haines et les amitiés sont ancestrales. La
mémoire est longue. Les vies sont courtes.
L’Orient pour les Nuls, on n’y comprend rien.
Et pourtant, il le faut car « l’avenir de l’Occident se joue au
Liban ».
« Le sang de la paix » de Tracy Chamoun
publié chez Lattes est différent. Il est recommandé d’en commencer la lecture
de bon matin si on veut éviter l’insomnie. Car à le lire passionnément, on
devient intelligent. L’auteure est écrivaine et cela change tout. L’émotion
dominée expose parfaitement les enjeux d’une géopolitique régionale qui
métastase irrémédiablement vers l’Europe. A travers l’histoire des Chamoun, ce
sont les mécanismes de haine intra-communautaires, de fratries
interreligieuses, de manipulations israéliennes,
saoudiennes, syriennes et j’en passe qui
deviennent lumineux.
Les ignorants sauront tout, les savants apprendront
des choses.
Mais Dame Chamoun n’a pas écrit pour seulement
témoigner. Elle lance une proclamation de candidature « Urbi et
Orbi ». Son parti est constitué. Elle sera députée. La petite fille de l’ancien Président de la République
accédera-t-elle ensuite à la magistrature suprême ? Elle en a la volonté
et les capacités. Si le destin lui prête vie, elle pourrait bien parvenir à couper les moustaches des machos et réussir l’exploit de
devenir la première femme arabe …
I have a dream !
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